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Après 130 ans, le kilogramme change officiellement de définition

Après 130 ans, le kilogramme change officiellement de définition

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Crédit: WikipediaCC

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Par Thibault Prévost

Publié le

Jusque-là défini par le poids d'un cylindre métallique, le kilogramme est désormais basé sur une formule mathématique.

Ce lundi 20 mai, journée mondiale de la métrologie, le kilogramme a définitivement changé de définition. La réforme majeure du Système international d’unités (SI), votée lors de la 26e Conférence générale des poids et mesures (CGPM) les 16 et 18 novembre 2018 à Versailles, entre en vigueur aujourd’hui et délaisse définitivement les référentiels matériels de la mole, du kilo et du kelvin au profit de la stabilité d’une constante mathématique. Une décision jugée “historique” par les représentants des 60 pays présents à la conférence.

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Ce que ça change ? Énormément de choses. Imaginez : depuis 1889, le kilogramme international est basé sur un objet physique, appelé le “grand K” et précieusement conservé au Bureau international des poids et mesures (BIPM) à Sèvres, en région parisienne. Le “grand K” est un cylindre de platine et d’iridium isolé du monde extérieur par une cloche de verre, censé indiquer à tout jamais la valeur d’un kilogramme.

50 microgrammes de variation en un siècle

Le plan était parfait pour l’époque, mais c’était sans compter sur la tendance qu’ont les objets physiques à changer de masse, même imperceptiblement, au cours du temps. Avec les années, le “grand K” ne pèse plus précisément un kilo, comparé aux six autres prototypes témoins réalisés à la même époque.

À force d’être manipulé par les chercheurs, le cylindre a perdu près de 50 microgrammes (pour vous donner une idée, il faut 1 000 microgrammes pour faire 1 milligramme). C’est dérisoire lorsqu’il s’agit de faire vos courses au marché, mais essentiel dans des domaines de pointe comme l’informatique et la physique quantique, qui mesurent des masses dans le domaine de l’infiniment petit.

Pour remédier à cet intolérable degré d’imprécision, les membres du BIPM ont donc pris une décision radicale : adieu les référentiels matériels, le kilo sera désormais irrémédiablement défini par des constantes mathématiques, par nature invariables.

Depuis le 20 mai, un kilogramme est donc défini à partir de la constante de Planck, notée “h”, qui permet d’exprimer un quanta, soit le seuil minimum d’énergie attribuée à une particule, en la reliant à sa fréquence (en mécanique quantique, on parlera plus volontiers de pulsation). C’est aujourd’hui l’un des piliers de la physique quantique.

La mole, l’ampère et le kelvin sont également mis à jour

Outre le kilogramme, d’autres unités de valeur subissent la même refonte abstraite, afin de faire de tout le Système international d’unités un environnement stable et universel basé sur des invariants de la nature (des valeurs indépendantes des caprices du temps ou de l’espace).

La mole, qui exprimait jusque-là la quantité de matière contenue dans 0,012 kg de carbone 12 (et était donc sensible aux variations du kilo) est désormais basée sur la constante d’Avogadro, utilisée exclusivement en chimie.

Le kelvin, une unité de température définie depuis 1954 par le “point triple” de l’eau, où les trois états (solide, liquide et gazeux) coexistent (soit 0,01 °C), sera désormais lié à la constante de Boltzmann, notée k, qui lie l’énergie d’un système au niveau atomique à sa température.

L’ampère est mesuré depuis 1948 par l’expérience dite “idéale” (et donc irréalisable) de deux fils infiniment longs séparés d’un mètre l’un de l’autre, entre lesquels passe du courant. En pratique, l’ampère est depuis longtemps mesuré par des étalons bien plus précis basés sur des effets quantiques. Dans le nouveau SI, l’ampère sera lié à la charge élémentaire, notée e, qui correspond à la charge électrique d’un proton, et l’on retrouvera la constante de Planck, h.

Au final, nous avons un système équilibré et entièrement indépendant des vicissitudes naturelles. Maintenant vous savez.