Warm Up : Ed Banger est heureux de vous présenter sa nouvelle recrue, 10LEC6

Warm Up : Ed Banger est heureux de vous présenter sa nouvelle recrue, 10LEC6

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© Camille Vivier

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Par Arthur Cios

Publié le

Dans Warm Up, on réalise un focus sur des artistes dont vous allez (sûrement) entendre parler dans les mois à venir. Aujourd’hui, la nouvelle recrue d’Ed Banger, 10LEC6, se présente.

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Quand l’écurie Ed Banger invite un musicien à rejoindre sa grande famille, l’attente est assez élevée. Le label géré par Busy P nous a pondu de sacré pépites, des mastodontes Justice, Breakbot, SebastiAn aux vétérans comme Mr. Oizo et Cassius en passant par les petits nouveaux, qui nous enchantent tout autant, tels Boston Bun ou Borussia.

Il est donc assez logique que l’arrivée d’une nouvelle recrue ait attisé notre curiosité. Loin des traditions edbangeriennes, le groupe 10LEC6 propose des sonorités afro-électroniques jusqu’ici inédites dans la maison. Quand on creuse un peu, on se rend compte que les personnes derrière ce projet sont loin d’en être à leur coup d’essai et ont pas mal de choses à proposer.

Alors, pour la sortie du premier clip de 10LEC6 en tant que membre du label Ed Banger, on a cherché à en savoir plus.

 Qui êtes-vous ?

Nous sommes Nicole (chant), Gaëlle (percussions), Erwan (percussions), Simon (basse) et Jess (batterie).

D’où venez-vous ?

Le groupe est né de la rencontre de Simon et Jess, qui se sont connus grâce à leur pote graffeur Skame, qui était aussi promoteur/DJ booker à ce moment-là ; Simon étant street artist et Jess DJ et producteur (Jess & Crabbe).

Après quelques repètes en studio, Simon a recruté Gaëlle, qui avait joué avec lui dix ans auparavant dans le groupe de punk/hardcore Harissa avec Mehdi Pinson (DVNO) et il a demandé à Loff et Emy, deux filles qui étaient aux beaux-arts avec lui de venir chanter sur nos morceaux. Une énergie brute s’est créée et ça a donné des morceaux très courts, uptempo et dansants. Seule Emy est restée, car Loff a dû repartir vivre en Espagne.

On a sorti notre premier maxi simultanément sur le label français Fiat Lux (qui sortait les maxis de Jess & Crabbe) et sur le label Troubleman Unlimited du New-Yorkais Mike Simonetti. Ce label était hyperactif et partait dans plein de directions qu’on aimait bien. Un de nos morceaux est sorti sur une compilation Rough Trade et il a ensuite été utilisé pour la BO de la série Skins.

Les membres de Gossip, qui écoutaient notre disque dans leur camion, nous ont alors embarqués sur leur tournée. L’ADN du groupe a ensuite changé, en fait Nicole est la troisième chanteuse de 10LEC6. Entre Emy et Nicole, nous avons enregistré et un peu tourné avec Lili, une ex-étudiante des beaux-arts, encore ! À cette époque, on enregistré un EP avec nos potes Julien Briffaz et Cosmo Vitelli.

On a rencontré Nicole grâce à une annonce qu’on a laissée dans un studio à Château-d’Eau, à Paris. On voulait du chant dans une autre langue. Nicole vient du Gospel mais elle peut rapper et crier. On aime bien le fait que ça rend notre musique encore plus inclassable. Le bulu est une langue bantoue parlée dans le Sud du Cameroun (Ebolowa et Sangmelima).

Quand avez-vous commencé la musique ? Avec quel instrument ?

On a tous un parcours très différent. Nicole a appris à chanter le gospel avec la chorale La Voix de l’esprit de Djongolo, à Yaoundé.

Est-ce que vous avez eu différents projets avant ?

Oui, et on en a encore aujourd’hui.

Comment avez-vous atterri chez Ed Banger ?

Pedro nous avait déjà dit qu’il aimait notre musique, mais ça s’est produit un peu par hasard. Jess et Crabbe ont rendu visite à Pedro et se sont retrouvés à faire écouter quelques tracks de l’album (Crabbe a mixé l’album avec notre pote Lionel Boutang). Il nous a fait une proposition immédiatement et on lui a dit OK vite fait, le timing était bon !

Quelles sont vos inspirations et influences musicales ?

Bad Brains, ESG, Liquid Liquid, Lightning Bolt, OOIOO, Melt-Banana, Arthur Russel, Beastie Boys, Gang of Four, un tas de productions de disco US, la House de Chicago, beaucoup de musiques africaines électroniques qui existent en ce moment, en particulier en Afrique australe. Jess dirige avec Crabbe le projet Bazzerk qui leur est dédié (Angola, Afrique du Sud, Ghana, Nigéria…).

Pour Erwan, ses influences de musiques tradi (d’Afrique, de Cuba, du Brésil), les groupes afro ou prod ont débouché sur des démarches hybrides mêlant les percussions au rock, au funk, au hip-hop, au jazz puis à l’électro (Youssou N’dour, Guelewar, Fela, Ofege, Francis Bebey, Les Têtes brulées du Cameroun). Il y a aussi Tim Maia, Naná Vasconcelos, Nação Zumbi pour le Brésil, Bill Laswell avec Imaginary Cuba, puis toute la zique afro-psyché américaine… Et puis, le bikutsi, une des musique tradi du Cameroun ; le bol, qui est un rythme typique de la région du Sud-Cameroun.

Comment composez-vous ? Décrivez-nous le processus.

Tout le monde apporte ses idées et il n’y a pas vraiment de règles de composition ni de hiérarchie, c’est assez free tout en cherchant toujours à produire quelque chose de frais. La composition se fait toujours en jam. C’est là que sortent les lignes de basse cheloues et terribles de Simon, Jess pose une rythmique hyper assise héritée de son expérience de DJ propice à ce que les percussions parlent vraiment et s’organisent en polyrythmie plus ou moins complexe. Gaëlle pose un tapis planant de congas et Erwan aime avoir le champ libre pour tester des instru’ hyper différents : cloches, timbales, alfaia, cuica, berimbau… Les grooves se mettent en place progressivement.

Depuis que Nicole est arrivée, sa façon de chanter en scandant des mots en bulu nous donne encore plus d’inspiration et nous oriente toujours plus vers un son afro-urbain… On essaye de tout enregistrer pour ne pas perdre les moments magiques où tout le monde ressent que l’on touche à quelque chose de bon. On garde ces gronderies dans un coin puis on passe à autre chose. Après, on fait du collage, comme depuis le début de 10LEC6, à notre manière. Simon est dyslexique et le côté parfois destructuré de nos morceaux, comme une sorte de cut-up, a donné son nom au groupe.

Si vous aviez un conseil à donner aux auditeurs pour écouter votre musique, quelles seraient les meilleures conditions ?

Peut-être en live, mais on pense que notre musique est aussi faite pour le club et la manière dont on produit nos disques va dans ce sens.

Comment définiriez-vous votre projet ?

On pourrait appeler ça du “bulupunk”.