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Michaël R. Roskam, un cinéaste belge à Hollywood

Michaël R. Roskam, un cinéaste belge à Hollywood

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Par Constance Bloch

Publié le

Faire un film à Hollywood

Si pour Bullhead, le réalisateur belge avait signé seul le scénario, on doit la plume et surtout l’histoire du deuxième projet à Dennis Lehane, maître du polar dont Hollywood adore adapter les romans : de Mystic River (Clint Eastwood) à Shutter Island (Martin Scorsese) en passant par Gone Baby Gone et bientôt Live by Night de Ben Affleck.

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Quand ce nouveau projet est arrivé, j’étais content d’avoir l’opportunité de collaborer avec un auteur, avec un écrivain qui a créé l’histoire. Ça partage un peu la responsabilité (rires). Mais assez vite, il faut posséder l’histoire comme si tu l’avais écrite toi-même.

Même si ce n’est bien évidemment pas la première fois qu’un réalisateur français est invité à tourner aux Etats-Unis, être confronté à la machine hollywoodienne a quelque chose d’aussi stressant qu’excitant. “C’est sûr qu’il y a de l’angoisse“, confie le cinéaste, “mais il y a le désir de faire le film, de faire du cinéma et de faire toujours plus grand. Même si c’est juste ‘un petit peu’“.

Et le cinéaste Belge n’a pas peur de voir grand, c’est d’ailleurs ce qui l’a attiré dans les studios outre-Atlantique, malgré des règles de production qui s’écartent de celles qu’il a pu connaitre jusqu’alors : aux Etats-Unis, il n’est pas rare que la production veuille constamment avoir la mainmise sur le réalisateur pendant le tournage.

Michael R. Roskam raconte :

Cette réputation qu’ont les producteurs, c’est parce qu’ils le font vraiment. Ça fait partie de la culture américaine, c’est leur façon de faire du cinéma. C’est une collaboration entre le réalisateur et le producteur. Alors soit il souhaite tout contrôler, soit il te laisse faire, et là j’ai eu beaucoup de liberté.
Alors oui, on doit souvent expliquer ce que l’on fait. C’est pas “on te donne 12 millions d’euros et tu reviens quand t’as fini le film.” Ils veulent savoir et on doit expliquer. C’est très important la communication. C’est un peu comme moi qui ai étudié les arts, et notamment l’art contemporain, pour lequel tu dois souvent définir ton concept. Là c’était très important pour arriver à nouer une relation avec des producteurs […]. Ils sont plus interactifs avec le projet qu’en Europe.

L’amour de l’image

Tout est visuel. Mes études comme peintre sont reflétées dans mes films car j’adore créer des tableaux, des plans très esthétiques, tout en gardant le côté fonctionnel, ça doit faire partie de l’univers logique de l’histoire. C’est un choix, c’est construit. Je ne peux pas m’imaginer mettre en scène une image moche pour obtenir un effet. Le fait d’être peintre et mes études m’ont permis de comprendre et de juger si quelque chose est beau ou pas.
Et ça aide aussi pour représenter la performance des comédiens. Ça permet de recréer trois dimensions sur deux. Quand tu diriges un comédien, il y a beaucoup de facteurs qui influencent sa performance. Non seulement  la gestion du réalisateur sur le plateau, comment tu parles, comment tu le places sous les caméras… Mais c’est aussi comme Cézanne, qui parfois laissait un petit bout de tableau sans peinture car il n’avait pas décidé quelle couleur il voulait mettre. Et puis il y a le mouvement, j’adore les caméras qui bougent.

“James Gandolfini, j’étais très excité la première fois que je l’attendais”

Chaque comédien a une personnalité différente qui demande une approche spécifique. Avec certains, tu deviens tout de suite ami, avec d’autres tu développes juste une relation professionnelle, et sur ce tournage, ils sont tous devenus des amis. On était vraiment très à l’aise. Alors au début il faut se chercher un peu sur le plateau, oui, il sont célèbres mais ça ne me fait rien.

À une exception près tout de même :

James Gandolfini, j’étais très excité la première fois que je l’attendais, j’y étais une demie-heure trop tôt, car j’allais le voir en vrai.

Propos recueillis par Geoffroy Villeneuve.