Le film Pride est-il “trop gay” pour le marché américain ?

Le film Pride est-il “trop gay” pour le marché américain ?

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Par Constance Bloch

Publié le

Pour sa sortie DVD outre-Atlantique, le distributeur américain de Pride a effacé toutes les références à l’homosexualité sur la jaquette. 
L’année dernière sortait en salles l’irrésistible Pride, réalisé par Matthew Warchus, lauréat de la Queer Palm du Festival de Cannes. L’histoire du film se déroule en 1984 pendant la grève des mineurs britanniques sous l’inflexible Margaret Tatcher, et relate l’épopée d’un groupe d’homosexuels londoniens qui s’engagent pour soutenir les travailleurs d’un petit village gallois.
Ensemble, ils créent “Lesbians And Gays Support The Minors” (les lesbiennes et les gays soutiennent les mineurs), et partent à la rencontre de ces hommes en difficulté. Un long métrage engagé qui parle d’activisme homosexuel avec beaucoup d’humour et de justesse, et porte un message de tolérance et d’amour.
Mais si l’un des aspects essentiels du film concerne l’homosexualité de ses héros, aux État-Unis, c’est justement ce qui semble être le problème. En effet, comme le rapporte le site Yagg, le distributeur US du film a décidé de supprimer de la jaquette du DVD toute allusion à l’orientation sexuelle des protagonistes, et ce, de manière radicale.

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Les références à l’homosexualité gommées

Je ne suis pas surpris que les distributeurs américains aient pris la décision de vendre davantage d’exemplaires en gommant le contenu gay. Je ne le défends pas – c’est un procédé mauvais et anachronique –, je dis juste que je ne suis pas surpris.
C’est une malheureuse réalité commerciale, ici et aux USA, que les distributeurs doivent prendre en compte. Les titres LGBT sont largement marginalisés en dehors de rares succès comme Brokeback Mountain.

Les États-Unis, frileux sur les contenus “homosexuels”

Ce n’est pas la première fois que les États-Unis tentent de censurer des références ou contenus homosexuels dans une production cinématographique. Rappelons que si La Vie d’Adèle, la palme d’Or d’Abdellatif Kechiche, est sortie en salles en France avec une interdiction aux moins de 12 ans, outre-Atlantique le film n’était pas accessible aux moins de 17 ans.
Pire encore pour le film d’Ira Sachs, Love is Strange. Il aborde les difficultés d’un couple d’homosexuels sans aucune scène de violence ou sexuellement explicite, mais s’est vu infliger la même interdiction sans aucune raison objective, si ce n’est l’orientation sexuelle de ses héros. Une décision ouvertement qualifiée d’homophobe et mue par une question de morale des plus dérangeante de nos jours.
En 2013, c’est le film de Steven Soderbergh, Ma vie avec Liberace, qui a été privé de sortie en salles aux US. Si certains évoquaient des raisons budgétaires, d’autres pointaient du doigt ouvertement l’aspect “trop gay” du biopic pour les distributeurs américains. En effet, il met en scène l’histoire d’amour dissimulée entre Liberace, figure kitschissime du music-hall américain, et un jeune homme qui entre à son service.
-> À lire : Rencontre avec les créateurs du film Pride, la Queer Palm de Cannes