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Cinéma, jeux vidéo, musique : quand la réalité rejoint la fiction

Cinéma, jeux vidéo, musique : quand la réalité rejoint la fiction

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Par Théo Chapuis

Publié le

Pour des esprits déséquilibrés, la distance entre fiction et réalité n’est pas évidente. Petit tour d’horizon ultra-sélectif de quelques oeuvres qui ont poussé des gens à aller trop loin. Beaucoup trop loin.

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Malgré toutes les précautions prises par notre société ultra-protectrice, certains d’entre nous ont du mal à établir une limite entre fiction et réalité. En témoigne ce tragique faits divers survenu aux États-Unis, sans doute à cause du film Into The Wild. Réalisé par Sean Penn et sorti en 2008, il adapte le livre de Jon Krakauer Voyage Au Bout De La Solitude.

Il raconte le mépris d’un jeune homme, Christopher McCandless, pour l’existence occidentale contemporaine. Du coup, il se tourne vers une quête du bonheur qui passe exclusivement par l’harmonie avec la nature. La fin est tragique.

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Into The Wild – bande-annonce

Jonathan Croom, 18 ans, est un jeune américain qui est un véritable fan du film. Son père, s’adressant à CNN, a ainsi affirmé : “Il regardait beaucoup le film et en parlait tout le temps”. Mais lorsque le jeune homme a décidé de marcher dans les traces de son héros solitaire, c’est la mort qu’il a rencontrée au bout du chemin.

Son corps a été retrouvé dans une forêt au sud de l’Oregon. Dans sa voiture, non loin de là, les autorités ont trouvé un guide de survie. Victime d’une déception amoureuse récente, la police n’exclut pas la thèse du suicide. Il ne serait cependant pas le seul à subir un destin tragique à la suite de son amour pour le film Into The Wild. Dustin Self, originaire de Peidmont (Oklahoma) et âgé de 19 ans, a lui aussi disparu depuis le mois d’avril 2013. Afin de poursuivre la même quête.

“Tu aimes les films d’horreur ?” ou l’exemple du cinéma

Ce genre de faits divers mortel découlant d’une oeuvre de fiction grand public n’est pas un cas isolé. En juin 2002, un lycéen nantais de 17 ans poignarde 17 fois sa camarade de 15 ans, s’inspirant du teen movie horrifique Scream de Wes Craven, sorti en 1997. Vêtu de gants noirs et du masque caractéristique de l’assassin du film, le jeune homme a cherché à reproduire le mode opératoire du personnage.

“J’avais l’obsession de vivre ce que vivaient les héros de Scream, j’avais envie de tuer comme eux”, déclare-t-il lors de sa garde à vue chez les gendarmes. Malgré les efforts des chirurgiens, la jeune fille est décédée de ses blessures quelques heures plus tard.

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Scream – bande-annonce

GTA au pilori en Thaïlande

Le cinéma n’est pas le seul sur l’autel des obsessions. En Thaïlande, c’est d’après le célèbre jeu vidéo GTA qu’un jeune de 18 ans se serait inspiré avant de dévaliser et poignarder un chauffeur de taxi de 50 ans. Un peu plus tard, lui aussi succombera à ses blessures. L’affaire s’est produite en 2008, soit juste avant la sortie de GTA 4. Bangkok avait alors aussitôt annoncé l’interdiction à la vente de tout jeu issu de la fameuse licence Rockstar Games.

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GTA 5 – Bande-annonce Gameplay

Le jeu vidéo a souvent été la cible de critiques fustigeant sa violence. En France, lors de la sortie de GTA 4, l’association Familles de France a violemment accusé le jeu dans un communiqué : “Comment mettre en valeur un jeu dont le principe de réussite pour le joueur est de voler, tuer, trafiquer, c’est-à-dire commettre (…) le maximum de crimes”. Cette même association a établi dans un rapport pour l’Assemblée une correlation directe entre drogues et jeux vidéo.

Stephen King a la rage

Aux États-Unis, c’est le roman de Stephen King intitulé Rage (écrit sous son pseudonyme Richard Bachman) qui a souffert d’une aussi cruelle controverse, bien malgré lui. Ce livre paru en 1977 raconte l’histoire  de Charlie Decker, un lycéen, qui tue sa professeur de mathématiques sans prévenir, avant de prendre sa classe en otage. Il entame alors une perverse psychothérapie de groupe avec ses camarades séquestrés qui glissent lentement dans le petit jeu de Decker et présentent le syndrome de Stockholm.

Le 26 avril 1988, Jeffrey Lyne Cox, un lycéen de San Gabriel, prend une classe en otage sous la menace d’un fusil. Plus de peur que de mal : il est maîtrisé par des élèves avant d’avoir pu assassiner quiconque. Reste que Cox avait lu Rage à de nombreuses reprises, au point de s’identifier au personnage principal. Le 18 septembre 1989, c’est Dustin L. Pierce, lycéen de McKee, dans le Kentucky, qui prend une classe en otage armé d’un fusil de chasse et de deux pistolets. Neuf heures plus tard, il se rend aux autorités sans qu’il n’y ait eu de blessés. La police retrouve malgré tout un exemplaire de Rage dans sa chambre.

Mais des conséquences plus tragiques ont éclaboussé le roman a posteriori. Le 2 février 1996, à Moses Lake, dans l’État de Washington, Barry Loukaitis, 14 ans, abat un professeur de mathématiques (la même matière que le professeur abattu dans Rage…) et deux élèves. Dépressif, souffre-douleur de certains de ses camarades et atteint d’importants problèmes familiaux, Loukaitis déclare lors de son procès que l’influence de certaines oeuvres de fiction, dont Rage, ont été prépondérantes lors son passage à l’acte.

L’année suivante, une autre tuerie finit de souligner la réputation sulfureuse du livre. Le 1er décembre 1997, Michael Carneal, 14 ans lui aussi, tue trois jeunes filles d’un groupe de prière et en blesse cinq autres. On lui diagnostique une schizophrénie après son arrestation. Reste qu’un exemplaire de l’oeuvre maudite est retrouvé dans son casier.

Le nombre de tragédies liées d’une manière ou d’une autre à son oeuvre – et la boucherie de Columbine étant passée par là, Stephen King finit par céder. Il demande à son éditeur d’arrêter la publication de Rage, désormais plus publié depuis 1999. Il déclare lors d’une conférence de presse reconnaître que son propos puisse être un facteur potentialisant pour des adolescents mentalement instables. Il en profite cependant pour égratigner le système américain et fustiger la facilité à se procurer des armes à feu au pays de l’Oncle Sam.

The Beatles made me do it

Le fan le plus fascinant des Beatles n’est peut-être pas celui qui a abattu John Lennon le 8 décembre 1980. Il s’agirait plutôt du criminel Charles Manson, déséquilibré et vivant dans un délire mêlant christianisme, white supremacy et… musique des Beatles.

Alors qu’il a 32 ans, il fonde une communauté hippie nommée La Famille. Charles Manson se présente à ses 30 à 50 dévots comme une réincarnation du Christ et associe pour son culte la Bible à des textes de l’album blanc des Beatles. En 1969, il persuade plusieurs membres de sa communauté de commettre des meurtres dans les beaux quartiers de Los Angeles afin d’en faire accuser les Noirs.

La chanson “Helter Skelter” désigne une attraction de fête foraine. Sauf que Charles Manson l’a interprétée tout à fait différemment. Selon le gourou, elle désigne cette guerre apocalyptique entre les Noirs et les Blancs qui doit commencer en 1969. Manson prédit à sa communauté qu’après la victoire des Noirs, ceux-ci, désordonnés et confus, se tourneront vers lui afin qu’il les dirige.

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Helter Skelter – The Beatles

Il se base aussi sur la chanson “Piggies”, écrite par George Harrison, une violente critique contre l’establishment. “Vous pouvez les voir sortir dîner, avec leurs femmes cochon, attrapant fourchettes et couteaux, pour manger leur bacon”. Hasard ou coïncidence ? Le fait est que l’une des victimes de La Famille, Leno LaBianca, est retrouvé un couteau planté dans la gorge, une fourchette enfoncée dans l’abdomen.

Bien qu’il n’ait jamais assassiné quiconque lui-même, La Famille de Charles Manson a commis au moins huit meurtres, dont celui de Sharon Tate, la femme de Roman Polanski, enceinte de huit mois. Ils ont agi sur l’impulsion de leur gourou, parfait déséquilibré qui voyait dans l’influence des Beatles des messages prétendument cachés.

Désormais, vous êtes prévenus. Ne minimisez jamais le pouvoir d’une oeuvre artistique.

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