Du cul et du lol : voici de chouettes BD à lire pendant l’été

Du cul et du lol : voici de chouettes BD à lire pendant l’été

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Par Camille Abbey

Publié le

Érotique, drôle ou les deux ? Ça pourrait être une question du Burger Quizz mais c’est en fait le sujet de cet article spécial BD.

Petite sélection de bandes dessinées marrantes ou avec du cul – ou bien les deux – à lire en vacances, dans un parc tranquille ou chez soi (devant un ventilo).

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#1. Drôles…

Open Bar, de l’absurde à tous les étages

L’inénarrable Fabcaro nous régale à nouveau de son humour loufoque, à base de malentendus, de décalages et de détournements. Des dessins simples et des textes absurdes : voilà la recette miracle de la plupart de ses BD, toutes réussies – jusqu’à présent. Exagérations et renversements participent d’un comique toujours plus fou.

Ce génie de l’humour, ne pesons pas nos mots, distille dans ses strips, qui tiennent pour la plupart sur une page, beaucoup de dérision sur les comportements humains, souvent remplis de paradoxes. Une petite pincée de politique aussi, lorsqu’il tourne par exemple à la blague les discours des gens de pouvoir, s’amuse des militants dans les manifs ou imagine des patrons du CAC 40 qui feraient la quête dans le métro. Des grands drames de la vie aux petites stupidités du quotidien, Fabcaro parodie tout à sa sauce et propose d’irrésistibles instantanés d’incongruité. Auteur prolifique et inventif, il travaille beaucoup sur les chutes, bien souvent étonnantes.

Open Bar, de Fabcaro, a été publié en avril 2019 aux éditions Delcourt.

Politique, de l’humour noir acide

Mazen Kerbaj est un peintre, dessinateur et musicien libanais. Dans son dernier roman graphique, composé de petites histoires courtes, tout est politique mais surtout tout est drôle et satirique. Il n’épargne personne dans son portrait acide et sans concession de son pays, le Liban, qu’il représente dans toutes ses contradictions. À l’aide de ses seules planches sur une page, il parvient à faire rire avec des sujets dramatiques : la censure, la guerre, les désastres écologiques…

Il décrit, par le biais de strips percutants sur un quotidien parfois très dur, une situation post-guerre civile, faite de clans, de factions, de réfugiés… On trouve à la fois des blagues sur des expatriés mélancoliques mais aussi des moqueries acerbes sur les traitements inhumains souvent infligés par les grandes bourgeoises aux employées de maison sri-lankaises.

L’auteur manipule, avec ironie et finesse, des thèmes explosifs mais à chaque fois… ça passe. Il joue avec le feu et ça n’en est que plus jouissif. Ses petites histoires au cynisme libérateur peuvent paraître provocantes mais elles sont surtout diablement efficaces.

Politique, de Mazen Kerbaj, a été publié en mai 2019, aux éditions Actes Sud BD.

#2. … De cul

Sous le lit, une histoire d’amour, d’amitié et d’affirmation de soi

Valentin a 19 ans et vit avec sa mère. Au cours d’une soirée, il rencontre un homme qui lui plaît et avec qui il va passer la nuit. Dans le brouillard, à cause de l’alcool et du désir, il est ensuite incapable de se rappeler si son partenaire a mis un préservatif. Dans l’attente du dépistage, il vit un amour naissant, et doit en même temps faire face à une inquiétude permanente qui le ronge. Il est certes question de sexe, d’amour et de plaisir mais aussi de risques et de protection. L’auteur, Monsieur Q (Quentin Zuitton), célèbre notamment pour ses dessins de presse, a publié cette BD à ses débuts mais elle vient seulement d’être rééditée.

Dans Sous le lit, son coup de crayon vif et brut donne aux personnages de grands yeux sombres, emplis d’excitation, d’espoir mais aussi de craintes. La période décrite est celle de l’euphorie des découvertes et des prémisses de l’amour. Pendant l’été et son émoustillement contagieux, n’oubliez pas de vous protéger – ça vaut aussi pour le reste de l’année.

Sous le lit, de Quentin Zuitton, a été publié en juin 2019 (réédition), aux éditions Lapin.

Le Vagin, une histoire de vagins connectés

Dès le titre, on sait de quoi il retourne : il va être question du sexe féminin. Le vagin est le cœur de cette bédé aux accents comiques. Polly Amorous, artiste burlesque, vit à Brooklyn, et mène une vie sexuelle débridée. Molly Morris, à Oakland, dirige un café et est en couple avec une femme qui souhaite avoir un enfant. Mais ces deux femmes, qui ne se connaissent pas, ne sont pas parfaitement épanouies. Leur destin est pourtant intimement lié. Dans cette histoire complètement barrée, leurs vagins sont connectés.

Cette bédé frôle parfois le mauvais goût et atteint souvent le grossier mais ces excès sont libérateurs et on adore ça. Le mantra : vivez comme vous l’entendez, ne vous attardez pas sur le regard des autres.

Le Vagin, de Jason Little, a été publié en juin 2019, aux éditions La boîte à bulles.

#3. Les deux

Tout cul nul, des ébats qui foirent

Sous forme de strips, sur une ou deux pages, on découvre le pire des ébats sexuels, des petites maladresses aux grandes foirades. Toutes les fois où on a été minables au lit, un peu maladroits ou même complètement nuls. Les deux autrices, Anne Baraou et Fanny Dalle-Rive, ont recueilli des anecdotes un peu partout pour rendre ces petits moments de gêne plus vrais que nature.

Dans une société où la performance est obligatoire, et ce dans tous les domaines, cela fait du bien de voir les petites faiblesses de chacun. Ces saynètes toujours très cocasses permettent en effet de désacraliser le sexe par le rire. La jouissance est une quête semée d’embûches, qu’il vaut mieux prendre à la rigolade.

Tout cul nul, de Anne Baraou et Fanny Dalle-Rive, a été publié en juin 2019, aux éditions Cornélius.

Maléfiques, quand les sorcières modernes complotent

Cette bande dessinée fraîche et bienfaisante de Nine Antico donne à voir les discussions de trois femmes aux personnalités hautes en couleurs qui conversent dans un salon. L’une déplore avoir la chlamydia et s’est donc acheté toute une collection de godes pour pouvoir vivre en autarcie, tandis que l’autre parle de sodomie à tout va. Elles discourent sur le porno de manière tout à fait décomplexée. Comme un running gag, à la fin des strips, faute de mieux, elles en arrivent souvent à la conclusion qu’il faut en mater.

Les dessins sont très beaux – les personnages colorés et flashy se détachent sur fond noir –, les dialogues sont vifs et facétieux et le propos très libérateur sur le cul, sur les aléas de la condition de femme, et trentenaire qui plus est. Les petits détails intimes qui sont généralement cachés sont ici révélés avec déculpabilisation et humour. Les piles dans les godes qui sont déchargées, plus d’accès à Internet alors qu’on se masturbe… On assiste aussi à une réunion “Tupperware” de sex-toys, “je vais amener l’orgasme dans tous les foyers !”, clame l’une d’elles.

Beaucoup d’autodérision aussi, notamment lorsqu’elles se moquent du yoga et des caricatures qu’elles-mêmes représentent. Elles chahutent l’une d’entre elles qui serait passée du côté obscur : elle est abonnée au yoga, va bientôt faire des selfies avec son pied sur sa tête, bouffer sans gluten et refaire un gosse pour le plaisir d’accoucher sans péridurale.

Cette BD générationnelle et moderne, sur le cul aujourd’hui vu à travers un prisme féminin, dévoile des discussions entre femmes, les sorcières de notre époque, les “maléfiques”, sans filtre, décomplexées et drôles. Et si la nouvelle révolution sexuelle passait par là ? Pouvoir tout dire et en rire.

Maléfiques, de Nine Antico, a été publié en juin 2019, chez L’Association.