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Ces 20 albums iconiques fêtent leurs 20 ans en 2021 (et on n’est pas près de les oublier)

Ces 20 albums iconiques fêtent leurs 20 ans en 2021 (et on n’est pas près de les oublier)

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Par Joséphine de Rubercy

Publié le

De beaux moments de nostalgie en perspective.

Ils n’ont pas pris une ride (ou peut-être juste quelques-unes). Sortis en l’an 2001, tous ces albums fêtent leurs 20 ans cette année. Ces disques ont accompagné la jeunesse de beaucoup d’entre nous (alors, un petit coup de vieux ?), et continuent parfois de résonner dans les oreilles des nouvelles générations.
Les Destiny’s Child, Oxmo Puccino, Gorillaz, Rohff, les Strokes… ils ont tous un anniversaire à fêter en 2021 : les 20 années d’un de leurs meilleurs projets. De quoi se replonger dans nos vieux souvenirs pour les uns, ou de découvrir de splendides classiques de la musique pour d’autres. En tout cas, cette liste nous rendra tous certainement très nostalgiques. Alors écoutez bien, voici 20 albums choisis qui fêtent leurs 20 ans en 2021.

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Rohff – La Vie avant la mort

Au début des années 2000, la Mafia K’1 Fry montre sa toute-puissance sur le rap français. Après le succès d’Ideal J puis du 113 à la fin des années 1990, 2001 est l’année de la renaissance de Kery James en solo, après une pause et une petite prise de distance avec le milieu du rap. Il revient très fort avec un album plus apaisé et pacifique. 2001 marque aussi le lancement d’un autre membre moins connu de la Mafia K’1 Fry, l’hybride Karlito. Avec l’excellent album Contenu sous pression, Karlito met en avant ses expérimentations conjointes avec DJ Mehdi, qui signe ici l’un de ses meilleures productions dans le rap.

Mais 2001 est surtout l’année de la consécration pour Rohff avec son classique La Vie après la mort. Signé chez Hostile, Rohff va vraiment devenir la superstar du rap français, avec des tubes comme “T.D.S.I.”, “Miroir miroir” ou bien sûr le sempiternel “Qui est l’exemple ?”. Ce deuxième album laisse surtout entrevoir cette rage inégalée du rappeur de Vitry pour asséner des couplets sans fin, presque sans respirer. 

Cette détermination hardcore laisse une trace indélébile dans des morceaux comme “Jeu 2 la mort”, “V”, “R.O.H.F.F.” mais surtout l’incroyable “Sensation brave”, produit par Tefa & Masta avec sa boucle au violon, et le final “Dawa”, produit par Pone de la FF. Très vite disque d’or avec 275 000 albums vendus, La Vie après la mort présente un Rohff intouchable, qui vient titiller Booba sur son trône de boss du rap hardcore avec le succès de Lunatic. Pour la petite histoire, Rohff avait d’ailleurs projeté un morceau sur cet album avec Booba et Rim’K nommé “Cru”. Suite à des différences entre labels, le morceau ne sortira jamais. Et sera le petit grain de sable qui créera, au fil des années, un des plus grands clashs de l’histoire du rap français, encore vivace vingt ans après.

En attendant, La Vie après la mort est un des albums les plus aboutis de Rohff, puissant et frontal, construit et sincère. Il annonce le début d’une période incroyable pour le rappeur de la Mafia K’1 Fry qui va flotter sur toutes les années 2000, influençant de nombreux rappeurs et laissant une marque folle chez les auditeurs fans de rap de l’époque.

Ludacris – Word of Mouf

En novembre 2001, Ludacris sort son deuxième album, Word of Mouf. Et le succès est rapidement au rendez-vous. Le projet fait ses débuts à la troisième place du top Billboard 200, se vendant à 281 000 exemplaires la première semaine. Les éloges lui valent notamment une nomination pour le Meilleur album de hip-hop aux Grammy Awards en 2002, mais la récompense lui échappe et revient à Eminem pour The Eminem Show.
Son premier album, Back for the First Time, qui avait culminé à la quatrième place du Billboard 200 a été une sorte de tremplin pour Word of Mouf, dont les sons apparaissent plus travaillés. Porté par des hits comme “Roll Out”, “Area Codes” et “Move B*tch”, le projet attire largement l’attention à l’époque. La production, aux mains de Swizz Beatz, Timbaland et Jazze Pha, a contribué à donner le ton de la musique rap du début des années 2000.
Avec un spectre de styles très différents, Word of Mouf a réussi à plaire à bon nombre d’auditeurs. Avec des titres introspectifs, calmes et riches en histoires, comme “Growing Pains” ; et d’autres sur lesquels on pouvait danser en boîte de nuit, comme “Move B*tch” (on continue à se trémousser dessus en soirée, on avoue). Aujourd’hui, l’album est toujours le plus vendu de Ludacris. Il est certifié triple disque de platine et s’est vendu à 3 674 000 d’exemplaires aux États-Unis.

Oxmo Puccino – L’amour est mort

En 2001, cela fait déjà trois ans que les fans de rap français attendent un successeur au classique Opéra Puccino, le premier album d’Oxmo Puccino, alors dernier représentant de l’époque dorée de la clique Time Bomb. L’attente a été longue et, à sa sortie, L’amour est mort divise les auditeurs de rap. Oxmo s’est fait connaître pour ses storytellings de mafiosi et autres gangsters, le public les réclame mais Oxmo les boude. Il a un autre projet pour cet album, une direction plus poétique et folle, plus universelle et aérienne.

Toujours produit par l’équipe de Time Bomb avec DJ Mars mais surtout Dj Sek, L’amour est mort est un album complexe, aux multiples facettes, difficile d’accès parfois mais sûrement le meilleur album d’Oxmo Puccino à ce jour. Il y a le cristallin “J’ai mal au mic”, avec sa caisse claire explosive et ses rimes riches labyrinthiques, mais aussi le fédérateur et intemporel “Ghettos du monde”. Il y a aussi la reprise de “Boule de neige”, un de ses inédits devenus mythiques, ou “Premier suicide”, un classique des mixtapes de l’époque avec le Célèbre Bauza, ainsi que des collaborations iconiques avec Dany Dan, KDD et Intouchable.

Mais il y a surtout des morceaux aux multiples chausse-trappes et double sens comme “Le Laid”, “Mines de cristal”, “Souvenirs” ou l’incroyable “L’amour est mort”. En effet, pour cet album, Oxmo dira ne plus écrire une ligne mais tout garder en tête, comme Notorious B.I.G. Son flow et son écriture en semblent à la fois plus épurés, plus sensibles mais aussi plus tarabiscotés.

Avec L’amour est mort, Oxmo Puccino se présente comme un artiste qui manie les mots avec maestria et s’éloigne petit à petit du rap pur pour en contourner les grossièretés et leur trouver un autre sens. Une œuvre charnière pour la carrière d’Oxmo, mais aussi pour le rap français dans son ensemble.

Muse – Origin of Symmetry

Vous vous souvenez de l’époque où Muse faisait de la bonne musique ? Et bien c’était il y a vingt ans. En 2001, les premières notes au piano de “New Born” ne donnaient aucune idée de la puissance rock que le groupe, mené par Matthew Bellamy, allait produire au début des années 2000, propulsant la basse outrageuse de Christopher Wolstenholme, invoquant des solos de guitare jouissifs, le tout dynamisé par un Dominic Howard qui tapait (encore) sur sa batterie comme un sourd.

Si on devait définir Origin of Symmetry, dans la lignée du génial Showbiz (1999), ce serait à travers ces notes de piano qui rebondissent sur le charley, de cette voix qui se prenait à l’opéra et de ces instruments soumis à la discorde de ses propriétaires, avec un enchaînement de tubes rock, de “Plug In Baby” à “Space Dementia” en passant par une reprise de Nina Simone, “Feeling Good”. Vingt ans après, que reste-t-il de cet album à la pochette désormais jaunie ? Une envie folle de faire du rock de stade propulsé par une énergie d’un groupe qui n’avait pas encore dix ans d’âge, seulement deux albums au compteur et pour seule et unique ambition de s’amuser.

System of a Down – Toxicity

Trois ans après un premier album éponyme, System of a Down sort Toxicity, dont le succès surpasse vite celui du précédent. Dès la première semaine qui suit sa sortie, le 4 septembre 2001, le projet s’écoule à 220 000 exemplaires. On ne peut pas passer à côté de “Chop Suey!”, le titre phare, qui permettra à Toxicity d’être propulsé au top des charts et vaudra au groupe sa première nomination aux Grammy Awards en 2002. D’ailleurs, il y a quelques mois, le clip de “Chop Suey!” dépassait le milliard de vues sur YouTube. Et cela en dit long sur le succès de ce projet, de loin le meilleur du groupe, même vingt ans après sa sortie.

Autres morceaux cultes de l’album : “Toxicity” et “Aerials”. Avec “Chop Suey!”, ils se classeront tous les trois dans Billboard Hot 100, faisant de Toxicity un numéro 1. Étant encore aujourd’hui le plus vendu de la formation, ce disque est très certainement la plus grosse réussite de System of a Down. D’objet culte de la jeunesse alternative de l’époque, celle qui ne rentre pas dans le moule, jusqu’à devenir un des classiques du rock des années 2000, Toxicity a largement participé à l’incroyable ascension du groupe de rock, l’érigeant comme l’un des plus puissants de cette décennie. C’est aussi un projet qui regorge de d’engagements et de prises de position, pour la reconnaissance du génocide arménien notamment, mais aussi pour la défense de la santé mentale.

Fonky Family – Art de rue

On avait déjà compris qu’on ne compterait pas sans eux dès 1998 avec leur sublime premier album Si Dieu veut…, mais c’est le mythique Art de rue qui, dès 2001, inscrit la FF au panthéon du rap français. Certifié disque d’or un mois après sa sortie, cet opus est devenu depuis un emblème des années 2000. Sur les instrus savamment concoctées par le beatmaker de génie Pone et son acolyte DJ Djel, samplant tout autant Kate Bush que Toto ou Michael Jackson, résonnent encore les lyrics sincères et visionnaires rappées par Sat, Le Rat Luciano, Menzo ou Don Choa.
De l’hymne survolté “Art de rue” à la révolte de “Mystère et Suspense”, en passant par la mélancolie du titre “Les miens m’ont dit”, ce quatuor de MC flanqué de ses deux DJ a su fédérer à Marseille une scène rap dont les héritiers sont encore nombreux aujourd’hui. Cette énergie contagieuse qui a marqué l’histoire du rap de la cité phocéenne, “c’est l’effet FF, des gars plus vrais qu’nature…” comme le dit le track “Mystère et Suspense”Et la musicalité des prods, entêtantes et nostalgiques, reste encore une inspiration pour de nombreux musiciens. Ce n’est sûrement pas un hasard si PNL a donné à son deuxième album studio le titre de l’une des chansons de cet album de la FF : Dans la légende. Alors vingt ans après, gloire à la rue !

Akhenaton – Sol Invictus

Après le sacre unanime de L’École du micro d’argent en 1997, le groupe marseillais IAM se laisse du temps à la fin des années 1990 pour élaborer une suite et surtout peaufiner des expériences solo. C’est le cas de Shurik’n en 1998 avec Où je vis, puis de Freeman avec L’Palais de justice en 1999, mais aussi des producteurs et DJ, Imhotep et Kheops avec respectivement Blue Print et Sad Hill en 1998 aussi.

Akhenaton de son côté va produire l’album de Passi Les Tentations, mais aussi la bande-son du film Taxi. En 2000, il va proposer le projet hybride Electro Cypher, hommage aux débuts du hip-hop, mais il va surtout travailler sur le film Comme un aimant, qu’il coréalise, ainsi que sur sa BO très ambitieuse entre rap et soul avec un morceau solo incroyable qui va annoncer la suite : “J’voulais dire”. Cette alternance aux multiples influences entre deux albums d’IAM va composer petit à petit le deuxième projet solo d’Akhenaton, Sol Invictus.

Encore personnelle, la musique d’AKH sur Sol Invictus atteint l’apogée du rap du Sud de la France. En effet, le rappeur marseillais s’entourent de nouvelles têtes très techniques à l’écriture acérée, l’école du 06, entre Nice et Cannes, avec Chiens de Paille, Coloquinte et Mic Forcing. Ces trois formations apportent une structure forte à AKH ainsi qu’une nouvelle vision, un peu à la manière de l’album The Dynasty de Jay-Z où il se confronte avec les nouvelles pousses de Philadelphie : Beanie Sigel, Freeway et State Property. Avec Veust Lyricist, le A ou Sako, Akhenaton trouve des nouvelles voix et des plumes qui lui ressemblent et le relancent, jusqu’à les signer sur son label La Cosca / 361 Records. L’année 2001 sera aussi d’ailleurs celle de la consécration des Chiens de Paille avec un album très consistant et unique, Mille et un fantômes.

Sur Sol Invictus, Akhenaton fait le bilan de ses années 1990 avec des histoires fortes et des rimes labyrinthiques. Il est alors sûrement le meilleur rappeur de France, complet, technique, sincère et profond, en parfaite cohésion avec ses productions de l’époque. Certains titres comme “Quand ça se disperse” ou “Mon texte, ce savon” vont devenir des classiques, poussant l’écriture et la composition à un niveau rarement atteint. Sol Invictus est le marqueur d’une nouvelle décennie qui fait d’Akhenaton en véritable légende du rap français.

Jay-Z – The Blueprint / Nas – Stillmatic

The Blueprint sort le 11 septembre 2001. Il marque la renaissance de Jay-Z, le jour où New York vit sa première mort. Après une suite incroyable de Reasonable Doubt et trois volumes d’In My Lifetime, le rappeur de Brooklyn offre une nouvelle vision de sa musique accompagnée des super producteurs Just Blaze, Bink et le jeune Kanye West.

Rempli de soul et de batteries explosives, The Blueprint offre des classiques immuables de Jay-Z, la plupart très introspectifs comme “Girls, girls, girls”, “Heart of the City”, “Blueprint (Momma Loves Me)”, “Never Change” et surtout “Song Cry”, une nouvelle marque de fabrique de Jay-Z, sa véritable empreinte.

L’album présente aussi d’énormes tubes en puissance comme “Izzo”, “U Don’t Know” et “Hola Hovito” ainsi que la confrontation unique des deux meilleurs rappeurs du moment sur le titre “Renegade” avec Eminem. The Blueprint est emblématique de l’époque sur de nombreux aspects et sa sortie en pleine tourmente pour le rap new-yorkais va encore lui ajouter une dimension supérieure. Un marqueur culturel qu’on ne peut dissocier de l’album Stillmatic de Nas, qui arrive quelques semaines plus tard.

En effet, 2001 est l’apogée de ce clash des titans avec les titres “The Takeover” et “Ether”, deux visions du rap s’opposent alors au top de leur forme. Jay-Z est sous le feu nourri de nombreux de ses pairs, de Jadakiss à Fat Joe en passant par Prodigy. Et le rappeur répond avec une force de frappe incroyable. Alors que tous ses détracteurs continuent dans le conflit les mois, voire les années suivantes, l’album de Jay-Z reste le plus consistant dans le temps. Il tient surtout la distance par sa structure extrêmement solide et ses morceaux charnières où Jay-Z livre des véritables leçons d’écriture et de storytelling alors qu’il vient d’entrer dans sa trentaine. Le rappeur est alors vraiment au top, dans une période quasiment intouchable, à quelques mois de sa première retraite.

The Strokes – Is This It

S’il n’y avait qu’un seul album à retenir des Strokes, ce serait celui-ci, même si Room on Fire n’est pas loin derrière. Sa couverture porno-chic et controversée, censurée aux États-Unis, reste l’une des incarnations du fameux slogan sex, drugs and rock’n’roll. Mais c’est surtout la découverte d’un nouveau groupe new-yorkais avec un son déjà caractéristique et une identité singulière dans la foisonnante scène rock de l’époque qui fait de cet album une pierre angulaire dans l’histoire du rock.

La puissance des solos de guitare couplée à la voix grésillante de leur charismatique chanteur assure aux Strokes un avenir radieux. Ils en vendront d’ailleurs 2 500 000 exemplaires, chiffe qui restera un record pour le groupe. À l’époque, NME, Time et Billboard l’avaient d’ailleurs sacré meilleur album de 2001 et la presse enthousiaste de déclarer que les cinq garçons dans le vent étaient “les sauveurs du rock”.

Si, 20 ans plus tard, force est de constater que le rock est un peu abîmé, rien n’empêche de se lover avec nostalgie dans l’écoute d’un album qui n’a pas vieilli, malgré l’hégémonie du rap aujourd’hui. Avec ses tubes “Is This It ?”, “Last Nite”, titre préféré de Julian Casablancas, ou “Someday”, les Strokes ont écrit leur histoire et l’avènement de l’âge moderne avec un garage rock emprunté aux 70’s, mais parfaitement taillé pour le commencement du XXIe siècle. Malgré un nouvel album, The New Abnormal, sorti en avril 2020, rien ne nous redonnera le goût du rock de ces années-là comme le cultissime Is This It.

Aphex Twin – Drukqs

Auréolé de deux gros succès (dont un certain “Windowlicker”) et presque dix ans après avoir sorti un disque considéré comme culte par le commun des mortels, ce drôle d’oiseau d’Aphex Twin a sorti Drukqs. Un album à part entière, quasiment détesté de toute la critique à l’époque, sorti peu après le 11 septembre 2001 dans la précipitation dans la peur d’un leak (l’artiste aurait oublié un lecteur mp3 comprenant un paquet de morceaux et a dû se dépêcher de sortir le projet), mais qui pourtant mérite que l’on s’arrête dessus.
Car comme à son habitude, Richard D. James semble avoir pondu quelque chose de difficile à cerner. Il semble aller dans des différentes directions, soit avec des morceaux aux batteries improbables breakées au possible, soit à la sauce acoustique. Deux angles qui définissent un disque constitué de morceaux conçus au fil de sa carrière – et non que pour le disque.
Certains morceaux peuvent paraître difficiles d’accès, mais c’est sans doute le but. Car rarement un artiste n’aura été aussi énigmatique et mystérieux que ce cher Aphex. Il ne parle pas, ne décrit jamais son œuvre, est l’un des artistes les plus prolifiques tout en ne sortant que très peu d’albums. Du coup, impossible de savoir ce qu’a voulu raconter l’Anglais dans ce disque fourre-tout, mi-divin mi-dérangeant.
Le fait est qu’il s’agit d’un gros morceau, trente titres, qui ont eu un certain impact dans l’industrie musicale. Déjà, sur sa carrière, qui a failli s’éteindre. Alors même que Kanye West l’a samplé sans lui demander, qu’un des titres (le plus écouté de toute la discographie de l’artiste sur Spotify, et de loin) s’est retrouvé dans la BO de Marie-Antoinette de Sofia Coppola, et que le Saturday Night Live fera de même. Tout sur un même morceau, peut-être, mais sans Drukqs, pas de “Avril 14 th”. Et surtout, les vrais savent que ce titre est loin d’être la seule pépite du disque – très loin.

Four Tet – Pause

Si on ne vous présente plus Four Tet, il faut se dire qu’en 2001, Kieran Hebden n’était pas le nom sur toutes les langues. Et ce malgré un premier disque prometteur, et un trio, Fridge, dont la presse musicale indé raffolait déjà à l’époque. Pause sera le disque qui marquera les esprits des plus mélomanes d’entre nous, indiquant que nous étions face à un génie en devenir – le terme est fort, et pourtant on ne peut plus juste.
Là où Dialogue, son premier album sorti en 1999, mélangeait avec brio jazz, rock et electronica, Pause va explorer ses terres plus éloignées, lorgnant tant du côté de l’ambient que de la folk et des beats breakés à la sauce Aphex Twin. Le tout avec une homogénéité assez impressionnante. Rien ne détonne, tout fait sens, tout se suit et raconte quelque chose.
Surtout, c’est là que la future recette Four Tet va réellement naître. Le son d’Hebden restera alors totalement imbibé de ce qu’il a pu faire sur ce disque. Les (très) nombreuses productions de l’artiste ces vingt dernières années gardent, et pour notre plus grand plaisir, un arrière-goût de Pause, qui explique l’importance du disque dans sa carrière, mais aussi pour le monde de la musique.

Car à une époque où l’on ne peut le comparer qu’à Boards of Canada, où les Jamie xx et Floating Points ne sont que des adolescents bientôt biberonnés à la musique d’Hebden, et où un Caribou n’a pas encore fait parler de lui, Four Tet est devenu une référence. Un statut qu’il a confirmé au fil de son incroyable carrière, mais qui a début avec ce disque indispensable.

Missy Elliott – Miss E… So Addictive

Avec sa couverture à l’esthétique futuriste (qui aujourd’hui fait étrangement penser à une bataille contre un virus extrêmement envahissant), Miss E… So Addictive est le troisième album studio de Missy “Misdemeanor” Elliott. Ici aussi, que des tubes. Entre “Get Ur Freak On”, “4 My People” et “One Minute Man”, on peut affirmer que Missy a envahi et enflammé les clubs de l’époque. Et dire que son single phare “Get Ur Freak On” a justement failli ne jamais figurer sur l’album… Il lui aura certainement apporté la certification de platine pour le disque.

Cet album couvre tous les spectres que la musique peut offrir : le rap évidemment, sans pour autant se priver de flirter avec la funk, le gospel et, dans un tout autre style, l’EDM, ou du moins ce qui s’en rapproche à l’époque. Si certaines chansons sont sirupeuses et anecdotiques, les beats de Timbaland en soutien des lyrics énervés de Missy offrent dans l’ensemble une musique jouissive et novatrice qui fait bouncer bien comme il faut. De quoi rendre accro, c’est certain.

Aaliyah – Aaliyah

L’une des toutes dernières traces que l’on a d’Aaliyah est le clip de “Rock the Beat”. Un clip ensoleillé tourné aux Bahamas en août 2001, alors que son troisième album, Aaliyah, encensé par la presse et les fans, cartonne plus que jamais. C’est dans le vol retour de ce tournage que la jeune artiste de 22 ans est décédée, dans un accident d’avion qui a choqué la planète entière. 

On pourrait se concentrer sur le côté héritage de ce dernier disque. On pourrait raconter en long, en large et en travers la rupture que cela représente par rapport à son premier disque produit par R. Kelly (alors qu’elle n’avait que 14 ans et bien avant que les accusations de violences sexuelles ne soient connues). On pourrait dire qu’il est le fruit d’un hiatus de 5 ans entre son précédent album et le nouveau, période où elle jouera dans des films (dont le deuxième Matrix), et essayera de se diversifier.
Mais si l’on se concentre que sur la musique, Aaliyah est de loin l’une des galettes les plus importantes de 2001. Rarement a-t-on vu quelqu’un lier R’n’B, hip-hop, soul, le tout en y ajoutant une pointe d’électro, de rock, de funk. En appelant les petits jeunes qu’elle a repérés pour son deuxième album et qui n’avait rien fait de conséquent avant, comme Timbaland ou Missy Elliott, Aaliyah se retrouve avec des productions pionnières, et décide d’aller plus loin dans l’expérimentation. Sans le savoir, et alors qu’elle n’a même pas 22 ans, elle va redéfinir un genre entier.
La preuve avec son absence des services de streaming. Pour d’obscures raisons de droits, les deux derniers disques d’Aaliyah sont indisponibles sur les plateformes. Chez n’importe quel autre artiste, cela pourrait signifier s’effacer dans les mémoires collectives, et devenir un vague souvenir. Mais ça n’a jamais été le cas d’Aaliyah, pourtant mise de côté par l’industrie. Son héritage demeure malgré les obstacles plus fort et vibrant que beaucoup d’autres.

Eve – Scorpion

Vingt ans avant que Cardi B et Megan Three Stallion ne deviennent des égéries du rap américain, indiquant qu’après tant de temps à écouter des hommes parler de sexe à leur manière, il était temps d’écouter ce que les femmes avaient à dire, d’autres artistes préparaient le terrain. Si l’on remonte plus tôt, on pourrait parler de Salt-N-Pepa et “Let’s Talk About Sex”. Mais l’un des tournants les plus importants de cette prise de parole nous vient d’Eve.
Il ne s’agit aucunement de réduire cette artiste américaine à ces textes où la sexualité est son arme principale. De la même manière qu’on ne peut réduire ce deuxième album, Scorpion, à son casting XXL, tant dans les featurings (Gwen Stefani, DMX, Damian Marley) que dans ses producteurs (Dr. Dre, Scott Storch, Swizz Beatz). Ou au fait qu’il a été en haut du Billboard pendant quelque temps. Voire même son Grammy Awards de la Meilleure collaboration sur le culte “Let Me Blow Ya Mind” avec Gwen Stefani et produit par Dre. Non.

Scorpion est un disque majeur qui va influencer tout un tas d’artistes, féminins et masculins, dans les années à venir. Surfant sur du rap imbibé de R’n’B et de reggae, Eve déverse ces textes avec un rythme, un flow, unique, qui reste en tête et vous suit pendant longtemps. C’est un disque à la force rare, où la rappeuse est déterminée dans son art plus que jamais.
David Browne, journaliste à Entertainment Weekly, un des quelques-uns à avoir saisi la puissance du disque, écrivait dans sa critique de l’époque : “Plus qu’une amélioration drastique comparée à son prédécesseur, Scorpion est le premier projet de hip-hop féminin à ne serai-ce que tenter de remplir le vide laissé par la sortie de The Miseducation of Lauryn Hill. On n’ira pas jusqu’à dire qu’il le réussit, mais on le pense assez fort.

Destiny’s Child – Survivor

D’emblée, l’album s’était sans mal hissé à la deuxième place du Hot Billboard 100. Pas besoin de revoir le clip du titre éponyme, puisqu’on s’en souvient par cœur : les hélicoptères, le Pacifique sud et un boot camp féministe où les Destiny’s Child enchaînent les chorégraphies guerrières. Survivor est l’un des albums qui a accompagné les ruptures amoureuses vécues par les trentenaires de 2021, alors adolescents. Pourtant, le single phare, écrit par Beyoncé elle-même, est en réalité une réponse aux critiques faites sur les tensions du groupe qui vient de se séparer de plusieurs de ses membres. Ironie du sort, c’est cette double lecture qui a fait son universalité et donc son tonitruant succès.

Mais l’album est plus profond qu’il n’y paraît. Musicalement déjà, puisqu’à bien y repenser, le trio iconique qui a fait de Beyoncé la queen qu’elle est aujourd’hui y livre des vibes dignes des plus grandes divas du R’n’B. Sur le fond aussi, car depuis la plage où elles rampent en tenue militaire, ambiance fin du monde avant l’heure, Kelly, Michelle et Bey avaient déjà compris que le féminisme serait un sujet déterminant du siècle à venir. “Survivor” donc, mais aussi “Bootylicious” et “Independant Women”, devenu la BO du film Charlie et ses drôles de dames, sonnent tous comme des prises de pouvoir par des femmes parfois blessées mais toujours puissantes.

Slipknot – Iowa

Quand vous commencez un album par une minute de distorsions et de cris, poursuivie par un deuxième morceau s’intitulant “People = Shit”, vous savez que vous n’êtes pas là pour vous faire des potes. En 2001, avant que Slipknot ne devienne un phénomène planétaire symbolisé par ses masques sortis d’un film de Tobe Hooper, la formation sortait un sacré morceau de metal, intitulé Iowa, au beau milieu du mouvement nu metal distingué par les solides Deftones, Korn et Linkin Park.

“My Plague”, “Left Behind”, “The Shape” : tout concordait à faire de Slipknot une formation dédiée aux festivals à même de produire des concerts puissants, dans la droite ligne des “Spit It Out”, “Wait & Bleed” et “(Sic)” de leur premier album. La recette ? Un groupe démesuré de neuf membres possédant une armée rythmique menée par un immense batteur, Joey Jordison, et la voix de Corey Taylor.

Daft Punk – Discovery

Pour les jeunes ayant grandi dans les années 2000, Discovery semble préexister à la musique elle-même. Le deuxième album des Daft Punk, c’est l’artisanat devenu blockbuster et le blockbuster érigé en chef-d’œuvre. Un projet qui a redéfini l’horizon d’attente des auditeurs du monde entier, en les faisant tomber amoureux de la house, le temps de 14 titres.

La house certes, mais le genre en lui-même importe peu, tant les Daft Punk s’amusent à distordre et déconstruire nos repères. Le meilleur de tous les univers est télescopé dans une véritable effervescence : le charme estival de la mélodie de “One More Time”, la simplicité addictive de l’ostinato vocal dans “Harder, Better, Faster, Stronger”, sans oublier le fameux solo de guitare de “Digital Love” qui électrise tout sur son passage. Peu de disques ont été aussi accessibles dans leur côté expérimental que Discovery, ce qui en fait un monument appréciable et apprécié par tous.

Gorillaz – Gorillaz

Gorillaz, c’est la preuve que la créativité peut s’exprimer à travers les concepts les plus singuliers. Avec son premier album éponyme, le groupe virtuel, créé par Damon Albarn, chanteur de Blur, et le dessinateur Jamie Hewlett, a signé une œuvre transversale, un projet que personne n’attendait mais qui est pourtant devenu une référence de la pop culture.

Gorillaz prône un rock alternatif accessible, une musique pop qui puise ses ressources aussi bien dans le rap que dans l’électro. Un album qui s’adresse à l’éternel adolescent qui sommeille en chacun, avec un groove retro qui donne à chaque morceau une aura intemporelle. Ce charme se ressent pleinement sur “Clint Eastwood”, le hit du projet, et à l’image de l’acteur dans ses films de western, la musique de Gorillaz dégage une classe irrésistible.

N.E.R.D – In Search Of… 

En 1998, Chad Hugo et Pharrell Williams des Neptunes s’allient avec le rappeur Shay Haley pour former le trio N.E.R.D (pour No One Ever Really Dies). In Search Of…, le premier album de la formation, paraît alors en 2001, avant d’être remplacé par une version réenregistrée, l’année suivante. Le titre du projet est une référence à une émission télévisée animée par Leonard Nimoy, acteur de Spock dans Star Trek.
En suivant la même direction créative qu’avec les Neptunes, Pharrell Williams et ses amis imposent une patte funk, qui s’inspire aussi bien du rock que du hip-hop. Un enregistrement instrumental au grain marqué, des riffs de guitare tantôt agressifs tantôt jazzy, ainsi que des mélodies mielleuses, In Search Of… rassemble le meilleur du début des années 2000. Une musicalité qui est notamment mise à l’honneur sur “Provider”, le succès groovy de l’album. 

N.E.R.D est plus confidentiel que The Neptunes, et In Search Of… n’a pas connu le meilleur accueil qui soit. Et pourtant, les références geek soulignent que Pharrell Williams, Chad Hugo et Shay Haley sont des amoureux de cette culture, et la musique du trio a a largement conquis un public de niche certes, mais d’autant plus passionné. 

Weezer – Weezer (Green Album) 

Après cinq ans sans sortir de projet, Weezer revient en mai 2001 avec un troisième album éponyme, Weezer (Green Album). Un retour fracassant alors que tout le monde croyait en la fin de la formation née au milieu des années 1990. Certains l’avaient même peut-être oubliée, le faible succès de leur dernier album Pinkerton paru en 1996 commençant à dater. Mais Weezer vient remettre tout le monde à sa place en ce début de millénaire.
Avec une identité volontairement fidèle à celle de ses débuts, piochant un peu dans chacun de ses précédents projets, ce Green Album amorce un retour aux sources inespéré. Le groupe offre au public ce qu’il attendait : une écoute légère et très mélodieuse, des guitares floues et surpuissantes à la fois, des voix parfaitement harmonisées, et aucun effet superflu à déplorer. De ses dix morceaux se dégage une harmonie fragile, tiraillée entre l’assurance de “Don’t Let Go” ou “Hash Pipe” et la tristesse, voire l’amertume, de “O Girlfriend”, “Crab” et “Glorious Days”. Le groupe réussit à faire de “Island In The Sun” un tube planétaire, dont l’écho résonne encore aujourd’hui dans les oreilles des jeunes et moins jeunes. 

Finalement, après avoir connu de gros succès avec “Buddy Holly” et “Say It Ain’t So” sur leur premier album de 1994, puis une baisse des ventes avec Pinkerton, Weezer revient marquer les esprits de cette nouvelle décennie. Avec ce Green Album, les Weezer retrouvent leur trône de rois du rock, qu’ils ne sont pas près de quitter, comme en témoigne leur carrière aujourd’hui. 

Article écrit en collaboration avec Arthur Cios, Aurélien Chapuis, Louis Lepron, Émilie Papatheodorou, Joséphine de Rubercy et Hong-Kyung Kang