Du sang, des loups-garous et des insectes : voilà les meilleurs films de Gérardmer 2021

Du sang, des loups-garous et des insectes : voilà les meilleurs films de Gérardmer 2021

photo de profil

Par Arthur Cios

Publié le

Horreur is coming.

Dans un contexte de crise sanitaire qui sévit depuis un an et avec un monde de la culture mis sur pause, le cinéma morfle. Avec les salles fermées, la situation est de plus en plus compliquée pour les cinéphiles mais surtout pour les acteurs du milieu : exploitants, distributeurs, producteurs…
À l’heure des festivals annulés ou repoussés, certains décident de passer en version 100 % numérique. Comprendre que l’on achète son pass pour accéder à une plateforme permettant de regarder les films sélectionnés. Le célèbre festival Sundance s’y est mis, tout comme le festival international du film fantastique de Gérardmer, qui s’est tenu la semaine dernière.
Et il faut avouer que ce dernier avait une programmation alléchante cette année. Outre les classiques disponibles (Le Loup-Garou de Londres, Chromosome 3 de David Cronenberg en version remastérisée), était également disponible une trentaine de titres, dont une grosse exclu avec le nouveau Ghibli, Aya et la sorcière.

À voir aussi sur Konbini

À lire également -> De Possessor à Teddy : le palmarès (horrifique) de Gérardmer est tombé

Si certains films nous ont ennuyés, des pépites ont émergé. Retenez ces noms : dans les prochains mois, si vous les voyez passer dans une salle de cinéma fraîchement ouverte, vous saurez qu’il faudra vous ruer dessus.

Anything for Jackson

Le postulat de base a suffi à nous réjouir avant même de lancer le film. Après tout, suivre un couple de grands-parents satanistes est une promesse assez rare dans le cinéma pour nous enchanter. Avec ce prisme, on aurait pu s’attendre à une comédie horrifique ou un nanar. Anything for Jackson aborde ça au premier degré, et c’est tant mieux.

Le couple en question s’est mis au satanisme après un accident de voiture qui a provoqué la mort de leur petit-fils, Jackson. Ils sont prêts à tout pour le retrouver, même à kidnapper une femme enceinte et à effectuer un rite satanique pour que le bambin à venir soit… Jackson. Évidemment, rien ne se passe comme prévu, et il en résulte un film d’horreur efficace, dont certaines images risquent de marquer vos rétines au fer rouge.

Come True

Ce qui se présente au départ comme un drame (une adolescente est virée de chez elle et n’a nulle part où dormir) va peu à peu se transformer en une angoisse, pas effrayante, mais prenante. En recherche d’un endroit où se reposer, l’adolescente va accepter une expérience sur le sommeil. C’est ainsi que le cauchemar rejoindra la réalité. 

Visuellement, le film d’Anthony Burn Scott est une réussite totale. Sorte de savant mélange entre un film à l’ambiance Sofia Coppola et à la palette graphique maussade, avec en arrière-pensée Drive et Le Cauchemar de Freddy, Come True imprime bien.
Pour ce qui est du fond, l’installation de l’intrigue et tout ce qui s’ensuit, que ce soit sur les visions des monstres bluffantes et l’évolution du récit, ils sont d’une finesse folle. La fin sera peut-être décevante avec une romance manquant de subtilité, mais il n’en demeure pas moins que Come True est l’une des claques de ce cru 2021.

Host

Les films tournés pendant le confinement, ou qui parlent de la pandémie de Covid-19, commencent à sortir. Host fait partie de cette gamme de films, nous plongeant à l’heure des apéros Zoom.

Sorte de Projet Blair Witch sur écrans interposés, on y suit cinq amies qui décident de faire une séance de spiritisme pendant une visioconférence. Court, mais d’une efficacité implacable et avec un sens du réalisme dans le jeu des actrices et les dialogues, Host vous prend par les tripes, vous embarque, et est sans doute l’expérience la plus flippante de tout Gérardmer, imprimant une marque horrifique à travers un échange numérique profondément ordinaire pour toute personne ayant traversé 2020.

Impetigore

On ne connaît pas assez le cinéma indonésien. Un nom sort néanmoins du lot. Depuis plus de dix ans, Joko Anwar s’est fait un nom sur la scène internationale pour ses films d’horreur (The Forbidden Door, Satan’s Slave) ou sa plus récente tentative de film de super-héros loin des carcans hollywoodiens (Gundala). Son nouveau long était une grosse attente de l’auteur de ces mots. Il n’a pas été déçu.
Impetigore raconte l’histoire de Maya, une employée de péage qui, après une agression, cherche à retrouver le village où elle a grandi avant que ses parents ne l’abandonnent. Le bourg, reculé, abrite la maison de sa famille, qui serait à l’origine d’une malédiction et qui va retourner les habitants contre elle. En mêlant horreur, enquête et angoisse sans plonger dans les jump scares à tout-va, et avec un récit fort, puisant à la fois dans le folklore local et les histoires de fantômes universelles, Anwar réussit son pari haut la main.

Malheureusement, ce n’est sans doute pas le long-métrage qui fera de lui un réalisateur de renom sur la scène internationale, étant trop pointu et n’ayant pas fait assez de festivals pour l’instant, et c’est bien dommage.

La Nuée

Aux antipodes du postulat de Teddy, La Nuée est le film d’horreur sérieux et made in France dans la lignée de Grave. Allant piocher autant du côté de Petit Paysan pour l’aspect drame sur la difficulté d’être un agriculteur en 2020 que du côté d’Alien à la sauce Mimic, le long-métrage de Just Philippot est un très grand film. 

Dans ce dernier, Virginie, agricultrice, essaye de survivre en changeant de domaine et en élevant des sauterelles pour en faire des farines animales censées nourrir les animaux des élevages du coin. Mais alors que ses ventes sont en baisse et qu’il devient difficile de survivre avec ses deux gamins, elle découvre que les insectes grandissent mieux quand ils consomment de la chair humaine. 
La métaphore du paysan qui se saigne à la tâche peut paraître un peu grosse, mais que nenni. Le propos et le déroulé du scénario sont bien plus subtils. Tendant plus vers le documentaire que le film d’horreur pendant les trois quarts de l’entreprise, La Nuée nous prouve encore que le cinéma de genre ne sert pas qu’à faire peur : il est un superbe biais pour raconter notre époque et ses crises sociales. 

Possessor

Tel père, tel fils. Après un premier long-métrage glauque à souhait, Antiviral, Brandon Cronenberg est enfin de retour avec ce drôle d’objet qu’est Possessor. Autant dire que les aficionados de cinéma de genre attendaient ce film avec impatience. Mais le long-métrage prend de court les spectateurs, tant le projet réussit un doux mélange entre la chair et les perceptions humaines.

Le postulat de base est de jouer avec la science-fiction et ses limites lorsqu’elle soumet le corps humain. On y suit Tasya, membre d’un organisme secret qui permet à ses agents de rentrer dans la peau de n’importe quel être humain et de le contrôler. Idéal pour se la jouer mercenaire. Jusqu’au jour où l’un des hôtes se rend compte que quelque chose cloche, et va tout faire pour s’en libérer. En résulte un thriller noir hallucinatoire, proposant des séquences (presque) mélancoliques et des scènes épileptiques mémorables.

Teddy

Dans la catégorie “le cinéma de genre en France est loin d’être mort”, Teddy fait fort. Le film des frères Boukherma vient renouveler un mythe jamais abordé dans l’Hexagone, à savoir celui du loup-garou. Mais plutôt que de faire dans de l’horreur pure, le long va piocher dans l’absurde et la comédie, dans un contexte social qu’on ne voit que trop peu à l’écran.

On suit donc Teddy, un jeune loser amoureux d’une lycéenne, qui ère dans un village des Pyrénées-Orientales tandis qu’un loup bouffe les troupeaux de moutons du coin. Jusqu’à ce que la question se pose : et si le loup n’était pas juste un animal, mais un humain loup ? Plus qu’un film marrant et gore, Teddy propose une réflexion sur l’adolescence dans un trou paumé, sans se prendre au sérieux. Une vraie réussite.

Bonus : Psycho Goreman

Une jeune fille et son frère qu’elle martyrise découvrent par hasard une pierre phosphorescente. Cette dernière réveille une entité maléfique monstrueuse, mais permet aux deux gamins de contrôler ce dernier. Grotesque, très con, mal écrit, mais du coup très drôle.

Bonus : Slaxx

On le met (aussi) en bonus, car le film n’est pas génial. Il est maladroit, lourdingue, surtout sur son message de fond qui se veut une critique de l’hypocrisie de l’industrie du textile. Un nanar en somme. Mais rien que pour le plaisir sadique de voir des jeans tuer tout ce qui bouge et boire du sang, avec une animation artisanale, franchement, ça vaut le coup.