L’acteur principal de Red Dead Redemption 2 veut lutter contre la masculinité toxique

L’acteur principal de Red Dead Redemption 2 veut lutter contre la masculinité toxique

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Par Pierre Bazin

Publié le

Arthur Morgan est probablement l’un des premiers grands personnages masculins de jeu vidéo à aborder le sujet.

Dans une longue interview accordée à VG247, Roger Clark – l’acteur doublant Arthur Morgan, le héros de Red Dead Redemption 2 –, est revenu sur la construction de son personnage. Au cours des centaines d’heures d’enregistrement nécessaires, il a eu le temps de prendre énormément de recul sur le protagoniste de l’aventure, et de manière générale sur la représentation des figures masculines que les joueur·euse·s peuvent incarner dans les jeux vidéo.

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Dans Red Dead Redemption 2, vous commencez comme dans la plupart des jeux Rockstar (Grand Theft Auto) : vous faites une première mission d’introduction, puis différentes icônes apparaissant sur la carte vous guident vers des PNJ (personnages non-joueurs) d’intérêt.

Au départ, vous êtes un soldat obéissant, la force brute du gang, toujours prêt à vous mettre en danger. Mais au fur et à mesure, le point de vue d’Arthur Morgan s’enrichit de nombreuses expériences et évolue. Vous continuez de suivre des ordres de missions, mais peu à peu Arthur commence à s’émanciper de la figure paternelle du chef de gang, Dutch Van der Linde.

À ce propos, Roger Clark explique qu’il était très important pour lui de montrer les faiblesses de ce personnage, a priori invulnérable :

Je voulais apporter une certaine vulnérabilité à Arthur, ce qui, à mon avis, est une dimension peu abordée par les westerns. Quand nous pensons à ce genre, nous pensons à un protagoniste masculin fort, et je pense qu’il est important de montrer qu’il existe de véritables faiblesses dans l’ego masculin ou dans les personnages masculins. Je pense que nous pourrions avoir une masculinité beaucoup moins toxique si nous admettions que les hommes peuvent aussi être fragiles – ou au moins capables d’être vulnérables et effrayés.

La question de la masculinité n’est pas nouvelle dans les œuvres de fiction, mais il est vrai que le jeu vidéo a encore beaucoup de retard lorsqu’il s’agit de décrire les sentiments ou failles d’un protagoniste homme. Si les jeux japonais sont moins réticents à présenter une vision androgyne (Final Fantasy) ou enfantine (Kingdom Hearts III) de leurs héros, du côté des productions occidentales, il y a encore beaucoup de travail.

C’est particulièrement le cas avec le genre de l’action-aventure, où incarner un personnage fort seul face à de nombreux ennemis semble, aux yeux des créateurs (et des joueurs ?), être incompatible avec une certaine faiblesse émotionnelle.

En effet, il est rare de voir un personnage masculin pleurer dans ce genre de jeux ou même de souffrir d’autre chose que d’une blessure physique. À l’inverse, les personnages féminins et leurs réactions parfois surréalistes sont encore aujourd’hui utilisés pour mettre en exergue la dimension dramatique d’une situation (Resident Evil 2).

Heureusement, certains efforts commencent à se faire sentir dans des titres récents. On pense notamment au personnage de Kratos dans le dernier God of War : autrefois symbole de virilité absolue, le demi-dieu a été (un peu) humanisé par sa relation avec son fils.

Enfin, du côté de Red Dead, Arthur Morgan prononce une phrase rarement entendue de la part d’un protagoniste masculin : “J’ai peur.” Une nouvelle preuve que la dernière pépite de Rockstar Games n’est pas un simple défouloir pour frustrés dans le Far-West mais une véritable révolution, y compris dans la narration.