Ces 20 comédies noires sont parfaites pour faire la nique à la morosité

Ces 20 comédies noires sont parfaites pour faire la nique à la morosité

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Par Arthur Cios

Publié le

Dans ce catalogue de comédies pas comme les autres, vous trouverez forcément votre bonheur.

Les comédies “feel good” et niaises vous gonflent ? Vous en avez marre d’avoir pour seul défoulement quotidien des cours de yoga virtuels ? Vous avez foutrement besoin d’une bonne dose d’un humour grinçant et pas forcément correct alors que le déconfinement social (mais pas encore physique) est portes ouvertes depuis lundi 11 mai ? Vous êtes tombés sur le bon article.

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À travers 20 exemples de films provenant des années 1960 comme des années 2000, on vous propose tout autant de manières de prendre du recul sur votre vie chamboulée, avec une pincée d’ironie, une louche de sarcasme et parfois un peu de violence. Magnéto, Serge, bordel.

We Are Four Lions

Faire rire avec le djihadisme, le terrorisme et des attentats est sans doute l’une des choses les plus compliquées et casse-gueule qu’un cinéaste puisse tenter de faire. Pas pour rien qu’il n’y a pas 15 000 comédies sur le genre. Même Sacha Baron Cohen ne l’a pas directement fait. Dernièrement, un seul réalisateur s’y est essayé, et il s’appelle Chris Morris. Et il faut le remercier.

Car We Are Four Lions est génial, et est un film rare. Le cinéaste s’est fait pourrir pour avoir tourné en comédie le terrorisme, alors que c’est un acte de démystification bien plus fort que n’importe quel film de Clint Eastwood. Ce film est donc une comédie à l’humour très (très) noir, mais qui réussit à offrir beaucoup de rires francs au spectateur qui suit ces quatre cinq apprentis terroristes britanniques, aussi sots que motivés – non.

De leur préparation pour un voyage raté au Pakistan à leur retour au pays pour préparer une attaque lors du marathon de Londres déguisés en mascottes nulles, ce périple de quatre Anglais paumés (et quand même bien stupides), apprentis djihadistes sans mode d’emploi, est une satire folle. On se joue ici de manière grotesque, donc génial, de l’islamisme radical et de tout ce qui l’entoure, mais aussi des moyens de l’État pour contrecarrer ce type d’attaques. Et c’est salvateur. [AC]

Problemos

Sur la route du retour des vacances, Jeanne et Victor (ou ce qu’on a coutume d’appeler un couple de “bobos parisiens”) font une halte dans une ZAD d’Ardèche où séjourne un ami de la famille. Contraints d’y rester plus longtemps que prévu, ils vont devoir se soumettre aux règles de cette communauté altermondialiste, entre désintoxication technologique et participation à des débats sur les traitements naturels contre les odeurs intimes.

On a aimé cette comédie satirique plus que jamais actuelle qui distribue les coups à égalité. Mais on a davantage ri dans la première partie, qui plante le décor, que dans la seconde moitié où se joue véritablement l’intrigue, celle d’une pandémie qui décime l’humanité entière à l’exception de cette joyeuse bande d’irréductibles Gaulois dans leur paradis reculé. Chacun va alors vouloir sauver sa peau, envoyant valser tous ses grands principes utopiques, pour un résultat malheureusement quelque peu chaotique.

Mais la raison de ce scénario aussi anarchique que cette communauté hippie se trouve peut-être du côté de l’ambivalence de ses auteurs : Blanche Gardin, révélée par le Jamel Comedy Club, et Noé Debré, scénariste de Dheepan de Jacques Audiard, Palme d’or cannoise.

Cette seconde moitié, qui peut laisser quelque peu circonspect, est cependant sauvée par une bande de comédiens qui mériteraient davantage d’exposition sur le grand écran, de la reine de l’humour noir Blanche Gardin au prince de la gêne et de l’absurde Monsieur Fraize, entre lesquels oscille Problemos. [MM]

C’est arrivé près de chez vous

“Un petit quidam, ça ne fait pas de vague… Tu tues une baleine, t’auras les écolos, t’auras Greenpeace, t’auras le commandant Cousteau sur le dos !” En 1992, Cannes découvre en noir et blanc le talent fou d’un mec qui l’est tout autant, Benoît Poelvoorde. Pour sa première participation à un long-métrage, l’acteur belge est partout, que ce soit à la réalisation comme au scénario, aux côtés de ses compatriotes Rémy Belvaux, André Bonzel et Vincent Tavier.

Si le film a été tourné en noir et blanc par manque de moyens et gonflé en 35 mm pour passer les portes des salles du Festival de Cannes, C’est arrivé près de chez vous est, à l’inverse, riche en dialogues et situations désormais cultes, se présentant comme un documentaire dont le sujet principal est Ben (Benoît Poelvoorde), un tueur à la petite semaine, dépouilleurs de petits vieux et spécialistes des familles modestes lorsque la nuit se présente.

Le long-métrage, qui aurait pu virer à l’exercice de style et surtout en rond, explose les genres, les corps, les frontières et le politiquement correct, à travers le vrai faux parcours d’un assassin pas comme les autres, aussi fort en maux qu’en mots. Pas étonnant qu’un Tarantino ait aimé ce film. [LL]

Kill Your Friends

Portée par Nicholas Hoult, en summum du connard prétentieux – un rôle qui lui sied si bien –, cette comédie noire sous-estimée dénonce avec beaucoup d’humour noir le monde cruel des médias et de l’industrie musicale. Au sein d’un label de musique, le jeune héros moins mélomane qu’ambitieux doit trouver le tube et la star qui vous feront danser demain.

Prêt à tout pour arriver aux sommets de sa boîte, cet imprévisible producteur nous fait découvrir la bassesse de l’industrie médiatique et artistique. Manigances, drogues, alcool… La dignité n’existe pas dans ce monde de requins où, si l’on veut percer, la gentillesse et l’honnêteté ne sont clairement pas des atouts. Trash et cruelle, cette comédie sombre est là pour te rappeler de ne jamais baisser la garde, que tu n’as pas d’allié et que ton pire ami est probablement un mélange de Voldemort, Hitler et Judas. [LB]

Borat

Toute l’œuvre de Sacha Baron Cohen mérite d’être dans cette liste. L’artiste, spécialisé dans les caméras cachées avec des rôles de personnages mi-détestables, mi-attachants, s’est construit une carrière autour de l’humour noir. Et est un exemple qu’on peut rire de tout si l’on est assez adroit. Mais son plus grand coup d’éclat reste Borat.

Ce personnage de pseudo-reporter, venu du Kazakhstan pour étudier les États-Unis, n’a rien pour lui. Bête, naïf, mais surtout homophobe, antisémite, misogyne, raciste, incestueux… Borat est le cliché basique d’une personne née loin du monde “occidental”, qui découvre une culture qui n’est en apparence semblable en rien à la sienne.

L’intelligence de ce Candide moderne, comme nous le disait Marjane Satrapi, ou plutôt de ce film, ne réside pas dans les gags génialement lourdingues du personnage. En réalité, Borat est intéressant pour ce qu’il dit des clichés que l’on a de ces anciennes républiques de l’URSS, et surtout de ce qu’il montre des réactions qu’il suscite de la part des citoyens américains piégés – et de ce qu’ils disent des États-Unis modernes, donc.

De la liberté de faire ce qu’on veut au patriotisme presque indécent de certaines régions du pays en passant par de l’islamophobie pure et simple, vous ne trouverez pas de comédies plus féroces, plus intelligentes et transgressives, malgré des blagues de couilles sur les yeux et sur du fromage fait avec du lait maternel. Pas culte pour rien ! [AC]

Super

La même année que Matthew Vaughn sortait un certain Kick-Ass, James Gunn dévoilait son deuxième long-métrage, Super. Un film méconnu, qui a coûté littéralement dix fois moins que le premier (Kick-Ass a coûté 30 millions de dollars, contre 2,5 millions pour Super), défoncé par la critique et boudé par le public, mais pourtant très drôle, au casting incroyable, pas prétentieux, qui interroge sur la violence fantasmée par notre culture du super-héros et de la quête de la vengeance. Un film qui mérite toute votre attention, donc.

Car là où Vaughn mettait en avant un jeune homme normal qui devient un super-héros sans pouvoirs de manière presque candide, Gunn se moque du procédé. Ici, le héros (Rainn Wilson, soit Dwight dans The Office) est un loser total, et tellement chiant à mourir qu’il en perd sa femme (Liv Tyler), qui part avec un dealer de drogue faussement impressionnant (Kevin Bacon). C’est son amour pour Jésus, pour un super-héros chrétien télévisé (Nathan Fillion) en l’occurrence, qui le poussera à porter un costume rouge et à casser des dents, accompagné d’une vendeuse de comics devenue elle aussi vigilante (Ellen Page).

Outre la liberté de ton ouvertement revendiqué par Gunn, le film s’offre surtout une panoplie de scènes absurdes, d’une violence inouïe mais jamais glorifiée (contrairement à ce qu’ont pu dire les médias à l’époque de sa sortie), et avec un humour franchement politiquement incorrect. Ici, les personnages sont tout sauf de gentils héros. Ce sont des personnes malades, qui tuent pour un rien, jouissent de la violence. Des déséquilibrés, en somme, complètement déconnectés de la réalité, souffrant d’une certaine forme de solitude et d’ennui. [AC] 

South Park, le film

Les maîtres de l’humour noir s’appellent Trey Parker et Matt Stone. On aurait pu mettre le savoureux Team America, police du monde dans cette liste, parodie grotesque de G.I. Joe en marionnette qui combat le terrorisme avec autant de délicatesse qu’un OSS 117 tout en détruisant (littéralement) le monde entier, et en taclant à la gorge le tout Hollywood. Mais cette pépite n’aurait jamais vu le jour sans ce chef-d’œuvre : South Park.

Alors que cette série culte et désormais indispensable n’en est qu’à sa troisième saison, et que la production est encore une charge complexe de travail, les créateurs de South Park décident d’en faire un film, sobrement intitulé South Park, le film : Plus long, plus grand et pas coupé. Et on y retrouve tout le génie et le cynisme de la série, en plus aboutis. Car South Park deviendra une vraie grande série à partir de la saison 4, voire 5. Donc après le film.

Il faut dire que Parker et Stone sont allés loin. Ils ont imaginé une guerre entre le Canada et les États-Unis à cause de la censure du célèbre duo Terrance et Philippe, tandis que Saddam Hussein et son amant, Satan, se mêlent à la bataille (mais le couple bat de l’aile, et Kenny, qui est en enfer depuis le début du film, joue le rôle d’une espèce de conseiller conjugal).

Et pendant ce temps, on se moque de tout le monde, de Barbra Streisand à Bill Gates en passant par Jar Jar Binks. Et s’il vous fallait un argument supplémentaire : c’est le dessin animé qui détient le record du plus grand nombre d’insultes (399, dont 146 “fuck”). Absurde, brillant, indispensable.

L’anecdote qui fait plaisir : la chanson “Blame Canada” est nommée en 2000 aux Oscars dans la catégorie Meilleure chanson originale – oui, oui. Les deux trublions décident de se pointer à la cérémonie en portant les robes qu’avaient l’année précédente Gwyneth Paltrow et Jennifer Lopez, le tout en ayant gobé juste avant un petit buvard de LSD.

Tout alors devient génial : ils se foutent de la gueule des journalistes, c’est Robin Williams qui va chanter cette chanson (complètement stupide) sur scène, et ils perdront face à Phil Collins et la BO de Tarzan – ce qui vaudra tout un tas de moqueries envers l’ancien batteur de Genesis dans les saisons à venir de South Park. On vous le dit : tout ce qui entoure ce film est fantastique. [AC]

99 francs

Jean Dujardin, pas encore oscarisé, se glisse dans le costume d’Octave Parango, le maître du monde qui décide ce que l’on regardera et de ce que l’on mangera demain. Il est publicitaire et peut vendre n’importe quoi, à n’importe qui, n’importe quand.

Ce faussement redoutable personnage dévoile les coulisses des tournages de pub, la pression mentale que subissent les employés, leurs modes de vie démentiels et la superficialité de leur existence. Entre deux rails de coke et deux levrettes, Octave étaye sa critique de l’argent et la gloire mais aussi de la frénésie de la mode, de la consommation et de la beauté éphémère avec un cynisme digne de la plume de Beigbeder, dont s’est inspiré le réalisateur Jan Kounen. 99 francs reste l’une des comédies françaises les plus cultes de notre patrimoine français. Et juste pour ça, elle mérite d’être revue. [LB]

 Le Bruit des glaçons

Le Bruit des glaçons est un film qui raconte comment un écrivain est en train de crever. Jean Dujardin vit désormais moins de sa plume que de son alcoolisme, dans sa villa avec sa bonne et ses meilleures amies : ses bouteilles. Le train de vie de ce loser antipathique bascule lorsque son cancer vient littéralement frapper à sa porte, de bon matin, sans prévenir. Albert Dupontel, qui ne jure que par l’humour noir, campe ici cette maladie vicieuse.

Personne ne peut le voir, à part Jean Dujardin, ce qui donne des scènes irréalistes dans lesquelles ce dernier se bat avec de l’air, serre la main dans le vide et parle tout seul. Pourtant, le cancer l’accompagne bien partout, tout le temps. Envahissant et invisible. Cette comédie noire et irréelle tutoie la mort grâce à un très beau (et funeste) scénario de Bertrand Blier. [LB]

Thank You for Smoking

Aaron Eckhart ? On le connaît surtout pour son rôle de Harvey Dent, l’homme qui deviendra Double-Face dans le grandissime The Dark Knight de Christopher Nolan. Une prestation impressionnante, certes, mais ce n’était pas la première fois que l’acteur brillait à ce point.

Trois ans auparavant, en 2005, il campait pour Jason Reitman (le papa de Juno et Tully) Nick Naylor, un lobbyiste peu scrupuleux de l’industrie du tabac dans l’excellent et sous-estimé Thank You for SmokingDans la même veine satirique et critique qu’un Lord of War, le long-métrage suinte le sarcasme et l’humour noir affreux, donc génial.

De la mauvaise foi qui consiste à refuser de croire que la clope est cancérigène à toutes les solutions qu’on cherche pour rendre la cigarette cool, sans parler des coups bas et des discussions avec d’autres lobbyistes : le personnage est un connard, mais un connard qu’on est obligé de prendre en sympathie. Du genre qu’on déteste, mais qu’on est heureux de voir réussir son entreprise, alors qu’elle est elle-même dégueulasse. C’est fort, très fort. [AC]

Idiocracy

Lourdingue mais malheureusement futuriste, Idiocracy a annoncé à son insu la perdition de l’espèce humaine. Sur le ton de la plaisanterie, le film de Mike Judge sorti en 2007 imagine comment la bêtise va prendre le pouvoir en l’an 2505, autant sur le plan politique qu’écologique et économique.

Le héros, un militaire au QI moyen et sans grande ambition, est victime d’une expérience de cryogénisation. Laissé à l’abandon dans sa capsule, il se réveille dans un monde où plus rien ne va mais où tout le monde se marre grâce à la téléréalité et autres divertissements vulgaires qui règnent en maîtres. Une satire qui met les pieds dans le plat avec son soupçon d’humour gras pour tirer la sonnette d’alarme. [LB]

Deadpool

Impossible de ne pas faire une place à Deadpool, drôlement trash, dans ce top. Sorti en 2016 en clouant le bec à tous les puristes adeptes des films de super-héros, Deadpool est le personnage le moins fréquentable de la collection familiale Marvel mais, au prix du paradoxe, le plus irrésistible.

Audacieux avec ses “fuck” à tout bout de champ et sa violence gratuite, le film a séduit autant le public que la critique, en enchaînant les records au box-office américain : meilleur démarrage du mois, de la Fox, d’un film Rated R, de la franchise X-Men, de l’hiver. Bref, la totale. Un modèle de divertissement indémodable et décomplexé, qui rappelle que les blockbusters sont encore capables de bichonner leurs héros en leur offrant une personnalité rafraîchissante et survoltée. [LB]

The Voices

Quelle géniale idée que celle de Marjane Satrapi d’être allée chercher le sous-estimé Ryan Reynolds pour en faire un magnifique doux dingue et tueur en série malgré lui. L’acteur excelle dans ce rôle à contre-emploi et passe d’un inoffensif garçon sans ambition à un meurtrier froid et vidé de toute humanité en un battement de cils. Seule notre sympathie pour ce personnage complexe demeure, envers et contre tout.

Dans cette sorte d’American Psycho version comédie à l’ambiance cartoonesque (Marjane Satrapi n’oublie pas d’où elle vient), Ryan Reynolds incarne Jerry, un employé d’une usine de baignoires d’une petite ville industrielle américaine, qui vit dans un monde merveilleux, tout en couleurs, papillons et apparitions angéliques… lorsqu’il prend consciencieusement les médicaments prescrits par sa psychologue.

Mais lorsqu’il décide d’oublier son traitement et se met à entendre les voix de son chat maléfique Monsieur Moustache, il embrasse ses idées noires et, faisant fi du sang, de la crasse et des cadavres en décomposition, se transforme en un impitoyable tueur en série. Lorsque se termine le générique de The Voices sous forme de mini-comédie musicale improbable, on ne sait pas ce qu’on vient de voir mais on sait qu’on a aimé. [MM]

Le Loup de Wall Street

Deux ans après le gentil Hugo Cabret, Scorsese était revenu frapper fort avec sa satire financière, nouveau volet de son autopsie du rêve américain, construite sur les solides fondations de son triptyque favori : sexe, drogue et argent. Dans le Loup de Wall Street, il portait à l’écran les mémoires de Jordan Belfort, le bien réel golden boy qui a escroqué la bourse américaine.

On pensait que l’inhumanité du monde de la finance était un sujet battu et rebattu, au cinéma comme en littérature, et effectivement, rien de neuf sous le soleil : les excès y sont coutume et la morale absente. Mais grâce à son génie, Scorsese nous prouve qu’il reste encore bien des choses à raconter en nous offrant le spectacle de la pathétique ascension de Jordan Belfort et de sa chute d’autant plus vertigineuse. C’est simple mais diablement efficace.

C’est drôle aussi, grâce à un DiCaprio qui ne ménage pas ses efforts pour tourner en ridicule son personnage et à Jonah Hill, plutôt connu pour ses personnages patauds chez Apatow, qui injecte ici toute sa puissance comique au service d’un affreux personnage. De temps en temps, ce tourbillon de folie se calme pour donner toute la place à des dialogues enlevés et au talent brut de la bande à Scorsese. Le Loup de Wall Street, c’est trois heures de frénésie qui ne nous laissent aucun répit et achèvent d’écrire la légende DiCaprio. [MM]

Burn After Reading

George Clooney, Brad Pitt, Frances McDormand, John Malkovich et Tilda Swinton dans un film des frères Coen : on s’attendait aux étincelles. On ne se doutait cependant pas qu’il y aurait un tel potentiel comique en chacun de ces excellents comédiens. Rien que pour les voir prendre leur pied à se parodier, Burn After Reading vaut le détour.

Un agent de la CIA est licencié à cause son penchant pour la bouteille. Il décide alors de coucher sur le papier – ou plutôt sur CD-Rom – toute sa rancune et ses amers souvenirs, CD-Rom qui tombera entre les mains d’une employée de salle de gym désireuse de se faire ravaler la façade et d’un prof de fitness dépourvu de neurones.

Dans le genre de The Big Lebowski, où de naïfs personnages peu finauds vont se prendre au jeu du chantage de haut vol pour pimenter leur morne existence, Burn After Reading est fou sans pour autant oublier de dénoncer. Une pincée de CIA incompétente et un soupçon de culte de l’apparence au service d’une grande comédie d’espionnage qui parodie une certaine Amérique. [MM]

Jojo Rabbit

Jojo Betzler, alias “Jojo Rabbit”, est un parfait petit scout tout droit sorti de l’imaginaire de Wes Anderson, à la différence près que dans ses jolies colonies de vacances à lui, on apprend à brûler des livres et à manier la grenade.

Réaliser une farce sur le nazisme est en soi un pari audacieux, mais faire d’un petit blondinet de 10 ans au visage poupin un affreux personnage, fervent antisémite qui converse en secret avec son ami imaginaire Hitler, est véritablement osé. Si d’autres se sont frottés à cet exercice d’équilibriste avant lui, le Néo-Zélandais Taika Waititi a eu l’audace de transposer sa comédie à hauteur d’enfant et parvient à relever le défi.

Comme dans toute bonne farce, les bottes d’uniforme sont parfois de gros sabots. Mais le casting rattrape toujours le film (mention spéciale à Sam Rockwell en capitaine Klenzendorf, décidément un très grand acteur). Et les conversations entre la cynique Elsa (la révélation Thomasin McKenzie), une jeune juive cachée par la mère de Jojo, et le petit nazi qui se rencarde l’air de rien sur le bien-fondé de ses théories antisémites pour compiler ces précieuses informations dans une sorte d’encyclopédie nazie, figurent parmi les meilleurs moments du film.

Bien entendu, il y a aussi de l’horreur, comme la pendaison sur la place publique de Rosie la résistante et mère de Jojo, mais le film ne s’y attarde pas et parvient donc à maintenir la barre de son ambition de comédie de bout en bout. [MM]

M*A*S*H

Qu’on se le dise, pour bien comprendre de quoi il s’agit : M*A*S*H est l’un des premiers films américains grand public à utiliser, dans un de ses dialogues et de manière audible, le terme “fuck”. Voilà qui dit beaucoup de la façon dont son réalisateur, Robert Altman, a envisagé l’adaptation du livre MASH: A Novel About Three Army Doctors : avec une envie irrévérencieuse de tout remettre en cause, alors que les États-Unis étaient en pleine guerre du Vietnam.

Car M*A*S*H suit les tribulations de deux nouveaux chirurgiens tout juste arrivés au 4077th Mobile Army Surgical Hospital, un hôpital mobile de campagne situé… en pleine guerre de Corée. “Hawkeye” (Donald Sutherland) et “Duke” (Tom Skerritt) incarnent une rébellion face à l’autorité et aux ordres, n’hésitant jamais à enfreindre et à se moquer des règles établies dans le camp.

Robert Altman fait de M*A*S*H un brûlot politique en forme de comédie noire, tant le parallèle entre la guerre de Corée et l’actualité de la guerre du Vietnam se fait ressentir. Si les combats ne sont jamais présents, leurs conséquences à travers des scènes chirurgicales sanglantes ne sont jamais cachées. Au milieu coulent des personnages qui dynamitent l’armée comme le puritanisme américain, s’amusent du sexe et travestissent des installations militaires en parcours de golf.

Ou comment, avec génie, Robert Altman a su faire d’une histoire de guerre un appel à l’amusement, à la jouissance et à l’humour. Résultat : une Palme d’or bien méritée pour le cinéaste américain et pour un scénario que personne ne voulait. [LL]

Docteur Folamour

C’est tout simplement l’une des meilleures comédies de l’histoire du cinéma. Deux ans après Lolita, Stanley Kubrick s’offre sa première incursion dans le domaine de l’humour au cinéma, mais à travers un sujet effrayant : celui de la guerre froide. Avec Docteur Folamour ou : comment j’ai appris à ne plus m’en faire et à aimer la bombe, le cinéaste américain s’aide du roman 120 minutes pour sauver le monde pour formaliser une idée à la fois simple et angoissante, à savoir la possibilité d’une guerre nucléaire entre les États-Unis et l’URSS, à travers un général de l’Armée de l’air américaine frappé par la folie.

Si la comédie noire est la forme de ce long-métrage sorti en 1964 (repoussé alors qu’il devait sortir le même jour où… Kennedy a été assassiné), le fond abordé par Stanley Kubrick n’en est que plus réel, tant le cinéaste américain a tenu à ce que les situations soient réalistes (il a lu près de 50 ouvrages sur la guerre froide et le nucléaire) tout en dénonçant l’incapacité manifeste des hommes politiques à défendre un ouvrage autrement plus grand qu’eux, celui de la paix. [LL]

Les Nouveaux Sauvages

Une discussion en plein vol qui dégénère, un homme politique véreux qui débarque dans un restaurant, un conducteur émotif rattrapé par ses insultes, un homme face à la bureaucratie la plus crétine, une riche famille qui essaie de cacher un accident ou un jour de mariage transformé en honteux déballage : en six sketches aussi comiques qu’acides, Les Nouveaux Sauvages dresse un portrait peu élogieux de l’humanité.

Chacun peut se retrouver dans un des personnages tant les situations s’accordent à être ordinaires dans un premier temps, et sont envenimées d’une manière théâtrale dans un lâcher prise presque jouissif qui laisse entendre que l’autre, comme nous, est une véritable ordure. [LL]

Shaun of the Dead

Décembre 2004. Les zombies ne sont pas encore revenus à la mode grâce au succès monstre du soap The Walking Dead qu’un petit malin s’amuse à les brocarder. Il s’appelle Edgar Wright, c’est son deuxième film, il s’est déjà frotté à pas mal de films et séries pour la télé britannique et incorpore dans Shaun of The Dead tout son amour des séries B comme des monstres qui ne font plus vraiment peur. Sous le coude, l’histoire de Shaun et Ed, incarnés génialement par le duo Simon Pegg et Nick Frost, potes et coloc’ à la ville.

En résultent des vinyles utilisés comme des armes, un montage décalé et efficace, des scènes musicales désormais cultes (le fameux “Don’t Stop Me Now” de Queen dans un bar envahi par des morts-vivants) et un duo d’acteurs aussi perdus que peuvent l’être des zombies les bras tendus et la gueule ouverte. Six mois après la sortie du bien plus sérieux (et très bon long-métrage) L’Armée des morts de Zack Snyder, Shaun of the Dead débarque dans les salles du monde entier. 15 ans après sa sortie, il est encore un remède comique idéal lors des sombres journées de notre existence. [LL]