Par facilité, on réduit souvent les Marseillais et les Provençaux à leur attrait présumé pour le pastis. Si cela tient naturellement du stéréotype, il est un autre cliché, peut-être bien plus légitime et enfermé dans un pot de terre cuite, que l’on pourrait leur accoler. Et pour cause, là-bas, les yaourts La Fermière sont, avec quelques autres trésors locaux, l’un des emblèmes de l’artisanat culinaire provençal. À tel point qu’aujourd’hui, cette petite aventure confidentielle, née à Aubagne en 1952, est en passe de conquérir le monde, ou presque.
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© Agathe Hernandez
Depuis qu’elle a repris les rênes de l’entreprise, en 2002, la famille Tarpinian (Jean-Jacques et ses deux filles Laura et Tina) n’a eu de cesse de vouloir “faire grandir la marque, tout en préservant ses valeurs : entreprise familiale, où je connais tous mes collaborateurs ; fabrication de produits de qualité ; ingrédients de qualité ; savoir-faire hors pair”, explique le père, Jean-Jacques. Un pari réussi pour la marque, connue pour son packaging bien à elle – un pot en grès. Aujourd’hui, tout le lait utilisé dans les yaourts de La Fermière est issu de petites fermes dans les Alpes, à proximité de ses ateliers. “Depuis toujours, nous accompagnons nos producteurs afin de leur permettre d’obtenir une juste rémunération de leur travail. C’est notre engagement”, poursuit-il.
Mais depuis trois ans maintenant, la famille Tarpinian s’est lancée dans un nouveau défi de taille : conquérir d’autres marchés en Europe et dans le monde, dont le marché américain. Une lubie ? Pas vraiment. “J’ai toujours été attiré par les États-Unis – mes filles sont d’ailleurs moitié américaines –, et j’ai toujours pensé que notre produit intéresserait les Américains, car nous proposons quelque chose de différent, d’authentique et de ‘vrai'”. À titre de comparaison, en 2020, six millions de pots ont été vendus aux États-Unis. L’entreprise mise sur le double pour l’année 2021. Un succès dont la presse économique française s’est fait le relais, bien sûr, mais également certains grands titres américains, comme le New York Magazine.
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Exporter le savoir-faire
Reste une question : comment reproduire un approvisionnement local et un modèle de fabrication artisanal à plusieurs milliers de kilomètres des ateliers d’Aubagne ? Et comment les faire respecter ? Les contrôler ? “Rien ne change, absolument rien, dit Jean-Jacques Tarpinian. Rien, car nous avons dupliqué notre process et nos méthodes de fabrication artisanales, comme sur nos lignes, pour obtenir exactement la même qualité.”
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Seule différence notable, dans les ateliers américains, situés près de New York, le lait ne provient pas des Alpes mais des fermes laitières locales environnantes. “Quant au contrôle, nous avons en permanence une équipe d’encadrement : les responsables de production de notre site français se déplacent chacun à tour de rôle pour assurer la production aux États-Unis et veiller au bon fonctionnement des procédés. Et puis, évidemment, nous avons aussi une petite équipe déjà installée sur place et qui s’occupe de sillonner les États-Unis pour nous faire connaître.”
“Nous avons reçu un excellent accueil aux États-Unis. Ils adhèrent à l’idée de ‘gourmandise à la française’ et donc à nos recettes qui sont à la fois simples et authentiques, ajoute-t-il. Mais détrompez-vous : les Américains n’ont pas des goûts si différents des nôtres. Leurs goûts évoluent avec ce qu’on leur propose. Ils sont en réalité très ouverts à la nouveauté”. Si rien n’a changé en termes de confection et de fabrication, quelques recettes ont toutefois dû être adaptées ou retravaillées. “C’est vrai qu’il y a des recettes que l’on a créées seulement pour les États-Unis, car elles marchent très bien là-bas. C’est le cas des ‘bicouches’ par exemple : pineapple/coconut, mango/passion fruit…”
C’est pas les States, non, c’est Aubagne bébé.
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