Ces 6 courts-métrages sur le confinement vont vous faire relativiser

Ces 6 courts-métrages sur le confinement vont vous faire relativiser

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Par Lucille Bion

Publié le

Vincent Cassel, Laura Felpin ou William Lebghil : tous ont joué le jeu pour 6 x confiné·e·s.

Il y a des anniversaires que l’on préférerait ne pas fêter. Cela fait maintenant un an que la France oscille entre confinement, couvre-feu et ralentissement à cause de la pandémie de Covid-19. Si les salles de cinéma semblent condamnées à perpétuité, la créativité bat pourtant son plein pour de nombreux cinéastes.
Canal+ a proposé à six artistes de signer six courts-métrages dont l’intrigue se déroulerait pendant le premier confinement. Saïd Belktibia, Antoine de Bary, Pierre Maillard, So Me, Alice Moitié et Marina Rollman ont alors imaginé ce qu’il se passait dans les appartements et autres maisons de campagne alors que les rues étaient désertes. Quand certains sont en train de se cramer les yeux devant les jeux vidéo, d’autres reviennent sur leurs traumatismes d’enfance ou se réinventent sur les réseaux sociaux.
Intitulé 6 x confiné·e·s, ce programme de la chaîne cryptée met en lumière les difficultés relationnelles des héros à travers des récits éclectiques. Film de braquage, comédie absurde, huis clos, road trip campagnard… en 20 minutes, chaque court-métrage explore la façon dont le pire et parfois le meilleur de chacun s’expriment dans cette situation inédite. Konbini a pu visionner ces six films totalement indépendants les uns des autres, et vous partage ses coups de cœur et ses déceptions.


Les films seront tous diffusés à partir du 15 mars sur Canal+.

#1. Scorpex

Auto-baptisé Scorpex, ce DJ de 40 ans donne tout pour paraître super cool. Il mixe pour ses followers, joue les confidents et les mentors auprès des djeuns et possède un très très grand appart, qui devait abriter d’énormes teufs dans le monde d’avant. Pour le confinement, il propose donc à Félix de venir habiter chez lui pour faire de la musique. Jeune compositeur de musique électronique, Felix embarque dans cette galère sa copine, qui a du mal à supporter le comportement de Scorpex.
Bertrand de Langeron, aka So Me, a voulu décrypter ce métier de DJ, traditionnellement réservé aux jeunes, comme il l’explique :

“Ce métier n’ayant que quelques décennies, ses premiers acteurs atteignent aujourd’hui une certaine maturité et c’est un phénomène nouveau et fascinant que j’avais envie d’explorer. Comment opère-t-on ce tournant quand on passe ses nuits dans un club rempli d’adolescents dont on pourrait être le père ?”

Vincent Cassel a ainsi endossé le rôle pour nous jouer sa crise de la quarantaine, en proie à un jeunisme frôlant le ridicule face au regard de deux jeunes ambitieux. Un choc des visions qui flirte à mi-chemin entre la parodie et le pur divertissement, dont la pièce maîtresse reste, évidemment, notre vedette nationale inimitable.

#2. L’Art de vivre

Pour Antoine de Bary, l’exercice 6 x confiné·e·s aura eu une saveur particulière. Son premier long-métrage, Mes jours de gloire, est sorti en salle le 26 février 2020, à la veille d’un confinement national, et n’aura donc connu qu’une petite semaine d’exploitation. Avec ce court-métrage, il prend donc sa revanche.
Pour ses devoirs de confinement, le réalisateur a choisi d’exiler quatre personnages dans une grande demeure bourgeoise pour mettre à nu les petites failles ou grandes défaillances que cet enfermement forcé a révélé chez chacun d’entre nous. Dans L’Art de vivre, Félix Moati interprète Ulysse, un jeune homme de bonne famille, qui fonce se confiner dans la maison de campagne familiale, au volant de sa luxueuse voiture de sport. Mais un inconnu, tombé en panne dans son jardin, va remettre ses plans de confinement idyllique en question et fera entrer en confrontation l’hypocrisie de sa représentation sociale et sa réalité intime.
Antoine de Bary a choisi d’observer cette situation inédite par le prisme d’une certaine bourgeoisie, dont il est lui-même issu, pour interroger la morale lorsqu’elle est mise au défi d’une situation exceptionnelle qui a déstabilisé notre équilibre et nos convictions personnelles.

#3. L’Amour du game

Alors qu’un couple sur dix a envisagé de prendre ses distances à la fin du confinement, qui aura été fatal pour 4 % des couples en France selon une étude très sérieuse, Amour du game palpe l’ambiance conjugale d’un couple de gamers, enfermé entre quatre murs.
L’idylle, formée par les petits rigolos que sont Laura Felpin et William Lebghil, semble plus attirée par sa communauté que connectée par les sentiments qu’ils éprouvent l’un envers l’autre. Si pendant le confinement, le virtuel a souvent occupé plus de place que le réel dans nos vies, le cinéaste Pierre Maillard a imaginé une séparation brutale du duo, alors que Victoire est secrètement enceinte et que Tarek vient de se faire bannir des réseaux pour s’être masturbé devant son écran en se filmant à son insu. Cette immersion au cœur d’une tempête 2.0 apporte, au prix du paradoxe, un peu d’espoir et de miel dans notre quotidien morose.

#4. Jusqu’à Saint-Molart

Comme dans L’Art de vivre, il est également question de retour chez les parents dans Jusqu’à Saint-Molard. Mais les circonstances sont ici tout autres. Dans son court-métrage, la photographe Alice Moitié, déjà passée derrière la caméra pour la réalisation de clips, interroge le retour aux sources quand on a décidé de renier ces mêmes “sources”.
Dans Jusqu’à Saint-Molard, Ludivine Sagnier est Mélanie, une jeune trentenaire qui a réussi à Paris et qui profite du confinement pour rendre visite à sa famille. Issue d’un milieu très modeste avec lequel elle a pris ses distances, on assiste donc à un véritable choc des cultures.
Mais au-delà d’interroger le déterminisme social, la réalisatrice a également saisi le prétexte du confinement pour s’attaquer au traumatisme des victimes de violences sexuelles. Ou plutôt de l’absence de traumatisme car lorsque sa mère lui apprend qu’elle a été victime de viol dans son enfance, Mélanie ne ressent rien. Son confinement va alors prendre une tout autre tournure, celle d’une quête désespérée d’émotions.

#5. Gina

Pour observer “ce petit théâtre de la folie, des excès, des dérapages, de la langueur que cette période étrange nous a offert“, Marina Rollman a pensé un court-métrage rocambolesque. Avec Gina, elle signe le portrait haut en couleur d’une femme mûre et croqueuse d’hommes qui a décidé de transformer cette ennuyeuse parenthèse en mémorable moment de vie, pour lequel l’émérite humoriste a fait appel à son compatriote suisse Alexandre Kominek.
Tandis que nous trompions l’ennui en cuisinant des banana breads, Gina, elle, a préféré monnayer les services d’un jeune infirmier dont elle a fait son amant le temps d’un week-end. C’est par l’observation de ces petits arrangements entre amis que Marina Rollman interroge puis renverse les rapports de pouvoir, en créant “une situation tout en gris, des personnages pas réellement répréhensibles mais pas angéliques non plus, dont les solitudes et les manques se rencontrent dans le cocon du confinement.

#6. Le Casse du siècle

Dans un tout autre registre, Le Casse du siècle flirte avec le film d’action et la comédie absurde, grâce à un scénario original et des comédien·ne·s surprenant·e·s – mention spéciale à Alexis Manenti et son accès du Sud fabuleux.
Inspiré par les données du ministère de l’Intérieur relatives au taux de criminalité en baisse pendant la période de confinement, le réalisateur Saïd Belktibia a imaginé une famille de voleurs qui profitait du chômage technique des concurrents et de la fermeture des magasins pour se faire du fric. Les malfrats pillent alors les mâchoires des habitants résidents en cité pour collecter des dents en or. Derrière cette stratégie buccale très originale, les bandits s’imaginent réaliser “le casse du siècle”. Loin d’être une boucherie humaine, ce récit propose un regard amusant sur des criminels bas de gamme.
Un article écrit par Lucille Bion et Manon Marcillat