La députée Sonia Krimi (LREM) a dénoncé à l’Assemblée nationale les dérives répressives du ministère de l’Intérieur Gérard Collomb, avant de finalement tempérer ses propos le soir même.
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"Les centres de rétention deviennent des centres de détention !" : @Sonia_Krimi (LREM) interpelle le gouvernement sur sa future loi sur l'asile et l'immigration. #DirectAN QAG pic.twitter.com/dGoVtJmMhZ
— LCP (@LCP) 19 décembre 2017
Dites-moi pas que c’est pas vrai ! Une députée LREM qui prend le micro à l’Assemblée pour faire autre chose que de poser une question toute plate à un ministre prêt à dégainer des éléments de langage réchauffé, ça existe ? Eh bien, oui. On vous présente Sonia Krimi, députée macroniste de la Manche, visiblement très remontée contre le tour de vis migratoire porté par le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb.
Résultat : une intervention au vitriol durant les Questions au gouvernement (QAG), ce rendez-vous hebdomadaire où les députés ont tout loisir d’interpeller directement les ministres.
“Tous les étrangers de France ne sont pas des terroristes. Tous les étrangers de France ne sont pas des indélicats fraudeurs aux aides sociales. Dire le contraire, c’est jouer avec les peurs, c’est jouer avec les mots !”
Des mots et des actes durs, que Gérard Collomb et ses équipes multiplient ces derniers temps : soupçons de lacérations de tentes de migrants par la police, accélération des expulsions, mise à l’écart des associations, refus d’élargir l’accueil de réfugiés, contrôles accrus dans les centres de rétention…
“Les conditions d’accueil sont aujourd’hui dans une impasse”
C’est ce dernier point qui a fait déborder le vase et suscité la colère de Sonia Krimi et d’une bonne partie de la majorité parlementaire, habituellement peu – voire pas du tout – critique de l’action gouvernementale. Car en émettant une circulaire qui vise à recenser les migrants dans les centres d’accueil, le ministre de l’Intérieur s’est attiré les foudres de toute une aile du groupe LREM à l’Assemblée. Ce qui lui a valu cette vibrante tirade de la députée :
“Les conditions d’accueil sont aujourd’hui dans une impasse. Les demandeurs d’asile sont souvent dans des situations difficiles : des délais longs, des solutions d’hébergement insuffisantes. Les mineurs isolés sont trop souvent abandonnés. Les moyens […] pourraient être améliorés. Les centres de rétention deviennent des centres de détention et sont indignes de notre République !“
Stupeur à l’Assemblée, applaudissements nourris du côté de La France Insoumise, mimique révélatrice de Christophe Castaner genre “ouch, elle y va fort” :
Et Sonia Krimi de conclure :
“Pourriez-vous nous détailler l’équilibre politique de votre réforme, une réforme sans postures et sans préjugés, une réforme juste et humaine à laquelle nous nous étions tous engagés ?”
Parce que, effectivement, quand Louis Aliot, vice-président du Front national, affirme que “ça fait 30 ans” qu’il défend cette politique anti-immigration, on est en droit de se poser des questions.
Acclamée sur Twitter, comme dans l’hémicycle, Sonia Krimi n’a toutefois pas attendu longtemps pour mettre de l’eau dans son vin. Son intervention apparaissant comme une opposition frontale à la politique migratoire du gouvernement, elle a assuré le soir même sur France 5 :
“C’était un rappel à tout ce que nous avons promis durant notre campagne. […] On ne va pas renvoyer des personnes dans des pays où on sait très bien qu’elles vont être retenues dans des prisons, ou autre. On vérifie. Moi, je fais confiance à cette administration française qui regarde de près chaque demandeur d’asile.”
Un ton nettement plus policé, qui semble éloigner l’idée d’une fracture au sein des députés LREM sur la question de l’immigration. Peut-être était-ce le but non-avoué de ce revirement ?