AccueilPop culture

Dans la tête de Vince Gilligan, le père de Breaking Bad et Better Call Saul

Dans la tête de Vince Gilligan, le père de Breaking Bad et Better Call Saul

avatar

Par Nicolas Robert

Publié le

1989 : la rencontre avec Mark Johnson, son mentor

La Governor Screenwriting Competition de Virginie tient une place à part dans le parcours de George Vincent Gilligan Jr. de son vrai nom. Avec le scénario du film Meli-mélo, réalisé ensuite par Dean Parisot (avec Luke Wilson et Drew Barrymore), le jeune auteur âgé de 22 ans attire pour la première fois l’attention de ses pairs.
À l’époque, cela fait déjà dix ans qu’il envisage d’être scénariste. Avec son pote Angus Wall (Oscar du meilleur montage en 2010 pour The Social Network), il a grandi en s’intéressant à la façon dont on fabrique des films. Jusqu’à ce que Jackie, la mère d’Angus, lui confie un jour une caméra Super-8. Elle l’a surtout encouragé à poursuivre une carrière artistique, coûte que coûte.

Pour le gamin de Richmond, c’est le déclic. Après des études à la New York University et à la Tisch School of Arts, Vince signe le script de French Fries, qui obtient le prix du meilleur scénario. Parmi les jurés qui l’ont récompensé se trouve un producteur de cinéma. Son nom : Mark Johnson. Presque vingt ans plus tard, il deviendra le producteur de Breaking Bad.
“Il est venu me voir et m’a dit qu’il aimait beaucoup ce que je faisais, explique Gilligan dans un entretien fleuve pour le site Emmys TV Legends. Il m’a demandé de lui envoyer d’autres scripts et c’est comme ça qu’il est devenu mon mentor.” À l’époque, c’est sûr : il va travailler dans le cinéma. Johnson lui demande cependant de ne jamais s’installer à Los Angeles. “Si tu y vas, tu vas devenir un de ces trous du cul de Hollywood”, lui-dit-il.

À voir aussi sur Konbini

1995 : son premier épisode dans X-Files

“J’étais dans ma chambre d’hôtel et je regardais mon ombre. Je me suis dit que ce serait vraiment flippant si mon ombre devenait vivante et qu’elle commençait à évoluer indépendamment, pour dévorer les gens. Je lui en ai parlé. Il a voulu en savoir plus et m’a proposé d’en faire un épisode. Le paradoxe, c’est que je n’étais pas spécialement en train de lui vendre quelque chose. Mais lui était acheteur.” (Emmys TV Legends)

Après avoir écrit l’épisode “Soft Light” (saison 2, épisode 23 avec Tony “Monk” Shalhoub en guest), Gilligan suit la production de l’épisode au Canada. Carter lui propose ensuite de rejoindre l’équipe de scénaristes à plein temps. Ce qu’il refuse ! “J’étais flatté, mais j’avais une idée de film en tête et je voulais vraiment la pitcher à Mark Johnson.” Sauf que ce dernier n’a pas accroché. Pas du tout.
Plusieurs mois après leur rencontre, il recontacte Carter, pour savoir s’il a toujours besoin d’un scénariste. Le père des X-Files accepte et Gilligan finit par déménager. Il ne le sait pas, mais il vient de se lancer dans une aventure de sept ans.

1998 : la rencontre avec Bryan Cranston

“J’ai eu l’idée de cet épisode en m’inspirant du film Speed et d’un épisode de la série Homicide, dans laquelle on suit un homme qui s’apprête à mourir après être tombé d’un quai de métro. Les flics restent à ses côtés et on s’aperçoit que c’est un sale type. Un sale type qui sait qu’il va mourir. Je voulais raconter l’histoire d’un gars comme ça, pour lequel on aurait de l’empathie.”

C’est de cette façon que naissent Drive et Patrick Crump, un homme qui prend Mulder en otage et le force à conduire une voiture. Si le véhicule s’arrête, Crump mourra. L’idée est forte. Encore faut-il trouver un acteur.
“Le casting a été très difficile jusqu’à ce qu’un nom tombe. Celui de Bryan Cranston. Il a fait des essais et il tenait parfaitement le rôle : il arrivait à être effrayant et très humain.” Et ce n’est que plus tard que Gilligan découvrira qu’à l’époque, Cranston jouait dans Malcolm.

2005 : le jour où naît Breaking Bad

Le projet prend aussi une dimension toute personnelle : “J’allais avoir 40 ans et la question de la crise de la cinquantaine m’interpellait déjà. Je me suis demandé ce que ce serait de se retrouver dans cette situation, non pas parce que l’on est frappé par une sorte de ‘midlife crisis’ mais parce que l’on voit arriver la fin de sa vie… Pour moi qui ai l’habitude d’avancer lentement sur une idée, c’était très étrange : je vivais tout le contraire.”

Reste à trouver une chaîne qui accepte le projet. Un premier entretien avec des responsables de la chaîne TNT se termine sur une phrase : “Nous adorons ce projet, mais si nous l’achetons, on va nous virer.” C’est non, donc. Les choses se passent mieux avec FX, qui commande le script du pilote avant de passer son tour. Ses responsables cherchent à l’époque à séduire un public plus féminin : Walter White ne correspond pas vraiment à ces attentes.

Lorsque Showtime développe le projet Weeds, avec une mère de famille qui se lance dans le trafic de marijuana, Gilligan pense que tout est fini. Jusqu’à ce que l’un de ses amis fasse suivre le projet à la chaîne AMC, qui n’a pas encore lancé Mad Men.
Lorsqu’il apprend la nouvelle, Gilligan pouffe : “C’est une bonne idée de l’envoyer à la chaîne qui diffuse des westerns. On peut aussi le faire suivre à Food Network [une chaine culinaire, ndlr] : après tout, la série parle de cuisine…”
Quelques semaines plus tard, la direction d’AMC lui annonce qu’elle veut produire la série. Fini de rire.

2012 : le spin-off Better Call Saul