Un prestidigitateur émérite vient prêter main-forte aux forces de l’ordre dans ce procedural léger, rythmé et détente.
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Faire du neuf avec du vieux est le credo préféré des networks américains (CBS, NBC, The CW…). Leur marque de fabrique, c’est le procedural, un des genres les plus traditionnels et surexploités de la télévision. Si tout le monde connaît les noms de New York, police judiciaire ou encore Les Experts, les scénaristes contemporains essaient d’innover en agrémentant le procedural d’un twist inattendu.
Mentalist avec un homme aux dons d’observation extraordinaires, Limitless avec sa pilule de NZT pour devenir un génie, Numb3rs avec son génie des mathématiques… L’élément perturbateur se résume souvent à un conseiller expert propulsé dans le monde du crime drama. Deception, la nouvelle production d’ABC, n’échappe pas à la règle en exploitant les talents d’illusionnistes de Cameron Black, un magicien engagé par le FBI pour résoudre des enquêtes où prestidigitation et réalité se confondent.
Sorte de Hoodini 2.0 ultramédiatisé, Cameron Black cache en réalité un frère jumeau, Johnny, qui l’aide à préparer ses tours les plus spectaculaires et invraisemblables, comme se téléporter d’une ville américaine à une autre. Mais un soir, Johnny se fait rouler dans la farine par une autre illusionniste talentueuse et est accusé de meurtre. Son secret révélé aux yeux de ses plus grands fans, Cameron va tenter de sauver son frangin en lavant son nom et en découvrant l’identité de cette magicienne machiavélique avec le bureau fédéral.
Magique système
Format du procedural oblige, chaque épisode de Deception met en scène l’enquête d’un crime impliquant l’utilisation d’un tour de magie, que Cameron doit décortiquer pour mieux identifier et piéger son adversaire. Charismatique et motivé, Jack Cutmore-Scott (Dunkerque) est un Simon Baker en puissance qui correspond parfaitement à l’archétype du héros du genre. Autour de lui gravitent des têtes connues du petit écran (Amaury “Sucre” Nolasco de Prison Break, Ilfenesh Hadera de Chicago Fire et Billions) qui n’ont jamais brillé par leur partition mais font le job.
Les personnages secondaires sont construits autour de clichés désuets (Mike Alvarez est un comic relief, Kay Daniels une femme brisée par la perte d’un être cher) qui sont rapidement balayés par le rythme soutenu de l’intrigue. Si une vanne sur deux fonctionne, Cameron multiplie les tours de passe-passe pour mieux les déconstruire et nous révéler la “tromperie” (la traduction de deception) derrière ces phénomènes à première vue surnaturels. On est loin du Prestige de Christopher Nolan, mais la série est fun et suffisamment bien produite pour ne pas gâcher notre plaisir.
Chaque affaire se trouve toujours à la limite du burlesque, voire du “jump the shark”, mais le second degré des personnages, le ton léger et feel good de la série suffisent à nous faire accepter ces histoires abracadabrantes. Contrairement à la franchise filmique Insaisissables de Summit Entertainment, qui succombe au trope maléfique du boniment, plus communément appelé “ta gueule, c’est magique” dans la sphère du jeu de rôle, Deception lève le voile sur ses illusions en mettant au jour les procédés mécanique et autres fourberies qui se cachent derrière la “magie”, ce qui fonctionne à l’écran et dans la narration.
On saluera notamment la tromperie de l’avion disparu se déroulant dans le pilote, réalisé par David Nutter (l’homme qui a mis en scène le “Red Wedding” de Game of Thrones, s’il vous plaît), mais on ne spoilera pas davantage. Un coup complètement barré, mais d’autant plus jouissif à décrypter avec Cameron.
Deception se situe dans la droite lignée du 9-1-1 de Ryan Murphy : un vrai plaisir coupable. Une série loin d’être originale et exempte de défauts, mais suffisamment spectaculaire et attachante pour nous distraire et nous faire respirer après un visionnage boulimique de Marvel’s Jessica Jones ou Channel Zero.
En France, Deception sera diffusée courant 2018 sur TF1.