The Bold Type s’achève sur une saison 5 terne, rattrapée par un joli final

The Bold Type s’achève sur une saison 5 terne, rattrapée par un joli final

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©Freeform

L’heure des adieux est arrivée pour Kat, Sutton et Jane.

Lancée en 2017 par Sarah Watson, quelques mois avant la déflagration #MeToo, The Bold Type est vite devenue notre bouffée d’air frais féministe favorite. Une utopie dans laquelle il faisait bon se perdre, en compagnie des trois copines vingtenaires Sutton (Meghann Fahy), Jane (Katie Stevens) et Kat (Aisha Dee). Toutes trois employées chez Scarlet Magazine, dirigée par la meilleure rédactrice en cheffe de l’histoire des séries, Jacqueline Carlyle (Melora Hardin), elles apprenaient respectivement les ficelles du métier de styliste, journaliste et community manager.

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Durant cinq saisons, dont la dernière vient de s’achever le 30 juin dernier sur Freeform, on a assisté aux évolutions de ces trois femmes, à leurs moments de doutes, à l’affirmation de leurs convictions, à leurs victoires et leurs échecs… C’est donc avec une émotion particulière que j’ai lancé cette cinquième saison, qui allait clore les aventures de ces héritières de Sex and the City, ces millennials “du genre audacieuses” (traduction de “the bold type”, également une référence à la typo “en gras” dans le journalisme) déjà rattrapées par la génération Z.

Comme nombre de productions sérielles, The Bold Type a été impactée par la pandémie. Sa saison 4, qui devait initialement compter 18 épisodes, a été réduite à 16 épisodes. Et la saison 5 se compose de six petits épisodes, quand une saison habituelle pour la série tournait à dix épisodes. Est-ce pour cette raison que cette cinquième saison ne tient absolument pas la route côté scénario ? C’est évidemment un facteur à prendre en compte, tout comme l’irrégularité de la série, qui a connu trois showrunneuses différentes au cours de sa diffusion (Sarah Watson sur la saison 1, Amanda Lasher sur les saisons 2 et 3, et Wendy Straker sur les saisons 4 et 5). Voilà qui n’aide pas à maintenir une ligne directrice claire.

À travers les dilemmes de ses héroïnes, The Bold Type avait fait des questionnements féministes, notamment dans le milieu des médias, son ADN. On peine à le retrouver dans une cinquième livraison qui semble n’avoir pour seul enjeu que d’assurer les adieux de ses héroïnes. En témoigne la trajectoire précipitée de Jane à Scarlet. Alors que la journaliste fait face à ses premiers challenges avec sa verticale, “The Failing Feminist”, Jacqueline lui propose de la remplacer, persuadée qu’elle est “le futur de Scarlet”.

On a du mal à croire à un si gros bond en avant (on ne passe pas comme ça de la gestion d’une équipe de 3 personnes à 50 personnes), qui cache en fait un twist final pour le coup plutôt réussi. Après la défection inattendue de Jane, qui effectue un choix pour le moins audacieux en décidant de ne pas accepter ce job en or, mais aussi de quitter Scarlet pour voyager, Jacqueline réalise que Jane n’est pas le futur de Scarlet, en revanche, Kat l’est. Comment souvent dans The Bold Type, cette dernière possède la trajectoire la plus intéressante.

Le futur de Scarlet

Si, côté love, ses retrouvailles avec Adena sont un peu attendues (ça fait tout de même plaisir de voir ces deux-là réunies !), la jeune femme va finalement quitter The Bell et son job de serveuse/podcasteuse après avoir lancé le mouvement #DontTurnAway, destiné à ouvrir les yeux du grand public sur les discriminations subies par les femmes en voie de réinsertion après avoir purgé une peine de prison.

Dans un double twist précipité, Kat se voit proposer dans un premier temps un retour au bercail par Jacqueline, avec l’opportunité de monter sa propre verticale chez Scarlet, avant que la défection de Jane n’ouvre les yeux de la rédac cheffe. C’est Kat, la personne créative, douée avec les chiffres et capable de rendre virales des causes qui lui sont chères, tout en slalomant avec les contraintes marketing. Cet arc aurait mérité un développement sur plusieurs épisodes, et pas un rebondissement orchestré en quelques minutes chrono.

Le choix final de prendre Kat comme nouvelle rédactrice en cheffe de Scarlet peut sembler peu crédible (elle avait été licenciée en saison 4 par la firme, après avoir exposé le soutien d’un membre du conseil d’administration aux thérapies de conversion) mais il s’avère symboliquement fort. La scène où Jacqueline s’excuse auprès de Kat, et lui explique qu’elle a soutenu Jane dans un premier temps parce qu’elle cherchait quelqu’un qui “lui ressemble”, illustre un des travers du métier de journaliste. Les managers ont tendance à aller vers des personnes qui partagent leur même vision et façon de faire.

Mais pour raconter au mieux l’actualité, un média doit faire entendre toutes ses voix. L’heure est au changement de perspective, à l’engagement. Or le personnage de Kat, une femme queer et métisse, activiste et experte des réseaux sociaux, représente à elle seule ce fameux futur. Elle est cette voix différente et passionnante, et qui illustre aussi la montée en puissance du métier de community manager.

Le dernier épisode rattrape une saison à peine passable, qui voit Jane pratiquer une nouvelle forme de journalisme un peu fantasmée (le “moi je” à la Carrie Bradshaw) ou encore faire preuve d’une sacrée absence de déontologie (la scène surréaliste où, pour convaincre une source de se confier, elle s’étend sur le crush qu’elle a développé pour un de ses journalistes…). La plupart du temps centrée sur elle (là où Kat développe des projets pour aider les autres femmes), Jane est au final le personnage le moins attachant du trio. Sutton, elle, traverse une mauvaise passe, mais sa dépression et son potentiel alcoolisme sont traités beaucoup trop rapidement, comme si le temps pressait. En deux rendez-vous chez sa psy, le problème est réglé et Richard est de retour !

À ses débuts en 2017, la série maîtrisait l’art (difficile) des scènes très courtes qui s’enchaînent mais disent le principal sur la situation. Ce n’est plus le cas dans cette saison 5, où les séquences s’enchaînent à un rythme effréné, qui ne laisse aucun répit au public et à ses personnages. Trop occupés à boucler les histoires pro et perso en cours de leurs trois héroïnes, les scénaristes ont oublié d’aborder de nouveaux sujets. Par exemple, le fait que Kat hésite à revenir à Scarlet (on la comprend !) et s’interroge sur le fait que son activisme soit compatible dans une boîte comme Scarlet est balayé d’un revers de la main, tout comme un début de débat entre Sutton et Oliver sur la responsabilité écologique des marques de mode.

En saison 5, la série a perdu de belles occasions de nous faire réfléchir à des sujets qui agitent la sphère féministe actuelle – le feminist washing, le cyberharcèlement, l’intersectionnalité, la transphobie, etc. La faute au Covid peut-être (qui aurait aussi pu être abordé d’un point de vue féministe, la pandémie ayant fait reculer l’égalité femme-homme) et à un manque d’inspiration, à des héroïnes millennials moins audacieuses qu’avant ? Il était peut-être temps finalement que Sutton, Jane et Kat passent la main. La relève féministe arrive, celle de la génération Z, très peu mise en avant dans la série. On espère en tout cas que The Bold Type, bien qu’imparfaite, aura su inspirer de nombreuses femmes à travers le monde, et que des héritières lui succéderont.

En France, The Bold Type est diffusée sur Amazon Prime Vidéo.