Temalapaire, le compte Insta qui se moque des accros aux sneakers

Temalapaire, le compte Insta qui se moque des accros aux sneakers

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Par Pénélope Meyzenc

Publié le

Une industrie "qui se prend parfois un peu trop au sérieux".

Aujourd’hui, les sneakers sont devenues un incontournable de la mode, à tel point qu’elles ont inspiré un compte Instagram entier du nom de Temalapaire. Vous avez peut-être déjà vu passer ces mèmes caricaturaux spécialement créés autour des baskets et de la communauté des sneakers addicts.

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“Comme Zorro ou Batman”, le mystère autour de son créateur reste entier et le restera, mais nous avons tout de même décidé de discuter avec la personne qui se cache derrière ce compte aux quelque 21 400 abonnés.

Konbini | Comment tu décrirais le principe de ton compte Insta ?

Temalapaire | Temalapaire, c’est un compte satirique sur la sneaker et la street culture de manière générale. On est là pour tourner en dérision tous les clichés de cette industrie qui se prend un peu trop au sérieux parfois, on joue sur toutes ses dérives.

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à ton avis, y'a quoi dans la bouteille de Badoit ?

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Je mets juste en forme ce qui se passe dans nos têtes quand on voit une paire et j’y rajoute un peu de sauce piquante.

Comment t’est venue l’idée ?

Je ne suis pas du tout de ce milieu-là à la base, j’ai juste appris les codes de la street culture. Au début, c’était du simple “sneakers profiling”, donc je décrivais le profil de gens selon leurs paires, et puis c’est parti en couille.

Ce profiling-là me passionne, tu te rends compte qu’il y a une réelle empreinte sociologique des paires et que tu peux les associer à des profils de gens. Tu prends une Stan Smith par exemple, si je te dis “un mec d’école de commerce qui va prendre un apéro rosé sur un rooftop ou sur les quais”, tu vois directement de qui je parle, et tu l’associeras à quelqu’un de ton entourage.

Après, il y a des paires qui ont plusieurs profils. Si tu prends la TN, par exemple, tu l’as pour la caillera de Montfermeil qui bicrave, tout ça, et si je te parle de la petite femme du bendo de Paname qui met ses petites TN rose ou vert satin, elle existera aussi !

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*monte sur sa literie blanche avec sa paire*

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Tu veux rester anonyme, c’est bien ça ?  

Yes, je suis comme Batman et Zorro. Je peux déjà te dire que je ne suis pas un être non-binaire et que je ne porte pas de Veja. Mais bon, en tant que lanceur d’alerte de la hype, je préfère rester discret·ète.

T’es tout·e seul·e derrière ?

Au début, oui, mais maintenant, Temalapaire est un peu un incubateur de la street et il y a pas mal de proches qui se greffent au projet. Il y a aussi eu quelques collaborations avec des artistes assez chauds comme @esthekicks, Tristan Pradeau, @martzer_ ou @bobbydollaros.

Tes abonnés t’envoient aussi leurs créations ou tu inventes tout toi-même ?

Avant, je zonais sur les réseaux pour trouver des dingueries, mais là, je reçois tellement de photos tous les jours que j’ai même plus le temps. J’ai une armée de reporters sans frontières qui sourcent le contenu, et moi, j’ajoute les épices pour divertir les foules. D’ailleurs, gros big up à eux, vous êtes le sang.

Quelle est ta publication préférée et pourquoi ?

Tous les projets qu’on a imaginés en collab avec des artistes. Parce que faire des mèmes, c’est bien drôle, mais créer un concept de A à Z et le voir se matérialiser, c’est de la frappe. Et si on est des millions à faire des mèmes, la Asics Capri Sun, la Air Fournier ou la Ratormax, personne ne pourra nous les enlever [rires].

Et quelle est celle qui a le plus marché et pourquoi ?

Je regarde les stats, mais je t’avoue que je consomme mes posts comme les followers, au bout de quelques jours, je ne les regarde plus. Mais je pense que la vidéo “Off-White BB” avait pété le score. C’est devenu viral parce qu’on a juste dit tout haut ce que tout le monde pensait tout bas.

Tu t’attendais à un tel succès ?

Jamais. Je pensais lancer le compte et qu’on serait dix à follow avec ma vieille tante et mes potos, avant que je ne le laisse à l’abandon une semaine après. Tous ces gens aujourd’hui qui sont drogués des paires sont arrivés sur ce compte et c’est grâce à eux que j’ai continué.

J’ai vu qu’il y avait plein de gens dont il fallait se moquer et, au final, dont se moque ensemble, parce que ces personnes visées par ces caricatures, c’est aussi celles qui suivent Temalapaire. En fait, on est un peu tous ridicules parce qu’on nourrit cette culture. Mais cinq mois plus tard, on rigole quand même bien.

Tu comptes continuer pendant longtemps ?

Vu comment l’industrie est partie, on n’est pas près d’arrêter. Tant qu’il y aura des customs eclatax, des placements de produits Wish et des gens prêts à se trancher les veines pour leurs paires, il y aura toujours de la frappe à envoyer.

Selon toi, est-ce que ce détournement des sneakers est dans la continuité du détournement de la street culture ?

Complètement ! Pour moi, les sneakers, par exemple, c’est comme le rap. Aujourd’hui, ce n’est plus une musique underground, c’est écouté par tout le monde. Pour les paires, c’est pareil, c’est pour ça que je fais des parallèles avec des références musicales parce qu’aujourd’hui ceux qui kiffent la street culture écoutent majoritairement du rap. On peut par exemple citer le mec de Montreuil qui porte des Veja qui mange du quinoa à midi et qui écoute du Lomepal !

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achète Français et bio "car il peut se le permettre"

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Justement, quelle est ta vision de l’industrie des sneakers ?

Aujourd’hui, ce n’est plus du tout une industrie de niche réservée aux connaisseurs. C’est totalement mainstream. Tous les gens qui s’intéressent un minimum à la street culture connaissent les grosses paires, ce qu’elles coûtent et savent où les acheter. Du coup, il y a une demande qui dépasse tellement l’offre que c’est devenu totalement ridicule.

Il n’y a plus vraiment de notion de connaisseurs ou de sneakerheads (collectionneurs de sneakers) parce que tout le monde veut les mêmes. Virgil sort une paire avec Nike ? Tout le monde la veut, mais personne ne peut l’avoir. On ne s’intéresse même plus au design, aux matières ou à la construction des paires, on s’intéresse uniquement à leur valeur. Les gens veulent porter une paire parce qu’elle coûte cher, parce qu’elle a une hype ou parce qu’elle va se revendre.

Ce game est devenu tellement dérisoire qu’il t’empêche presque de porter tes paires. Imagine, personne ne portera par exemple une paire à 1 500 euros dans le métro, c’est un smic. Moi le premier, demain si je gagne n’importe quelles Off-White qui coûtent minimum 1 000 euros, même si j’ai envie de les mettre, je ne sais pas si je ne vais pas les vendre, parce que cet argent, aucun Français lambda ne peut cracher dessus, surtout par les temps qui courent.

Un mot pour conclure ?

Jeune lecteur, si toi aussi tu veux rire et arrêtez de mettre des paires flinguées, fais comme moi et follow Temalapaire, woulah, on répond aux DM, aux commentaires et on te reposte la famé tqt.

PS : Tié en mode Lacoste TN ou quoi le sang ?

Ben mwa wai. Et toi, t’en penses quoi de ces TN ?