Un autodafé de livres dans une école crée la polémique au Canada

Un autodafé de livres dans une école crée la polémique au Canada

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Par Louis Lepron

Publié le

Parmi ces livres, on retrouvait "Tintin en Amérique" et trois albums de Lucky Luke.

Faut-il brûler Tintin, car jugé offensant pour les Amérindiens ? La révélation d’un autodafé de livres pratiqué dans une école canadienne en 2019, lors d’une cérémonie censée présenter des excuses aux peuples autochtones, a créé la polémique dans le pays.

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Une fédération d’écoles canadiennes francophones avait choisi de faire un tri dans les rayons de ses bibliothèques et donc de supprimer 5 000 livres jeunesse – des bandes dessinées, des romans et des encyclopédies – estimant qu’ils véhiculaient des préjugés sur les peuples autochtones.

Parmi ces ouvrages : Tintin en Amérique, Astérix et les Indiens, trois albums de Lucky Luke mais aussi des romans, des encyclopédies… Et, lors d’une cérémonie, certains livres (une trentaine) ont été brûlés dans l’une des écoles pour œuvrer à la “réconciliation”, a révélé Radio Canada. Un autodafé dénoncé par tous les partis politiques, aussitôt révélé.

Une vidéo destinée aux élèves expliquait la démarche qui visait à “enterrer les cendres” du “racisme, de la discrimination et les stéréotypes dans l’espoir que nous grandirons dans un pays inclusif où tous pourront vivre en prospérité et en sécurité”. D’autres cérémonies initialement prévues n’ont pas pu avoir lieu en raison de la pandémie de Covid-19.

“Il s’agit d’un geste de réconciliation avec les premières nations et d’un geste d’ouverture envers les autres communautés présentes dans l’école et notre société”, avait justifié, auprès de la radio nationale, Lyne Cossette, porte-parole du conseil scolaire de cette fédération, évoquant des ouvrages au “contenu désuet et inapproprié”.

Devant la polémique, le groupe d’écoles a annoncé mercredi suspendre les destructions. Près de 200 autres livres étaient en cours d’évaluation, a précisé le conseil. Au moment où le pays est secoué par la mise en lumière d’un sombre pan de son histoire et de la politique d’assimilation forcée des premières nations, cette révélation a fait réagir les chefs de file des principaux partis en campagne actuellement pour les élections législatives du 20 septembre.

“Je ne suis jamais d’accord pour que l’on brûle les livres”, a déclaré le Premier ministre Justin Trudeau qui a toutefois insisté sur l’importance de la réconciliation avec les Premières nations. Erin O’Toole a promis qu’un gouvernement conservateur s’engagerait en faveur de “la réconciliation”. “Mais le chemin de la réconciliation n’implique pas de démolir le Canada. Je condamne fermement le brûlage de livres”, a-t-il écrit sur Twitter.

Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD, gauche) Jagmeet Singh estime de son côté que “l’approche dans l’enseignement” aux enfants “doit être changée”. Le pays est encore sous le choc de la découverte de centaines de tombes d’enfants autochtones près de pensionnats catholiques.

Des dizaines de milliers d’enfants des Premières nations, inuits, et métis, ont été enrôlés de force dans ces institutions de la fin du XIXe siècle aux années 1990, écartés de leurs familles et de leur culture. Des milliers n’en sont jamais revenus.

Konbini avec AFP