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Shaft : le film emblématique de la blaxploitation revient avec une troisième génération

Shaft : le film emblématique de la blaxploitation revient avec une troisième génération

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Par Aurélien Chapuis

Publié le

Après Richard Roundtree et Samuel L. Jackson, voici maintenant Jessie T. Usher Jr., le petit-fils du plus “Bad Motherf*cker” des détectives afro-américains.

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Shaft est une institution aux États-Unis. Sorti en 1971, le premier film de la série, sobrement intitulé Les Nuits Rouges de Harlem en français, est devenu un grand classique de la blaxploitation. Née dans les années 1970, cette appellation regroupe toutes les productions qui visaient le public afro-américain de l’époque. En effet, le cinéma était alors très unicolore, les seuls personnages représentant la diversité étant souvent les premiers à mourir. La blaxploitation a fourni à la communauté noire des personnages mémorables comme Shaft donc mais aussi Superfly, Coffy, Black Caesar, Dolemite ou encore Foxy Brown. Ces héros et héroïnes ont permis au public noir de s’identifier avec, le plus souvent, un casting entièrement afro-américain et des histoires plus proches de leur quotidien et de leur vécu.

Shaft est devenu l’emblème de cet univers surtout pour trois aspects principaux : d’abord, le personnage de John Shaft, campé par Richard Roundtree, est d’un charisme imparable entre Dirty Harry et James Bond. Ensuite la réalisation, signée par le photographe de mode Gordon Parks, est très soignée – ce qui n’est pas toujours le cas dans ce type de productions. Enfin, la musique signée Isaac Hayes deviendra iconique jusqu’à dépasser l’impact du film et propulser le chanteur-compositeur en quasi-messie. De nombreuses suites verront alors le jour, fort du succès de cette formule unique.

Rien de plus étonnant de voir donc un reboot pointer son nez à la fin des années 1990. Samuel L. Jackson y joue le neveu du Shaft originel avec un discours remis au goût du jour mais toujours brutal et sans concession. Le mouvement blaxploitation connaît alors un renouveau via la relecture du rap de l’époque, très inspiré des héros noirs des seventies et amateurs de samples poussiéreux. D’ailleurs, cette renaissance se fait surtout par la redécouverte des bandes-son de ses films, composées alors par Curtis Mayfield, Marvin Gaye ou James Brown qui feront le régal des producteurs de l’époque avec leurs premiers échantillonneurs. Ce renouveau sera aussi appuyé par Quentin Tarantino, grand mixeur de références, qui a extrait la quintessence du genre avec Jackie Brown en 1997.

Le film Shaft sorti en 2000, est exactement la somme de toutes ses données : un hommage virulent et une remise à niveau d’un super-héros noir immuable. Réalisé par John Singleton, déjà derrière Boyz N The Hood et Poetic Justice avec 2Pac et Janet Jackson, Shaft 2000 est une œuvre à part qui sera la base d’une série comme Luke Cage. Le quartier d’Harlem y est un véritable personnage vivant et chaque scène oscille entre le fulgurant et le grotesque, le tout parfaitement orchestré par un Samuel L. Jackson, nouvelle star du Hollywood noir.

En 2019, la suite se dessine avec un premier trailer, 20 ans après le dernier film de la franchise et presque 50 ans après le premier. On y découvre le fils du héros de Shaft 2000, interprété cette fois-ci par Jessie T. Usher Jr., rôle principal de la sitcom à succès sur le basket-ball, Survivor’s Remorse, produite par Lebron James. Le but avoué est clairement de créer une version modernisée du célèbre héros afro-américain agrémentée d’une touche d’humour presque parodique.

C’est le moment de célébrer, de passer le témoin avec des images fortes portant les trois générations : Richard Roundtree, le grand-oncle, Samuel L. Jackson, le père et Jessie T. Usher Jr., le fils. Mais étrangement, le rôle principal reste celui de Samuel L. Jackson, preuve de son impact incroyable encore aujourd’hui. Le passage de relais avec la nouvelle génération n’a pas encore tout à fait eu lieu, comme on a pu le voir avec Michael B. Jordan sur Creed. Dans quelques années peut-être ?

© Warner Bros

Avec le succès de Black Panther et ses multiples nominations aux Oscars, le retour en grâce d’un cinéma de genre orienté pour les minorités remet en avant la blaxploitation d’antan. C’est donc finalement via Stan Lee et ses productions Marvel comme Black Panther mais aussi Luke Cage que le grand public accepte un discours déjà présent dans l’industrie du divertissement depuis 50 ans.

Autre héros de la blaxploitation avec un côté plus subversif et antisocial, Superfly est aussi revenu il y a quelques mois pour un film réalisé par Director X, une star des clips vidéo de rap actuel, de Drake à Rihanna. Dans cette lignée, 2019 est clairement le meilleur moment pour le retour de Shaft.