En septembre 2017, Banksy partageait sur son compte Instagram un dessin critiquant la marchandisation de l’œuvre de Jean-Michel Basquiat. Le street artiste britannique réagissait à l’annonce d’une grande rétrospective organisée autour de Basquiat au Musée Barbican de Londres.
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Banksy a toujours refusé que le public paye pour voir ou acquérir ses œuvres et qu’elles soient enfermées dans des musées. Pour Banksy, voir une institution exposer les travaux de Basquiat revient donc à faire de son art, pourtant destiné à la rue, une marchandise.
Un dessin critique
Afin de condamner cette marchandisation, Banksy avait réalisé il y a trois ans un dessin montrant une grande roue dont les cabines sont remplacées par des couronnes à trois pics, motif récurrent du travail de Basquiat.
Un adulte et des enfants sont représentés en train de faire la queue pour payer leur entrée dans l’attraction. En légende, le street artiste anonyme écrivait : “Une grande exposition dédiée à Basquiat débute au Barbican, un endroit habituellement plutôt enclin à effacer les graffitis sur ses murs.” Ainsi, il dénonçait l’hypocrisie des musées, qui ne verraient le street art comme un art à part entière seulement lorsqu’il rapporte de l’argent.
Un comble
Trois ans plus tard, le serpent se mord à nouveau la queue, puisque le dessin dénonciateur de Banksy, baptisé Banksquiat, s’est retrouvé mis aux enchères par la maison Tate Ward. L’artiste n’a pas fait de commentaire sur son compte Instagram, son seul réseau social, mais cette vente entre en contradiction totale avec sa logique artistique – lui qui lègue ses œuvres à la postérité des murs du monde ou à des bonnes causes.
Cela n’est cependant pas la première fois que le marché de l’art contemporain s’empare de son travail et de ses prises de position. En effet, ses œuvres battent régulièrement des records lors de ventes aux enchères.
En octobre 2019, son tableau Devolved Parliament était vendu 11,1 millions d’euros, explosant les estimations des spécialistes qui pensaient le voir partir entre 1,6 million d’euros et 2,25 millions d’euros. Ironie du sort, lors de cette vente, une toile de Basquiat était également vendue à un prix record.
Le soir même, Banksy avait réprouvé cette vente sur son compte Instagram, regrettant le fait de ne plus être en possession de Devolved Parliament. Agrémenté d’une citation du critique d’art Robert Hughes, il déplorait encore la marchandisation – à des prix astronomiques – de l’art et de la culture :
“L’art devrait nous rendre plus clairs et compréhensibles. Cela devrait nous donner des émotions cohérentes que nous n’aurions pas autrement. Mais le prix d’une œuvre d’art fait désormais partie de sa fonction, son nouveau boulot est d’être accrochée à un mur et d’être de plus en plus chère.
Au lieu d’être la propriété commune de l’humanité, comme les livres, l’art devient la propriété privée de quelqu’un qui peut se le permettre. Si tous les grands livres du monde coûtaient un million de dollars – imaginez quelle conséquence catastrophique ce serait pour la culture.”
“Prix record pour une peinture de Banksy lors d’une vente ce soir. Quel dommage que je ne la possède plus.”