Des bourdons ont été équipés de QR Codes pour mieux mesurer l’impact des pesticides

Des bourdons ont été équipés de QR Codes pour mieux mesurer l’impact des pesticides

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(c) James D. Crall / Plos

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Par Pierre Schneidermann

Publié le

Comme des mini-sacs à dos.

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À moins que vous ne viviez coupés de toute civilisation et télécommunications, il est impossible d’ignorer la disparition alarmante des insectes pollinisateurs du monde entier – surtout celle des abeilles, la plus médiatisée.

Principal responsable de l’hécatombe : les néonicotinoïdes, l’une des familles d’insecticides les plus utilisés au monde qui, directement ou indirectement, les tuent ou les rendent plus vulnérables aux nouveaux prédateurs et maladies.

Outre la sostalgie que ressentiront certains, la disparition de ces insectes pourrait mener à la radiation de la planète d’une bonne partie des fruits et légumes qui se trouvent dans nos assiettes. Malaise à tous les étages, synthétisé dans cette animation du Monde :

Les entomologistes savaient déjà que les néonicotinoïdes n’affaiblissaient pas seulement les pollinisateurs dans la nature, mais modifiaient également leurs comportements à l’intérieur d’une ruche. Cette observation était cependant difficilement quantifiable.

James Crall, un biologiste d’Harvard, s’est chargé de faire parler les faits en équipant des bourdons de QR Code en guise de sac à dos, pour mieux les observer. Les résultats de son travail ont été publiés dans la revue Science et le magazine WIRED a rendu ces conclusions accessibles au grand public.

Loin du grand air, les colonies étudiées ont été dispatchées en labo dans une dizaine de boîtes transparentes en acrylique faisant office de ruches artificielles. Elles ont ensuite été observées pendant deux semaines, à intervalles réguliers. Leurs comportements ont pu être traqués sans vergogne grâce à une caméra robotique rivée aux QR Codes et, pour reproduire le fléau environnemental, certains des bourdons ont préalablement ingéré des néonicotinoïdes distillés dans du nectar.

Des différences de comportement – sans surprise, rajoutera-t-on – ont été constatées, surtout la nuit. Les insectes exposés, moins actifs, se reposent davantage (il ne reste plus qu’à leur faire écouter Angèle). Et ça, c’est grave. Conséquence à l’intérieur de la ruche, les bourdons porteurs de QR codes se tiennent davantage éloignés de la chambre de nidification et donc de leurs larves, qui ne réclament rien d’autre que d’être couvées bien au chaud.

Pour ne rien arranger, les “canopées de cire” habituelles, qui maintiennent également la température convenable, ont tout simplement disparu. Moins protégées pour ces deux raisons, découvaison et décanopée, les larves souffrent d’une mauvaise thermorégulation. Son bon développement impacté, la relève souffrira de déficiences. Les bourdons les plus réacs pourront enfin dire que c’était mieux avant.

Ces derniers, comme les abeilles, vivent en collectivité. Mais les conclusions de l’étude sont aussi particulièrement intéressantes pour les femelles pollinisatrices sauvages, moins étudiées, qui mènent leur vie en free-lance, loin des open spaces de la ruche et s’occupent de leur marmaille en toute monoparentalité.