Pour Halloween, voici 10 films d’horreur made in France à voir absolument

Pour Halloween, voici 10 films d’horreur made in France à voir absolument

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Par Arthur Cios

Publié le

Du vieux, du plus récent, du crado et du fin : il y en a pour tous les goûts.

À l’approche d’Halloween, tous les week-ends du mois d’octobre, Konbini vous propose une sélection de films d’horreur à voir absolument. Du culte comme du méconnu, du gore comme du subtil, de la pure série B comme du cinéma d’auteur : il y en a pour tout le monde.

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Cette semaine, nous avons sélectionné dix longs-métrages français indispensables.

Calvaire (2004)

On triche un peu : le premier film de Fabrice Du Welz est, comme son cinéaste, belge. Mais il s’inscrit tellement dans la continuité de la plupart des films de cette liste qu’on ne pouvait pas ne pas le mettre ici. Car Calvaire est un long-métrage lui aussi un peu à part, qui prend des thématiques que l’on connaît bien, et les manie avec intelligence pour en faire quelque chose d’inédit.

Nous y suivons Marc Stevens, un chanteur méga ringard pour maison de retraite, qui parfois entretient des rapports avec des personnes âgées. Un jour, son camion tombe en panne en plein milieu de la forêt des Ardennes. Il est aidé par un homme glauque au possible, Bartel, qui lui propose le logis et de réparer son camion. Sauf que, petit à petit, ce dernier va voir en Marc la réincarnation de son ex-femme.

Laissez-vous la surprise de la suite. Disons que ça part en vrille, que c’est glauque et sacrément malsain. Du Welz use de décors et d’un casting forts pour plonger Marc et nous autres spectateurs dans une forme de folie surréaliste, parfaite pour renforcer l’horreur de ce qu’il raconte. La solitude, l’abandon, la déprime et comment l’humain, débarrassé de l’être aimé, peut partir en vrille sont les sujets abordés.

On y trouve dans le glauque de l’autre un peu de Délivrance de John Boorman, dans la mise en scène un peu de Massacre à la tronçonneuse, des hommages ici et là. Un premier film fort, classé facilement dans la catégorie “vous-risquez-de-ne-pas-en-sortir-indemne”. Tout simplement.

Grave (2016)

On ne cesse de vous le dire depuis maintenant trois ans : Grave est l’un des meilleurs films français de ces dernières années. Ce n’est pas pour rien qu’il a eu sa place dans notre liste des 30 longs-métrages de la décennie 2010, aux côtés de chefs-d’œuvre tels que The Social Network ou encore Interstellar.

Pourquoi nous aimons tant ce film ? Déjà, regardons Grave droit dans les yeux. On parle ici d’un premier film. Un premier film réussi est toujours un exercice exemplaire. Qui plus est, un film d’horreur. Or, le genre en France est une forme de cinéma peu produite, en lequel les boîtes n’ont pas assez confiance et qui est particulièrement difficile à faire. Mais outre le fait que Julia Ducournau ait réussi à passer tout un tas d’embûches, il faut se centrer sur l’histoire.

La réalisatrice nous raconte l’histoire d’une jeune étudiante végétarienne, fraîchement débarquée dans une école vétérinaire, et dont le bizutage va changer fondamentalement son être – elle va en l’occurrence se découvrir un goût pour la chair humaine. Un film de cannibalisme qui, pour la première fois, ne traite pas ses personnages comme des fous mais comme des êtres perdus confrontés à leur démon et prêts à tout pour ne pas y céder.

Grâce à un savant mélange de body horror et d’horreur psychologique sur fond de recherche d’identité, Ducournau a pondu une œuvre à part, un film d’auteur d’horreur. Une claque visuelle et mentale, dont on ne ressort pas indemne.

Haute tension (2004)

Un film fondateur de l’horreur française, comme le dit si bien Julia Ducournau. Une pierre angulaire. Une démonstration de force. Et la naissance d’un cinéaste maintenant indispensable. Si Alexandre Aja a pu faire autant de blockbusters hollywoodiens (le très bon remake de La colline a des yeux, Piranha 3D, Crawl, Mirrors et Horns), c’est grâce à la puissance de son deuxième long-métrage, Haute tension.

Le pitch est pourtant assez simple, semblable à nombreux slashers : deux étudiantes, incarnées par Maïwenn et Cécile de France, viennent réviser leurs partiels dans une maison à la campagne familiale de la première. Mais, dès la première nuit, un tueur massacre toute la famille. Les deux jeunes femmes vont tout faire pour survivre.

Sur le papier donc, on est face à un classique film d’horreur. C’est sans prendre en compte sa violence très crue, sa tendance à tendre vers le torture porn (quasiment inexistant en France jusque-là), sa volonté d’aller au bout de son délire. Aja ne cherche pas à surintellectualiser ce qu’il raconte. Il veut de l’horreur brute, et le fait si bien.

En somme, là où il diffère des précédents films du genre en France, c’est dans son ADN. Il y a quelque chose de très propre au cinéma américain dans ce long-métrage. Pas étonnant qu’Aja soit parti de l’autre côté de l’Atlantique après cette aventure. Dans sa vivacité, sa manière de filmer les crimes, ou même la structure du propos, Haute tension est le premier film de genre qui aurait complètement pu être américain, réalisé par Wes Craven par exemple. Une anomalie qui va donner quelques enfants, trop peu malheureusement.

La nuit a dévoré le monde (2018)

Un peu de la même manière que Grave, ce film est une petite claque. Il est, au fin fond de son ADN, son petit frère. Un premier film de genre, français, qui va mêler cinéma d’auteur et cinéma d’horreur, en usant d’un thème rarement exploité en France – ici, le mort-vivant. Sauf qu’à la différence du film de Julia Ducournau, qui explore la psyché d’un personnage en proie à ses démons et tente d’y résister, celui de Dominique Rocher va plutôt étudier la solitude face à la folie d’un monde dans lequel on ne peut plus exister.

Le point de départ est classique : un homme s’endort, et à son réveil, tous les êtres humains sont devenus des zombies. En gros. Outre le point de vue film d’auteur français, sa différence est qu’il s’agit d’un mec un peu paumé, qui s’endort bourré à une soirée en appartement, et se retrouve du coup bloqué à son réveil au sein dudit appart.

On est donc sur un huis clos du début à la fin, ce qui est déjà plus original. Mais surtout, c’est le cheminement intellectuel du personnage qui est le plus fort ici. Pas le genre de film à voir si on veut se faire un gros coup de flip sous la couette, mais plutôt un film foncièrement intelligent et original. Pas comme sa fade copie coréenne qui vient tout juste de sortir sur Netflix, #Alive.

Les Yeux sans visage (1960)

La même année où sortait À bout de souffle de Godard et Rocco et ses frères de Visconti, mais aussi Psychose du côté du cinéma hollywoodien signé Hitchcock, le premier film d’horreur français voyait le jour. Enfin, l’horreur est un terme bâtard qui veut tout et rien dire. Mais une chose est sûre : le long-métrage de Georges Franju est à part.

Tendant plus vers le film policier que vers l’angoisse même, Les Yeux sans visage est plus précurseur que de nombreux premiers films explorant le genre, avec des moments presque gores (mais sans jamais vouloir l’être). Le rythme n’est pas celui d’un Conjuring alternant vision d’horreur et jump scares, mais le spectacle qui se passe sous nos yeux nous hante longtemps.

On y suit le professeur Génessier, un éminent chirurgien qui a eu un accident avec sa fille, Christiane. Cette dernière est défigurée, et son père passe depuis son temps à trouver une solution pour rendre son visage à sa fille. Celle qui lui semble la plus réalisable est d’enlever des jeunes filles lui ressemblant, de leur enlever la peau du visage pour la greffer sur celui de sa fille.

Un massacre masqué dans un film dans la continuité du cinéma d’auteur français, avec un calme plat incroyable. Les quelques séquences terrifiantes le sont par la manière qu’a le cinéaste de filmer de manière chirurgicale ce qu’il se passe, sans user d’artifices, de montages ou d’une musique. On est presque plus proche du documentaire parfois, et ça rend le tout mille fois plus effrayant. Une véritable leçon d’histoire, et une petite claque prouvant qu’on n’a parfois pas besoin de beaucoup pour marquer nos rétines.

Martyrs (2008)

La brèche ouverte par Alexandre Aja a donné naissance à plein de films de genre assumés, un peu gras, avec une puissance américaine. Ils sont nombreux, tous ne sont pas géniaux. Nous aurions pu vous parler d’À l’intérieur, mais en termes d’home invasion, un long-métrage est encore plus puissant : Martyrs, de Pascal Laugier.

Le film ouvre sur une jeune fille, Lucie, en sang, qui court, le tout en criant de désespoir et de douleur. Générique. Saut dans le temps de 15 ans. On débarque dans une famille lambda, classique, avec un jeune Xavier Dolan. Cette dernière va se faire massacrer par Lucie, qui cherche à se venger de la torture subie. Cette dernière, bien que rejointe par sa seule amie, est en proie à des hallucinations sous forme de monstres, qui mettent à mal sa vengeance.

Le film est scindé en deux. La deuxième partie peut dérouter tant le message du film change. Mais la force physique de la première moitié suffit à en faire un long-métrage incontournable du cinéma d’horreur made in France, qui va puiser du côté du torture porn, de l’home invasion et même un peu du fantastique, tout en étant plus qu’un film brutal – la réflexion sur la vengeance mais surtout sur la culpabilité est fortiche.

Il est d’une rare violence, l’un des plus gores jamais produits ici, sans paraître pauvre. Le travail sur les corps crispés, contorsionnés, est impressionnant. Les plans très serrés sur les visages renforcent l’aspect claustro de ce huis clos horrible. Un film comme on en fait plus ici, et c’est sans doute dommage.

Possession (1981)

La définition du film monstre. Une œuvre d’art, un immense long-métrage qui est une leçon d’écriture, de mise en scène mais surtout de jeu. Réalisation franco-allemande signée par le polonais Andrzej Zulawski, expérience traumatisante (littéralement) pour Isabelle Adjani, qui a quand même gagné grâce à ce rôle un prix d’interprétation à Cannes et un César de la Meilleure actrice – fait rare pour un film de genre, rappelons-le –, Possession est le film indispensable de cette liste.

Le point de départ est basique : un homme rentre d’une mission pour le boulot et trouve sa femme distante, persuadé qu’elle le trompe. Il passe tout le film à essayer de comprendre ce comportement étrange. Sauf que l’attitude des deux implique des prestations de folie. On ne le redira sans doute jamais assez, mais ce qu’offre Adjani est unique en son genre. Et c’est sans parler d’un retournement de situation fantastico-goresque inattendu, qui donne un tout autre ton au film.

C’est un film sur la rupture, Zulawski l’ayant écrit en plein divorce, mais tellement plus. L’histoire se tient dans un Berlin scindé en deux, près d’un mur omniprésent le long de ces deux heures. Le spectateur se retrouve enfermé, rendu claustro de force. Il y a tant de choses à y voir, de sa critique du communisme à la notion même de la possession en passant par la place de la religion bafouée, le fait d’engendrer son propre monstre, la mort d’un couple et de l’amour qui va avec, la notion de double et de schizophrénie…

Tout, de la mise en scène à la photographie (qui aime tant filmer de très près le duo Adjani/Neill, pour mieux donner corps à leurs mimiques de folie crispantes) en passant par la musique, son montage et son casting à couper le souffle, fait de ce film un objet à part, souvent imité mais jamais égalé. Pas le film le plus effrayant de la liste, mais de loin le plus brillant.

Revenge (2018)

Les amatrices et amateurs de nanars d’horreur connaissent sans doute bien le “rape and revenge”, ce sous-genre propre au cinéma d’exploitation des années 1970 où l’on voit une femme se venger, souvent avec beaucoup d’hémoglobine, du viol qu’elle a subi plus tôt. Un type de film très marqué temporellement, un chouïa problématique, mais qui a fait son retour dans sa forme de série B très récemment devant la caméra de la Française Coralie Fargeat.

Le scénario de son premier film, Revenge, a tout pour rentrer dans les cordes du “R&R” de base – pas comme Millenium, qui est bien, bien plus que ça par exemple. On y suit trois jeunes hommes riches venus vivre leur week-end annuel dans le désert. Or, l’un d’eux est arrivé plus tôt avec son amante Jennifer, qui attise (à son insu bien sûr) la convoitise des deux autres bonhommes. Au lendemain d’une soirée, l’un de ces derniers la viole. Le trio lui propose de l’argent pour son silence, ce qu’elle refuse, et finit par tomber d’un ravin, laissée pour morte.

Vous devinez donc ce qui va suivre. Sur le papier, on est en plein dedans. Pourquoi Revenge sort-il tant du lot ? Par son propos. La réalisatrice française inverse totalement la recette et subvertit la misogynie inhérente à ce sous-genre. Les hommes sont ceux qui sont objectifiés, stupides et creux. Mais surtout, l’agression n’est pas montrée en elle-même, et ça change beaucoup.

Surtout, Revenge est un vrai beau film. Les plans sont léchés, bien foutus. Le gore est assumé, frôlant parfois la caricature mais volontairement, pour renforcer le sous-texte et le symbolisme du film. Non, un genre n’est pas foncièrement misogyne, c’est bien la manière de raconter les histoires qui l’est. Et en ça, Revenge est une petite révolution. Pas forcément d’horreur pure, mais qu’importe.

Sheitan (2006)

Kourtrajmé est maintenant une marque connue et reconnue, à qui l’on doit un paquet d’œuvres et de cinéastes sortis du schéma traditionnel de production. Le monde est à toi, Les Misérables, tout ça, vous connaissez. Sauf que le premier long de l’équipe était un petit film d’horreur crasseux, sans budget, fait en mode débrouille par une clique d’amateurs, et qui a été une bonne grosse gifle dans la tronche du cinéma français.

Sheitan, réalisé par Kim Chapiron, a en effet pris de court tout une profession. Déjà en cassant l’image de beau gosse que Vincent Cassel vient de s’acheter avec son rôle de vilain dans Ocean’s Twelve de Steven Soderbergh. Mais aussi en démontrant qu’il était possible de faire peur avec pas grand-chose. Et aussi qu’on pouvait faire un film avec des jeunes de banlieue sans que ce soit le cœur du truc, et sans en donner une représentation cliché.

On y suit une bande de jeunes qui, en sortant de boîte le soir de Noël, se retrouve dans la maison de campagne d’une jeune femme avec laquelle un des gars fricotait. Ils se retrouvent donc tous ensemble loin de tout, dans la maison de l’enfer, entourés d’une bande de gens chelous. Une aventure ensanglantée et malaisante au possible.

Ça parle d’inceste, d’aliénation de la société (avec d’un côté l’aspect rural, et de l’autre la banlieue), ça sent à des kilomètres le Massacre à la tronçonneuse de Tobe Hooper, c’est intense, dérangeant… C’est donc indispensable.

Trouble Every Day (2001)

Nous vous avons beaucoup parlé dans cet article du cinéma d’auteur d’horreur. C’est l’une des forces du septième art français. À la fin du XXe siècle, le journaliste américain James Quandt a qualifié la nouvelle scène de cinéma transgressif francophone de “New French Extremism”, une mouvance au sein du paysage cinématographique de l’Hexagone qui a poussé dans leurs retranchements les codes qu’on lui connaissait. A découlé de ce mouvement une branche gore qui a permis la naissance d’Alexandre Aja, Pascal Laugier et tous ces films des années 2000 cités plus haut.

L’une des figures de proue de ce mouvement, et film charnière du cinéma d’horreur, est Trouble Every Day de Claire Denis. Précurseur, subtil, difficile. La cinéaste, déjà connue pour Beau travail entre autres, s’attaque ici au mythe du vampire cannibale, avec une approche inédite : celle de voir en eux des personnes malades ayant besoin d’aide et de soins médicaux.

On y suit deux histoires entremêlées et dont le lien se construit au fur et à mesure que le récit avance. D’un côté, une Béatrice Dalle taiseuse et coincée dans une chambre, attirant des hommes à elle et attirée par le sang qui coule dans les veines de ses futures victimes. De l’autre, Vincent Gallo, en voyage de noces à Paris, qui essaye de ne pas montrer à sa femme qu’il ne va pas bien et qui cherche un médecin pouvant l’aider (ou pas).

Trouble Every Day est la définition d’un film charnel. Les dialogues sont la plupart du temps aux abonnés absents, Claire Denis préférant se concentrer sur les personnages et leur comportement. Elle a une manière unique de filmer la peau, le corps, la bouche de ces pauvres créatures. Elle réussit à rendre tangibles des choses pas vraiment palpables, en mettant au centre de toute son entreprise la figure du fantasme, de l’interdit, du danger, de la frontière à ne pas dépasser mais qu’on ne peut pas s’empêcher de traverser malgré tout. Et tout ça passe par une mise en scène d’un brio rare dans le cinéma dit d’horreur. Sauf que ce film est bien plus, on ne peut pas le limiter à ça. Son héritage est trop grand, et son ambition trop folle.

Sans Trouble Every Day, pas de Grave. Tout simplement.