La question de la représentation des minorités et des opportunités qu’on leur offre dans l’industrie hollywoodienne est de plus en plus mise sur le devant de la scène. Et qui de mieux pour parler des discriminations envers les acteurs gays que les premiers concernés ? Mais même au sein de la communauté, les avis divergent quant à savoir s’il faut, oui ou non, permettre à des acteurs hétéros de jouer des personnages homosexuels.
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Le débat est vif, et Neil Patrick Harris a récemment donné son point de vue sur le sujet. Dans le journal anglais The Times, l’acteur actuellement à l’affiche de It’s a Sin, la mini-série de Russell T. Davies sur la crise du sida en Grande-Bretagne dans les années 1980, assume sa position :
“Il y a quelque chose de sexy dans le fait de caster un acteur hétéro pour jouer un rôle gay, s’il se donne vraiment la peine de s’investir, explique-t-il. Dans le monde dans lequel on vit, tu ne peux pas être réalisateur et demander à un acteur s’il est gay. Qui peut vraiment juger si quelqu’un est assez gay ?”
Ce n’est en tout cas pas l’avis de son showrunner, Russell T. Davies, qui milite depuis longtemps sur la question et pense que l’on devrait réserver les rôles gays aux acteurs concernés. Il a récemment déclaré à Radio Times :
“Je crois fermement que, lorsque je caste quelqu’un pour une histoire, je le caste pour jouer un amoureux, un ennemi, un addict, un criminel ou un saint… Pas pour ‘jouer les gays’ parce que ‘jouer les gays’ consiste juste à performer tout un tas de codes. Il s’agit d’authenticité.”
Invité sur la BBC il y a quelques jours, il explicitait sa pensée, insistant sur le fait que, dans un monde idéal, il n’y aurait pas besoin de compenser une iniquité dans l’offre de rôles.
“Il y a toujours cette présomption qu’il existe un pied d’égalité, que c’est du 50-50, que l’on caste 50 acteurs hétéros et 50 acteurs gays, mais ce n’est pas le cas.”
Le scénariste à qui l’on doit les séries Torchwood, Queer as Folk ou encore, plus récemment, Years and Years, a très souvent mis en avant le travail d’acteurs gays comme John Barrowman ou encore Russell Tovey. Mais il a aussi permis, par le passé, à des hommes hétéros de s’emparer de rôles queers. Ce fut le cas de Gareth David-Lloyd, qui jouait Ianto dans Torchwood.
Ce dernier, considérant que les remarques du scénariste venaient remettre en cause une partie de son travail passé, a récemment critiqué les propos de Russell T. Davies dans un tweet : “La sexualité de Ianto était complexe, mais c’est intéressant parce que j’ai décroché ce rôle en partie grâce à la force d’un personnage gay que j’avais joué dans Mine All Mine de Russell T. Davies. Mais j’imagine qu’on fait tous des erreurs”, a-t-il ironisé.
Le showrunner a immédiatement pris contact avec Gareth David-Lloyd pour clarifier ses propos. L’acteur est ensuite revenu, pour le site Metro, sur son tweet “grognon” comme il le dit lui-même, et a tenu à mettre fin au débat :
“Ce qu’il essayait d’accomplir dans cette interview c’est, en gros, d’appeler l’industrie à équilibrer les chances et à donner aux acteurs gays plus d’opportunités, et je suis parfaitement d’accord avec ça. Absolument, les acteurs gays doivent être considérés en premier pour jouer des personnages gays.”
Le dernier en date à s’être exprimé sur la question, c’est l’acteur de Bridgerton, Jonathan Bailey, pour le site Digital Spy. Lui aussi est pour qu’on laisse la priorité aux personnes concernées, car si le peu de personnages LGBT à la télé ou au cinéma est confié à des interprètes hétéros, qui ont déjà tous les autres types de rôles, que leur reste-t-il ?
“Les hommes ouvertement gays ne jouent pas des personnages principaux hétéros. Le fait que beaucoup d’hétéros aient joué des rôles gays iconiques et aient reçu des ovations pour ça, c’est très chouette, c’est important de raconter ces histoires. Mais est-ce que ce ne serait pas formidable de voir des hommes gays jouer leur propre expérience ?”