Une “rock star” christique éprise de vérité et de fureur créatrice : c’est le nouveau visage du célèbre peintre Caravage proposé par le réalisateur italien Michele Placido dans un film éponyme, en salle ce mercredi 28 décembre. Incarné par l’acteur Riccardo Scamarcio, choisi par le réalisateur pour son étonnante “ressemblance avec le peintre dans certains de ses tableaux”, cette coproduction franco-italienne retrace un moment intense et dramatique de la vie de l’artiste.
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Michelangelo Merisi da Caravaggio, son vrai nom, francisé Caravage ou Le Caravage, est né en 1571 à Milan. Il a d’abord choisi la voie ecclésiastique “avant de consacrer toute sa vie à représenter les ‘derniers’, les plus aimés par le Christ : les gens du peuple, les prostituées, les gens de mauvaise réputation, les pauvres, les parias de la société”, souligne Michele Placido.
Accusé de meurtre, Le Caravage a fui Rome et s’est réfugié à Naples. Soutenu par la puissante famille Colonna, il tente d’obtenir la grâce de l’Église pour revenir à Rome. Le pape décide alors de faire mener par un inquisiteur, l’Ombre, une enquête sur le peintre dont l’art est jugé subversif et contraire à la morale de l’Église.
Aux côtés de Riccardo Scamarcio, Louis Garrel (l’Ombre), Isabelle Huppert (Costanza Colonna) et la fille de cette dernière, Lolita Chammah (Anna Bianchini), complètent la distribution du film, qui a été tourné dans la langue de Dante. L’histoire s’ouvre dans un décor poisseux et pluvieux, reconstitué afin de “réaliser un film authentique, sale, loin de la tentation d’une reconstitution léchée”, explique à l’AFP le réalisateur, 76 ans, ancien “flic des rues de Rome”, qui fut aussi acteur sur les planches et au cinéma, avant de prendre la caméra.
Il a “fait appel à des historiens comme Vincenzo Pacelli, tant pour la grande fidélité des reconstitutions historiographiques des tableaux” du Caravage que pour sa vie et sa mort. Le Caravage “a été l’un des premiers metteurs en scène de l’histoire et même l’un des premiers chefs opérateurs”, dit-il. “Il utilisait des personnes qu’il mettait en scène comme s’il s’agissait d’un véritable plateau de tournage, avec des lumières et des ombres recréant fidèlement sa vision d’une scène de vie.”
Un peintre à scandales
Son chef-d’œuvre La Mort de la Vierge, tableau emblématique conservé au Louvre, “a fait scandale parce qu’il a utilisé une célèbre prostituée de l’époque, Anna Bianchini, pour représenter la Vierge. Il reproduisait la scène et mettait ensuite tout sur la toile”, ajoute-t-il.
Caravage, La Mort de la Vierge, 1601/1606. (© Musée du Louvre)
L’une des forces du film tient à cette reconstitution de scènes bibliques et de vie, dans des couleurs extrêmement fidèles aux toiles du Caravage, réalisées avec des mendiant·e·s et parias de la société comme modèles vivant·e·s, ce que l’Église va lui reprocher même si certains de ses membres ne pourront s’empêcher d’admirer son génie.
C’est précisément “un Caravage qui s’oppose à la somptuosité de l’Église” que le réalisateur dit avoir voulu mettre en scène avec “une image un peu rock”. Ses nuits agitées de fêtes et de tourments succèdent à des journées de déambulation ininterrompue. Le Caravage ne semble s’arrêter que lorsque de fulgurantes inspirations surviennent, où toute son attention est retenue par la vision d’une scène qu’il va peindre.
Le film offre également une plongée spectaculaire dans les ateliers d’artistes de l’époque, où apparaît Artemisia Gentileschi, née à l’époque de l’académie de Campo de Fiori et qui fut l’une des premières femmes peintres de l’Histoire. On suit aussi Le Caravage en prison, où il croise Giordano Bruno lors de son exécution.