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D’où le Perfecto tire-t-il son nom ?

D’où le Perfecto tire-t-il son nom ?

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Par El Padrino

Publié le

Dans Rétro shot, chaque mois, on vous propose un retour vers le meilleur du passé ! Un petit voyage dans le temps, à la recherche des tendances, des fringues, des affiches d’avant… Aujourd’hui, retour sur le plus controversé des blousons noirs.

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Depuis près d’un siècle, le Perfecto, incontournable blouson des rebelles, des loubards et des voyous n’a jamais quitté nos penderies. Né dans la rue et fait originellement en cuir de cheval, il trace son parcours jusque dans les rangs des défilés, écrivant son histoire sur papier glacé. Comment a-t-il traversé les décennies, les sous-cultures et les époques sans prendre une ride ?

Retour sur la success story d’une pièce phare indémodable qui a battit sa légende urbaine autour d’un mythe.

Une histoire qui débute bien avant que

Elle commence bien avant que :

  • Slash, le guitariste des Guns N’Roses, ne l’arbore pour le “Reunion Tour”.
  • Rihanna ne le porte à même la peau en couverture du Time Magazine.
  • Lady Gaga ne le customise lors du “Victoria Secret Show” au Grand Palais.

De l’imperméable au Perfecto

Les frères Irving et Jack Schott fondent la marque “Schott” en 1913 dans le Lower East Side, mythique quartier de New York. Ces descendants d’immigrants russes lancent alors leur activité dans la cave d’un immeuble en fabricant des imperméables et les commercialisent en faisant du porte à porte dans les quartiers de NYC.

En 1928, alors qu’ils sont spécialisés dans le vêtement de pluie, ils reçoivent une commande de “Beck Distributors”, un concessionnaire moto Harley-Davidson de Long Island. Celui-ci fait la demande de vestes fonctionnelles pour protéger les motards des intempéries.

Le nom choisi pour cette veste, qui à l’époque se vendait à 5,50 dollars la pièce, est un hommage aux cigares de contrebande cubains qu’Irving fumait lors de la négociation des coûts. Son nom, Perfecto, est alors un hommage aux cigares cubains.

La légende 

Le Perfecto passe inaperçu durant la seconde guerre mondiale, au profit du bomber, alors plus populaire. Mais c’est durant la période de l’après-guerre que celui-ci va devenir populaire.

Choqués par les atrocités de la guerre, les soldats de l’aviation et des équipages de chars se mirent à former des clubs de motards pour se défouler, comme une sorte d’exutoire. Parmi tous ces groupes, l’un d’eux sort alors du lot : les Boozefighters, des Californiens qui aiment se battre. L’une de leur bagarre termine d’ailleurs dans le magazine Life en photo. Ces faits inspirent The Wild One, avec Marlon Brando, film qui fit entrer le blouson dans le dress code de la jeunesse du pays. 

Le Perfecto fait son cinéma 

Après Marlon Brando, c’est James Dean qui perpétue la légende avec La Fureur de vivre. Elvis en était également adepte. Mais c’est Peter Fonda qui incarne le mieux ce lien entre moto, rock et cuir dans Easy Rider en 1969. En 1978, il est sur les épaules de John Travolta dans Grease. On le retrouve au cinéma dans les années 1980 sur Schwarzy en Terminator. En 1983, Mickey Rourke dans Rusty James l’endosse à son tour pour jouer les mauvais garçons. Seul Fonzy, dans la série Happy Days peut le porter en restant un biker cool.

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Sur le devant de la scène 

Dès les 60’s, il voit sa popularité décroître, remplacé par des blousons de course plus sages, incarnés par Steve McQueen. Il faudra attendre les 70’s, et leur période rebelle où les jeunes se retournent contre une société trop idéaliste. Le mouvement punk naît, et ses icônes contestataires ramènent le Perfecto customisé de badges et clous sur le devant de la scène. Aux États-Unis, les Ramones portent des Perfecto 613 One Star en famille, puis au Royaume-Uni, Sid Vicious, le chanteur des Sex Pistols, insulte la reine avec le Perfecto 118 sur son dos. Blondie, Robert Smith, Bruce Springsteen ou encore Mick Jagger ne s’en séparent plus.

En 1987 aux États-Unis, le roi de la pop Michael Jackson lui rend hommage et s’en inspire dans le clip du single de son album Bad. En France les “blousons noirs”, ces bandes de jeunes qui s’affrontent avec des chaînes de vélo et des poings américains, sur leur mobylette, relaient cette rébellion. C’est d’eux que naîtra le rock français, Johnny Hallyday, Eddy Mitchell, Dick Rivers… Plus tard, ce sera Renaud qui associera le côté loubard de la veste intemporelle à la révolte sociale.

Un carton en France

Dans les années 1950, les écoles américaines et anglaises l’interdisent et en font le symbole de la rébellion auprès des jeunes. Néanmoins, la veste reste rare en Europe. C’est ici qu’interviennent les deux frères d’origine ashkénaze Joseph et Maurice Jablonski, dont la société Groupe JaJ importait déjà le jeans en tant que distributeur exclusif de Levi Strauss sur le vieux continent des années 1950 aux années 1970. Les deux Parisiens flairent son potentiel dans une société post-Mai 68 et signent en 1972 le contrat d’exclusivité avec les frères Schott. Un nouvel élan qui le transforme en tenue de soirée. Entre 1985 et 1990, Schott vend plus de 30 000 Perfecto par an sur notre seul territoire.

La mode s’empare du blouson

Le Perfecto entre dans l’univers de la mode en 1991, quand le photographe Peter Lindbergh shoote pour Vogue les mannequins stars de l’époque (Cindy Crawford, Helena Christensen, Linda Evangelista, Claudia Schiffer et Naomi Campbell) le portant.

En 2005, le couple Pete Doherty et Kate Moss participe au regain de sa popularité, porté alors avec un T-shirt et un jean slim, amenant des marques comme Zadig & Voltaire, Eleven ou The Kooples à l’intégrer à leurs collections. Puis Kim Kardashian et Kayne West le propulsent à l’apanage de la branchitude.

En 2013, il intègre l’univers du luxe grâce au styliste Hedi Slimane pour Saint Laurent, l’apôtre incontesté du masculin-féminin, qui le fait défiler sur les podiums avec pour égérie Marilyn Manson.

Bien que son image trash ait eu tendance à s’adoucir dans les années 2000 devenant une pièce plus mode, nombreux créateurs ont détourné le Perfecto de son usage initial et de l’étiquette rebelle qu’on lui a toujours rattaché. Il reste néanmoins un signe de marginalité dont l’empreinte “bad boy” subsiste.

Même si ces dernières années, il a effectué une transition, en réussissant à se féminiser. Son prix a été multiplié par plus de 80 depuis sa création, toutes les marques de prêt-à-porter en proposent leur version cheap et les créateurs, Saint Laurent, Jean Paul Gaultier et Dior taillent cette diabolique icône dans les cuirs les plus précieux. Aujourd’hui débarrassé de ses connotations bagarreuses, il peut transcender les genres, les âges et les classes sociales.