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De X-Files à American Gods, célébrons la magnificence de l’iconique Gillian Anderson

De X-Files à American Gods, célébrons la magnificence de l’iconique Gillian Anderson

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Par Delphine Rivet

Publié le

Même quand on a une culture sérielle proche de zéro, le nom de Dana Scully est évocateur. Mais Gillian Anderson, c’est tellement plus qu’un rôle emblématique… D’ailleurs, on en a retenu cinq !

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Vous n’avez pas pu la louper dans la dernière production Netflix, Sex Education. Gillian Anderson y campe la mère d’Otis, une sexothérapeute un peu intrusive avec son fils, mais libre et parfaitement en phase avec ses désirs. Elle en a fait du chemin, l’actrice américano-britannique, depuis les tailleurs mal fagotés de Dana Scully.

Véritable icône sérielle, l’actrice a une carrière jalonnée de rôles emblématiques. Des choix raisonnés, souvent audacieux ou avant-gardistes, qui démontrent à chaque fois l’étendue du talent de Gillian Anderson. Ce fut dur, mais on en a retenu cinq.

#1 Dana Scully dans The X-Files (1993-2018)

© FOX

“D’abord, je m’étais juré de ne jamais déménager à Los Angeles, et quand j’ai finalement déménagé, j’ai juré que je ne ferai jamais de télévision.” Extrait de The Official Gillian Anderson Website.

Fort heureusement, Gillian Anderson n’a pas tenu sa promesse. Ironiquement, c’est la télévision qui lui a donné ses plus beaux rôles. Après avoir fait ses armes dans des productions théâtrales et le petit film indé The Turning en 1992, elle se retrouve au chômage pendant presque un an. Elle regagne heureusement le chemin des auditions et accepte de lire un script pour un projet de série qui va la captiver. Elle a alors 24 ans et décroche le rôle de l’agente du FBI Dana Scully dans une production de science-fiction pour la FOX, The X-Files.

Le network n’était pas très chaud pour engager cette jeune actrice sans expérience à la télé, et aurait préféré une interprète “taller, leggier, blonder and breastier”. “Plus grande, avec des jambes plus longues, plus blonde et avec une plus grosse poitrine” : coucou le sexisme. Mais Chris Carter, le créateur de la série, se battra bec et ongles pour imposer son choix. Il croit en elle, et lors des lectures du script, l’alchimie avec son partenaire à l’écran, David Duchovny dans la peau de Fox Mulder, est indéniable. Vingt-cinq ans après, cette complicité est d’ailleurs toujours au beau fixe.

En janvier 2016, alors que David Duchovny inaugurait son étoile sur le Hollywood Boulevard, Gillian Anderson, qui n’avait pas pu être présente, lui a envoyé… un éloge funèbre :

“C’était un homme gentil. Assez intelligent. Il aimait l’avocat et les pilates. Acteur, auteur, ami. Il sera toujours ma star. Que son âme trouve le pardon et repose en paix.”

Avec Dana Scully, qu’elle a interprétée durant onze saisons et deux films, Gillian Anderson incarnait un personnage en avance sur son temps. Elle n’était pas définie par son statut marital, ni par son rapport aux hommes. Elle était l’égale de son homologue masculin Fox Mulder. Mieux encore, elle avait une double casquette puisqu’elle était médecin. Donc c’est docteure Dana Scully pour vous, merci bien.

À l’époque, les “cop shows” – car si X-Files tissait sa toile SF au fil des saisons, la structure de la plupart des épisodes reprenait celle des séries policières – mettaient surtout en avant des duos masculins. Dana Scully, elle, cassait les stéréotypes genrés en personnifiant la raison, le pragmatisme. Elle était la sceptique du duo, un rôle plus souvent dévolu aux hommes, tandis que Mulder interprétait le “believer”, le croyant. Les héroïnes de séries d’aujourd’hui, en particulier dans la SF ou les séries policières, lui doivent beaucoup.

#2 Stella Gibson dans The Fall (2013-2016)

Après une petite traversée du désert (disons plutôt : sans rôle véritablement marquant, puisqu’elle n’a pas cessé de travailler), Gillian is back avec une partition à la mesure de son talent avec The Fall. Elle y incarne la commissaire Stella Gibson, lancée aux trousses de Paul Spector (Jamie Dornan), un serial killer misogyne sévissant à Belfast. Après Dana Scully, personnage qui brisait déjà les stéréotypes de genre, Gillian Anderson est comme un poisson dans l’eau avec Stella Gibson. “Unapologetic” comme diraient les Ricains, elle ne s’excuse ni de commander des hommes ni d’avoir une sexualité.

Ça l’air idiot dit comme ça, mais c’est un double standard : personne ne remet jamais en question l’autorité ni les frasques sexuelles de ses homologues masculins, ce qui est hélas bien plus rare quand ce sont des personnages féminins. L’incroyable performance de Gillian Anderson, toute en force et en empathie, a injustement été snobée par les grandes cérémonies d’awards, mais qu’importe ! Les répliques de cette héroïne férocement indépendante sont autant de potentiels mèmes féministes à sortir en toutes circonstances :

“Les médias adorent diviser les femmes en catégories : les vierges et les allumeuses, les anges et les putains. Ne les encourageons pas.”

“Un homme baise une femme. Sujet : un homme ; verbe : baiser ; objet : une femme. OK. Une femme baise un homme. Une femme : sujet ; un homme : objet. Ça vous met mal à l’aise, n’est-ce pas ?”

“Une femme, je ne sais plus qui, a un jour demandé à un ami pourquoi les hommes se sentaient menacés par les femmes. Il lui a répondu qu’ils avaient peur qu’elles se moquent d’eux. Quand elle a demandé à des femmes pourquoi elles se sentaient menacées par des hommes, elles ont répondu : ‘On a peur qu’ils nous tuent.'” Stella Gibson reprend ici à son compte une célèbre citation de Margaret Atwood, autrice de The Handmaid’s Tale.

#3 Bedelia du Maurier dans Hannibal (2013-2015)

© NBC

On aurait pu écrire un paragraphe entier sur la classe absolue de Bedelia mais on n’est pas là pour parler chiffons, paraît-il. Tant pis, ce sera pour une autre fois. Si Gillian Anderson ne tient pas la tête d’affiche, trustée – et ils sont tout excusés –, par la relation vénéneuse entre Hannibal Lecter et Will Graham, elle rayonne à chacune de ses apparitions.

Bedelia du Maurier est un personnage créé spécialement pour la série par Bryan Fuller. Il s’est inspiré d’un personnage de Creepshow pour le prénom, et en grand fan d’Alfred Hitchcock, a emprunté le patronyme de Daphne du Maurier, l’autrice de la nouvelle, devenue chef-d’œuvre du grand écran, Les Oiseaux. Il avait d’abord imaginé confier ce rôle à une femme plus âgée, la légendaire Angela Lansbury (éternelle Jessica Fletcher d’Arabesque). Mais l’agenda de cette dernière n’étant pas compatible avec celui du tournage d’Hannibal, le showrunner a finalement choisi Gillian Anderson pour incarner la psy du serial killer et a réécrit le script pour elle.

Hannibal est une telle merveille de noirceur, d’une beauté oppressante, avec des personnages si complexes et tordus à souhait, qu’on aurait pu passer à côté de Bedelia du Maurier. C’était bien sûr sans compter sur l’écriture affûtée de Bryan Fuller et l’interprétation éthérée et tout en grâce de Gillian Anderson, qui en ont fait un personnage absolument fascinant et probablement le plus mystérieux du lot. Brillante et vulnérable, manipulatrice ou manipulée, avec un incroyable instinct de survie… Même au quatrième visionnage d’Hannibal, on n’a toujours pas percé les secrets de Bedelia.

#4 Media dans American Gods (2017-)

© Starz

Une performance caméléon avec quatre rôles pour le prix d’un ! C’est une nouvelle fois Bryan Fuller qui lui fait ce cadeau. Gillian Anderson y incarne trois figures de la pop culture anglo-saxonne : Lucille Ball (productrice et pionnière de la télévision avec sa sitcom I Love Lucy dans les années 1950), David Bowie période Ziggy Stardust, l’icône glamour Marilyn Monroe, et Judy Garland, éternelle Dorothy du Magicien d’Oz. Media est en quelque sorte la porte-parole des nouveaux dieux et déesses, elle diffuse leurs messages sur tous les canaux.

La moindre apparition de Gillian Anderson dans American Gods est un événement et sa ressemblance troublante avec les symboles qu’elle incarne est commentée en long, en large et en travers sur les réseaux sociaux. Choisir les visages de Media fut un effort collectif, fortement inspiré par Gillian Anderson elle-même. Si Bryan Fuller et Michael Green, les showrunners, ont toujours eu dans l’idée de la faire d’abord apparaître dans la peau de Lucille Ball, c’est en exhumant de vieux clichés de Gillian Anderson déguisée comme la star d’I Love Lucy, que tous leurs doutes se sont dissipés.

“Marilyn, c’était une suggestion de Gillian, et Judy Garland est venue après une conversation où on se demandait quelle serait la personne la plus appropriée pour la grande entrée de Media au manoir d’Easter” a déclaré Bryan Fuller dans Indiewire.

#5 Miss Havisham dans Great Expectations (2011)

© BBC

Puisqu’on vous a parlé de ses rôles les plus iconiques, on a eu envie de vous faire découvrir une petite pépite, méconnue, dans laquelle l’actrice n’est pas la tête d’affiche mais brille dans l’exercice : Great Expectations, ou Les Grandes Espérances en français, adaptée par la BBC. Lady Gillian Anderson a déjà beaucoup de “period dramas” à son actif. De Bleak House (2005), à Any Human Heart (2010), en passant par The Crimson Petal and the White (2011), elle a usé plus de robes à crinoline et de perruques qu’elle ne saurait en compter.

Dans cette énième adaptation du grand classique de la littérature britannique, écrit par Charles Dickens et publié en 1861, Gillian Anderson interprète Miss Havisham, la bienfaitrice du héros, Pip. Une anti-héroïne iconique et captivante, manipulatrice, désespérée, tragique et rongée par son désir de vengeance, à laquelle Gillian Anderson, bien plus jeune que le personnage, a insufflé un côté presque juvénile par moments. Si après l’avoir vue dans ces cinq rôles emblématiques, vous n’êtes pas convaincu·e·s de la magnificence de cette actrice, on ne peut plus rien pour vous !

Vous pouvez aussi admirer Gillian Anderson dans Sex Education, dont la saison 1 est actuellement sur Netflix.