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Entre rêve et nature, Martin Stranka utilise la photographie comme une thérapie

Entre rêve et nature, Martin Stranka utilise la photographie comme une thérapie

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Par Ella Kemp

Publié le

On vous présente l’univers troublant de Martin Stranka, un photographe pour qui l’art est une véritable thérapie.

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Ce n’est pas un secret : l’art a toujours été célébré pour ses vertus cathartiques. La photographie, la poésie, la musique et le cinéma permettent aux artistes de s’exprimer de façon quasiment thérapeutique. Un phénomène que connaît bien Martin Stranka, un photographe professionnel autodidacte qui fête cette année ses dix ans de carrière.

Martin Stranka partage son temps entre ses shootings en free-lance et ses expositions, qui l’ont mené aux quatre coins du monde. Il nous explique que son travail s’inspire de “la sérénité qui règne dans le laps de temps qui sépare le rêve du réveil”.

Vivant à Prague, ce jeune photographe a reçu une cinquantaine de récompenses pour les photos qui lui ont été commandées en Amérique du Nord, en Amérique du Sud, en Europe et en Asie. Si sa carrière décolle aujourd’hui, cela n’a pas toujours été simple ; il a mis du temps à trouver sa voie.

“J’ai déversé tous mes maux dans mon art”

La photographie a permis à Martin Stranka d’exprimer des sentiments pour lesquels les mots lui manquaient, et l’a sauvé quand il a perdu un proche dans un terrible accident, il y a dix ans. “J’avais l’impression d’avoir besoin de trouver quelque chose, une soupape, et une thérapie”, explique-t-il.

S’il a toujours aimé prendre des photos, c’est cette tragédie qui a transformé un hobby en passion, et lui a donné un but alors qu’il s’ennuyait à l’époque en école de commerce : “J’ai déversé mon cœur brisé dans mon art.”

Récemment, Martin Stranka a photographié des animaux sauvages secourus par des humains, en compagnie de leur sauveteur. S’il n’avait pas l’intention de se concentrer sur ce sujet, celui-ci semble s’être imposé à lui au moment où il en avait le plus besoin : “Je me sentais plutôt seul, et j’avais besoin de quelqu’un à mes côtés dans ma vie.”

Pour Martin Stranka, les animaux ont une puissance symbolique, et nous rappellent nos proches. Ils parviennent en cela à remplir le vide laissé par ceux qui nous ont quittés. Il explique qu’il a réussi à figer ce sentiment en images, puisque les animaux qu’il a photographiés avaient tous pris l’habitude d’être proches des humains depuis qu’ils avaient été sauvés. Mais leur instinct sauvage n’ayant pas disparu, il lui a parfois fallu tout une journée de travail pour obtenir le cliché parfait.

Until You Wake Up (“Jusqu’à ce que tu te lèves”), son dernier cliché en date (ci-dessous) montre un cerf blanc près d’une voiture accidentée sur une route enneigée. Martin raconte que chaque session photo est chargée d’émotions intenses, et celle-ci en particulier.

Ses photographies sont le reflet de sentiments enfouis et d’émotions viscérales, qui parlent à tout un chacun par le biais d’un symbolisme pur. Le photographe considère ses portraits d’animaux comme une partie intégrante de sa série I Found Silence (“J’ai trouvé le silence”), dont la thématique tourne autour de l’équilibre intérieur et de la quête de sérénité à travers l’art.

La photographie pour documenter et se souvenir

À l’ère d’Instagram, nous avons demandé à Martin Stranka si les photographes professionnels avaient toujours leur place dans un monde où l’instantanéité prime parfois sur la qualité. Il reconnaît la multiplication de photographes amateurs et l’accepte.

Notre planète change à un rythme effréné, et le fait d’avoir autant de gens qui documentent cette évolution sur des réseaux sociaux accessibles à tous est précieux à ses yeux :

“Cette accessibilité croissante sera précieuse pour les générations à venir, ainsi que l’accessibilité de l’équipement, prendre des photos est plus abordable que par le passé.”

En ce qui concerne ses sources d’inspiration, Martin Stranka n’a pas de limite : “Parfois les gens oublient la beauté incroyable de notre quotidien”, confie-t-il. Il se concentre sur la beauté de la nature, avec ses animaux mais aussi ses odeurs et la sensation suscitée par le changement des saisons. Des feuilles d’automne dont les couleurs sont mises en valeur par la lumière du coucher du soleil, par exemple. Cela peut sembler surfait, mais cette beauté demeure intemporelle.

Pour fêter ses dix ans de carrière, Martin Stranka publie un recueil de photographies de grande qualité sobrement baptisé 10 Years. L’ouvrage réunira des photos qu’il a prises entre 2007 et 2017. “J’avais le sentiment de devoir terminer cette décennie de travail d’une façon ou d’une autre. Je pense qu’il faut fermer une porte avant de pouvoir en ouvrir une autre”, conclut-il.

Traduit de l’anglais par Sophie Janinet