Une artiste qui a plus d’un tour dans son sac.
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© Écoute Chérie
Derrière la pop délicate de Vendredi sur Mer, se cache Charline Mignot, artiste aux multiples facettes. En effet, avant de tomber dans la musique, la jeune chanteuse menait une carrière de photographe. Nous avons donc échangé avec la Suissesse de 23 ans qui nous a parlé de sa musique, de son rapport à la photographie et de la manière dont ces deux passions communiquent.
Cheese | Comment es-tu passée de la photo à la chanson ?
Vendredi sur Mer | Je suis arrivée à la chanson vraiment par hasard, il n’y a pas eu vraiment de transition. J’ai commencé la musique mais la photo est encore présente, même si j’en fais moins qu’avant. Je travaille la direction artistique des images de Vendredi sur Mer, c’est presque une espèce de symbiose. Il faut plus voir ça comme une œuvre globale.
L’acte de création est-il différent d’un medium à l’autre ?
C’est très différent et en même temps on peut trouver beaucoup de liens. En photo, je raconte des instants de vie, mais c’est quelque chose de très global sur l’autre, sur soi, c’est plus des concepts. En chanson, c’est plus des choses que j’ai vécues. Il y a une manière d’aborder les choses qui sont assez différentes : en chanson, c’est un peu plus une introspection, et en photo, c’est plus construit. L’écriture, c’est quelque chose qui est assez impulsif, je peux écrire un peu tout le temps. Là, je peux sortir et écrire quatre couplets. C’est une forme d’état. En photo, c’est plus réfléchi.
© Charline Mignot
Tu as le temps aujourd’hui de faire de la photo ?
Oui, j’en fais encore, mais pour moi. Je gère toute l’esthétique du projet Vendredi sur Mer. Finalement, je ne me suis pas vraiment éloignée de l’image.
Tu shootes avec quoi ?
Plein de choses, ça peut être mon téléphone portable, ça peut être un argentique, un jetable, un numérique… Il y a plein de manières de faire de la photo, j’aime surtout expérimenter des choses. Une fois, j’ai filmé une scène et j’en ai extrait des images, ce qui fait que ce n’est pas totalement parfait, un peu flou, j’aime bien ça.
C’est quoi l’expérimentation la plus WTF que tu aies pu faire ?
Ce sont des choses qui se font beaucoup mais je mettais de la vaseline sur l’objectif par exemple !
Qu’est-ce qui te plaît dans la photo de mode ?
Il y a toujours une mini-histoire, un peu plus “engagée” ; j’ai beaucoup parlé du genre, de féminité… J’aimais bien la photo de mode parce que ça permet de se jouer de l’esthétique. C’est partir d’une page blanche, on peut se permettre de créer un univers.
© Charline Mignot
Qu’est-ce qui t’inspire en musique comme en photo ?
Beaucoup de choses. L’actualité par exemple ; ça, c’est surtout en photo. Après le cinéma m’inspire beaucoup aussi, des réalisateurs comme Rohmer, Godard, toute la Nouvelle Vague. Rohmer a vraiment une esthétique incroyable, qui me parle. J’ai re-regardé Les Nuits de la pleine lune en tournée cette semaine, il y a quelque chose d’hyper brut de décoffrage : des plans très simples, un stylisme très simple aussi, un appartement un peu pourri mais c’est très beau. C’est clairement le genre de choses qui m’inspire, que ce soit en musique ou en images.
Tes thèmes de prédilection ?
Sur ce point, la musique et la photo sont assez séparés : Vendredi sur Mer, ce sont des moments, des instants de vie et des émotions. En photo, je me nourris beaucoup plus des autres pour produire. Les thèmes ne sont pas si lointains mais travaillés d’une manière différente.
© Charline Mignot
Est-ce que le fait d’avoir fait de la photo t’a aidée à appréhender différemment ton image d’artiste ?
Oui, ça aide ! Je sais ce que j’aime en termes d’esthétique, j’adore le design des années 1970. Cette sensibilité aux arts visuels c’est aussi quelque chose qui est en moi, ça me nourrit, ça nourrit ma musique.
Tu shootes avec de la musique ?
Oui, je mets du jazz ! C’est apaisant et ça ne me déconcentre pas.
Est-ce compliqué d’avoir deux passions ? Est-ce que les gens n’ont pas l’habitude de mettre des gens dans des cases ?
Je pense qu’aujourd’hui, notre génération est très libre, là où avant, c’était assez critiqué. Il y a peu d’exemples comme Patrick Bruel qui pouvait être en tête d’affiche d’un film et en tête d’affiche d’une salle, c’était compliqué à l’époque. Maintenant, c’est quelque chose qui est plus accepté et je trouve ça assez encourageant.
© Charline Mignot
Comment ça se passe pour tes clips ?
Pour le premier – c’était “La Femme à la peau bleue” –, j’ai dit à mon manager : “Je veux absolument Alice Kong.” Je crois que j’avais vu une mini-vidéo qui s’appelait Le Casting, et par les couleurs, le scénario, ça me faisait beaucoup penser à Rohmer dans l’esthétique. On a ensuite fait plusieurs clips ensemble, on voit son style évoluer, c’est génial. Elle réussit vraiment à percevoir l’univers, j’ai jamais besoin de lui dire : “Ça, on cut.” À chaque fois, j’ai l’impression qu’elle réussit à révéler ce que je veux dire.
© Charline Mignot
Dans ton travail photographique, quelle est l’image dont tu es la plus fière ?
C’est une série qui s’appelle La Madone, que j’ai réalisée quand j’étais à l’école. Il fallait qu’on interprète en images la chanson “The Message” de Grandmaster Flash. J’en ai fait cette série, qui est retouchée très bizarrement. C’est très loin de tout ce que je fais d’habitude mais j’adore cette série.
Est-ce que tu as une anecdote WTF de shooting ?
J’en ai une qui lie la musique et la photo ! Pour “La Femme à la peau bleue”, mon manager me passe un coup de téléphone pour me rappeler que je dois lui faire parvenir l’image de cover au plus vite, sauf que… j’avais complètement oublié de la faire. J’ai donc dit : “OK, oui, pas de souci, je te l’envoie” et j’ai demandé à une amie de poser pour moi. Je lui ai demandé de se peindre les mains en bleu pour la photo, sauf que le temps que je fasse l’image, ça a séché et c’était impossible à faire partir, c’était une espèce d’acrylique qui tenait très très bien. Elle saignait à force de frotter. À chaque fois qu’elle voit l’image, elle me dit : “Ah oui je me souviens !”
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Tu as toujours eu envie de créer ?
Oui, quand j’étais à l’école, je n’étais pas une cancre mais je n’étais pas la meilleure. Je faisais le taf quoi. J’ai toujours eu un peu ma bulle à côté. Quand j’étais au lycée, je ramenais mon appareil photo tous les jours et je prenais des gens dans les couloirs, je faisais des montages absolument horribles, je mettais des phrases, des citations ce n’était pas terrible. J’avais toujours mon appareil sur moi, je demandais aux gens de poser, c’était vraiment les débuts. Puis, après, j’ai commencé à faire des photos de mes amis, puis des connaissances de connaissances. Quand on a fait les admissions post-bac, il n’y avait pas de doute, j’allais faire de la photo. Je ne voulais pas faire autre chose et je n’ai jamais eu peur de ça.
Tes projets pour la suite ?
Je vais continuer à essayer de garder l’esthétique que je me suis créée, elle évolue, ça, c’est bien. Et puis, je vais finir mon album. Tout est un peu lié, en ce moment, je travaille sur tout ça.
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Vendredi sur Mer affiche complet au Trianon le 4 décembre 2018, mais la sortie d’un album et un concert à l’Olympia sont prévus pour 2019.