Après s’être fait refouler à la frontière américaine, plusieurs groupes sont privés de SXSW Festival

Après s’être fait refouler à la frontière américaine, plusieurs groupes sont privés de SXSW Festival

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Par Chayma Mehenna

Publié le

Retour sur la controverse qui touche le célèbre festival de musique indépendante SXSW au sujet d’artistes refoulés à la frontière américaine, alors qu’ils étaient pourtant programmés. On clarifie les choses. 

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Le 9 mars, le groupe de post-punk Soviet Soviet s’est fait expulser du territoire américain. Arrivés la veille à Seattle, les musiciens italiens étaient censés se produire au South by Southwest Festival (SXSW), à Austin. Au programme, une occasion en or : celle de jouer dans l’un des festivals les plus importants du monde de la musique indépendante. Cet incident a rapidement créé une controverse. Depuis, la radio américaine NPR a pu discuter avec les autorités ainsi qu’avec les équipes du festival, afin d’y voir un peu plus clair dans cette affaire.

En effet, plusieurs autres musiciens et groupes ont subi le même sort que Soviet Soviet : les groupes Yussef Kamaal et United Vibrations, le producteur Eloq, ainsi que les membres de Massive Scar Era n’ont pas été autorisés à rester aux États-Unis, alors qu’ils étaient programmés au SXSW. Pourtant, cela fait plus de 30 ans que ce festival de musique, de cinéma et de technologie a lieu et autant de temps qu’il invite régulièrement des musiciens étrangers à jouer.

SXSW mentionne sur son site que l’entrée sur le territoire américain avec le visa B-1 (attribué aux touristes ou aux hommes d’affaires de passage) est habituellement acceptée. Si ce visa ne fonctionne pas comme un permis de travail, le South by Southwest est considéré comme un salon professionnel composé de conférences, tables rondes et concerts. Toutes les dépenses sont donc aux frais des artistes, qui ne sont pas rémunérés. Les musiciens y trouvent leur compte car leur simple présence à cet événement leur apporte une visibilité, de nombreux promoteurs et labels étant présents sur place.

À ce propos, Jonathan Ginsburg, expert en la matière, s’est exprimé au nom du festival auprès du magazine Pitchfork : “La loi américaine autorise les étrangers à entrer aux États-Unis avec un visa de type B ou l’ESTA pour faire des affaires, mais non pour travailler sous contrat. D’après cette règle, il a longtemps été autorisé aux groupes de présenter leur musique mais jamais de jouer sous contrat.” Pour les tournées, les groupes doivent donc se procurer un visa P-1 ou P-2, qui leur permet d’être rémunérés mais qui coûte bien plus cher.

Un durcissement des règles soudain et mystérieux

En ce qui concerne le groupe Soviet Soviet, on sait que son expulsion a été justifiée par son projet de jouer d’autres concerts à Los Angeles. En revanche, pour le cas de Massive Scar Era, il est difficile de comprendre ce qu’il s’est passé – surtout que cette formation n’en est pas à son premier concert au SXSW. Déjà présents aux éditions de 2013 et de 2015, les membres du groupe ont toujours procédé de la même façon, et ce sans aucun souci : ils se pointaient tout simplement à la frontière avec leur visa B-1 et une lettre du festival sous le coude.

Aujourd’hui, un renforcement du protocole paraît évident. Oui, les règles existaient déjà, oui, le festival n’a jamais garanti l’entrée sur le territoire avec le visa B-1, mais cette année les agents aux frontières ont durci leur politique. Selon la chanteuse et guitariste du groupe, Cherine Amr, recalée le 13 mars dernier, l’un des agents auxquels elle a été confrontée aurait évoqué un motif étonnant. “Il m’a dit que les gens utilisaient ce festival pour protester. Pourtant, je lui ai dit que nous n’en avions pas l’intention. Nous n’avions pas dans l’idée de faire quoique ce soit d’illégal ou de s’engager dans une activité politique. Nous voulions juste rencontrer des labels et des promoteurs, nous faire un réseau, nous faire connaître”, a-t-elle relaté au magazine Billboard. Il semblerait donc que la réputation du festival (prenant place dans l’un des bastions de la gauche américaine) ne soit pas très bonne au sein d’une administration Trump qui a décidé de resserrer drastiquement les contrôles aux frontières.

Ces groupes – autofinancés, indépendants et peu connus – comptaient beaucoup sur leur présence à ce festival, qui aurait pu leur servir de tremplin pour leur carrière. Leur renvoi leur a coûté cher, leur image a été entachée et, au-delà de la déception de ne pouvoir jouer, la manière dont ils ont été traités les a traumatisés.

La partie musicale du SXSW se tient actuellement à Austin, jusqu’au 19 mars.