Rencontre avec le fondateur du festival le plus paisible de l’été

Rencontre avec le fondateur du festival le plus paisible de l’été

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E. Thibaut

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Par Henri Margueritte

Publié le

Le Mas des Escaravatiers, c’est une villa posée sur une colline, une piscine, des concerts de qualité, et ça dure tout l’été.

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C’est une villa familiale devenue un véritable lieu de fête. Depuis 16 ans, à quelques kilomètres de Saint-Raphaël dans le Var, la villa juchée sur le Mas du domaine viticole des Escaravatiers accueille, le temps d’un été, le festival le plus cosy que l’on puisse imaginer.

Dans une ambiance qui contraste avec le brouhaha estival de la Côte d’Azur, le festival Mas des Escaravatiers est l’occasion idéale pour se déconnecter. L’occasion pour les artistes, comme pour le public, de profiter des choses simples que sont la bonne bouffe, du soleil, une piscine – autour de laquelle sont organisés des brunchs sonores – et des concerts de qualité.

Foulée par de nombreux grands artistes comme Jacques Higelin, le Wu Tang Clan, Youssoupha, Brigitte, Benjamin Biolay, Carl Craig, George Clinton ou encore Earth Wind and Fire, la scène du festival s’anime à peu près une à deux fois par semaine, et ce pendant les deux mois de l’été. Une scène qui, installée face à la villa, donne au festival cette âme si particulière, intimiste et familiale.

Fondé en 2003 par Sebastien Costamagna, le festival du Mas des Escaravatiers est aussi perçu comme une halte réparatrice par ces artistes qui passent leur été à enchaîner les concerts. Une halte durant laquelle ces derniers profitent notamment des repas concoctés par le chef cuistot de la villa, au point de demander – pour ceux qui ont un agenda moins chargé – à rester plusieurs jours sur place.

Le temps d’un week-end de juillet, je me suis rendu dans ce lieu si singulier. Après avoir passé un samedi soir bouche bée devant le concert acoustique de Selah Sue, j’ai pu m’entretenir avec Sebastien Costamagna, 38 ans. Un entretien avec celui qui est né dans cette villa, et qui, 16 ans plus tôt, a eu l’ambitieuse idée de donner une seconde vie à la grande maison familiale.

Konbini | Tu peux me raconter la genèse du festival du Mas ?

Sebastien Costamagna | Je me suis dit que ce serait bien d’ouvrir cette maison au public. J’ai alors décidé d’organiser une expo avec une amie, on avait réussi à faire venir 16 artistes de la région. 450 personnes avaient fait le déplacement à l’époque, c’était en 2003.

Puis, de fil en aiguille, on a fait notre premier concert avec Allain le Prest, un parolier peu reconnu pour son propre travail qui a écrit pour beaucoup de grands. Puis on a enchaîné avec un deuxième, un troisième concert, l’année suivante on en a fait 8.

En 2005 on s’est dit qu’il fallait passer à la vitesse supérieure. C’est Jacques Higelin qui a répondu présent en premier. Il est resté à peu près 3 heures sur scène je crois… Il avait même écrit une partie de son album Amor Doloroso au Mas. Ça nous a ouvert de nombreuses portes. C’était quelqu’un de très apprécié. En quittant le festival, il a dit cette phrase mythique qui résume très bien le concept du Mas : “Au Mas on reçoit le public comme des amis et les artistes comme la famille.”

Et depuis 5 ans maintenant on est le premier festival du département en musique actuelle.

Vous êtes un festival relativement petit, (1 200 personnes maximum), comment tu expliques le fait que vous arriviez à proposer un line-up de gros artistes chaque année ?

Quand tu as une tournée de 60-80 dates et que tu as l’occasion de prendre une pause au Mas des Escaravatiers, c’est toujours cool de venir. On est un festival qui s’étale sur les 2 mois de l’été donc ça nous permet de nous adapter plus facilement sur le planning des tourneurs, et donc de programmer de gros artistes.

Justement, pourquoi vous avez choisi d’étaler votre programmation sur tout l’été ?

On a gardé ce format parce qu’à la différence de beaucoup d’autres festivals, on est propriétaires du lieu, donc on gère de nombreuses choses. Au-delà d’un festival c’est un vrai lieu de vie.

En parallèle des concerts vous organisez aussi des brunchs le dimanche, le public des concerts est différent de celui des brunchs ?

C’est un public qui cherche à profiter d’un dimanche au bord de la piscine avec un brunch et un DJ qui met l’ambiance. La formule brunch est née en 2010 de notre volonté de se diversifier. C’était aussi dû à notre volonté de trouver des sources complémentaires de revenus.

Vous accordez aussi une grosse importance à l’écoresponsabilité ?

On a déjà les initiatives standards comme les éco-cup, les toilettes sèches… Il y a un potager qui fournit principalement le catering des artistes mais qui marche aussi pour les brunchs du dimanche. On a aussi une green team qui s’occupe de sensibiliser le public sur l’écoresponsabilité. Par exemple, ils ramassent tous les mégots à la fin des concerts pour les envoyer à une entreprise de recyclage spécialisée.

La villa fait partie du domaine viticole des Escaravatiers, tu peux m’expliquer le concept de la “cuvée festival” ?

Je me suis occupé des vignes de 2007 à 2012, et en 2008, j’ai voulu faire le lien entre notre vin et le festival. Donc maintenant, on demande à tous les artistes de signer sur une énorme feuille de papier Canson. Notre graphiste scanne ça, et en fait une étiquette que l’on colle sur toutes les bouteilles de cette cuvée festival.

Il y a ce côté familial que l’on ressent dans les coulisses du festival…

L’équipe n’a pas toujours été la même depuis 16 ans, mais les gens qui travaillent ici ont envie de faire ce métier. J’ai la chance d’avoir une équipe qui aime ce métier et qui est capable de se donner à 100 % pour répondre aux demandes des artistes. C’est comme quand tu reçois un pote à dîner et que tu sais qu’il ne mange pas de bœuf, tu t’adaptes, tout simplement.

Depuis plusieurs années les subventions de l’état baissent à l’encontre des festivals, ça a failli causer la disparition du festival du Mas, comment vous avez sorti la tête de l’eau ?

2014 a été une année très compliquée parce que 20 % des festivals en France ont littéralement été rayés de la carte. Une “cartocrise” avait été créée pour montrer l’envergure du phénomène. Pour s’en sortir, on a fait un crowdfunding grâce auquel on a récolté 30 000 euros. Les 595 prescripteurs ont tenu un rôle de relais pour continuer à faire vivre notre festival grâce au bouche-à-oreille.

Le Mas est une initiative privée qui se déroule dans un lieu privé, donc l’État nous subventionne à hauteur de 8 %. Si un jour, l’État nous dit stop aux subventions, on pourra trouver des solutions. 8 % d’un budget, c’est beaucoup, mais c’est rattrapable.

Pour conclure, c’est quoi ta définition du festival du Mas des Escaravatiers ?

On a changé, on a grossi, et on espère avoir gardé la simplicité et la fraîcheur du début.