Le court-métrage Fade to Black montre, en l’espace d’une minute, comment la ville de Raqqa est devenue un enfer.
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Le ciel est bleu, les oiseaux chantent, les cheveux de l’actrice Farah Presley virevoltent, puis le ciel commence à se voiler jusqu’à devenir d’une noirceur inquiétante, la sérénité sur le visage de la jeune femme se transforme rapidement en peur, ses cheveux ne volent plus au gré du vent et se retrouvent coincés sous un niqab… Le court-métrage Fade to Black, repéré par Courrier international, porte bien son nom, que l’on pourrait traduire par “plongée dans les ténèbres”.
Réalisée en stop motion par Amer al-Barzawi, un Syrien originaire de Raqqa exilé en Turquie avec sa compagne Farah Presley, la vidéo nous montre de manière très poétique les conséquences psychologiques sur les habitants de cette ville du Nord de la Syrie devenue siège de Daech en 2014 et considérée désormais par le groupe terroriste comme “la ville modèle de son califat”.
“Je ne pouvais plus supporter de vivre là-bas”
Pour Amer al-Barzawi et Farah Presley, comme pour beaucoup de Syriens, tout a basculé du jour au lendemain. C’est d’ailleurs pour cela que la vidéo dure seulement une minute, pour rappeler la rapidité avec laquelle leur ville a été assiégée par Daech, racontent-ils au site PBS :
“Une jour, interdiction de fumer. Le jour suivant, plus de filles et de garçons ensemble dans les rues. Le mois d’après, plus de filles et de garçons dans les mêmes écoles, elles doivent porter le niqab. Puis, ils disent : ‘nous ne voulons pas étudier cette histoire, physique, mathématiques, nous voulons les changer'”
Sa compagne Farah, raconte alors au site Agos, cet épisode qui a fini par la convaincre de quitter son pays : “Je ne pouvais plus supporter de vivre là-bas. On m’a emmenée deux fois en garde à vue. Ils m’ont gardée pendant 10 jours parce que je suis passée par un checkpoint la nuit. Nous avons eu de la chance, ils auraient pu nous tirer dessus. Il y avait des chansons antirégime dans mon ordinateur, c’était assez pour eux pour me garder pendant 10 jours.“
Désormais loin de leur pays, mais gardant toujours l’espoir de pouvoir y retourner, le couple considère comme primordial que les artistes syriens continuent de produire leur art afin que la culture ne meurt pas. “Je pense que la culture est en train de disparaître en Syrie… Nous allons peut être perdre notre culture“, regrette Amer, persuadé qu’utiliser l’art comme une arme permet également de donner une autre vision des réfugiés syriens.
Car comme il le rappelle à PBS : “Les gens doivent savoir, nous sommes des gens normaux, nous sommes humains, nous sommes musulmans et nous ne sommes pas des terroristes.“