Vague d’agressions sexuelles à Cologne : la maire répond à côté de la plaque

Vague d’agressions sexuelles à Cologne : la maire répond à côté de la plaque

Plus de 80 femmes ont été agressées par des hommes à Cologne le soir du Réveillon. En guise de réponse, la maire leur conseille de ne plus s’approcher des étrangers. 

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Le soir du Réveillon, alors que la plupart d’entre nous étaient trop occupés à chanter sur les Destiny’s Child, une perruque sur la tête, un énième verre de mousseux à la main (allez, je ne suis pas la seule), plus de 80 femmes à Cologne (Allemagne) ont été agressées. Comme si cette information n’était pas assez accablante, Henriette Reker, la maire de la ville, a choisi d’aborder ce problème de la pire manière qu’il soit : en blâmant les victimes.

Cet incident a été ignoré par les médias pendant plusieurs jours alors que l’étendue de ces attaques a un caractère exceptionnel, comme l’a expliqué le chef de la police de la ville Wolfgang Albers à la BBC, mardi. Ces femmes, dont une policière bénévole, ont été sexuellement agressées, victimes de vols et l’une d’entre elles a même été violée. Un millier d’hommes seraient derrière ces attaques.

Blâmer les victimes

Au lieu de se concentrer sur le nombre aberrant de prévenus potentiels et de victimes impliqués dans cet incident, ou plus largement sur le problème des crimes et délits sexuels organisés, Henriette Reker a statué que les femmes étaient l’élément clé de la solution, et donc le problème.

Interrogée par une journaliste, la maire a expliqué comment les femmes pouvaient se protéger :

“Il est toujours possible de garder une certaine distance, de la longueur d’un bras au moins… Ce que je veux dire, c’est qu’il faut faire en sorte de ne pas trop s’approcher des personnes que vous ne connaissez pas et avec qui vous n’entretenez pas une relation de confiance.”

Vous avez entendu ça ? Les filles, n’acceptez pas de bonbons de la part des étrangers… Quelqu’un devrait quand même dire à cette élue que 47% des violeurs sont des amis ou des connaissances de leurs victimes.

Henriette Reker a également expliqué qu’afin “d’éviter que de tels événements ne se reproduisent”, les femmes devraient adopter à un “code de conduite”… Voilà de quoi se taper la tête contre un mur. La maire aurait également ajouté que, dans le futur, les femmes devraient faire attention aux potentiels dangers de l’ivresse.

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La maire de Cologne : les femmes doivent “maintenir une distance longue d’un bras avec les étrangers”. Tout cela est déprimant.

Et comme cette misogynie ordinaire n’était pas suffisante, les autorités de Cologne ont jeté de l’huile sur le feu en donnant des informations sur le profil des criminels : des “Arabes et des Nord-Africains”, selon le chef de la police.

Comme de nombreux réfugiés se sont installés sur le sol allemand – près d’un million en 2015 -, beaucoup se sont focalisés sur cette information. Aucune information sur l’identité des criminels n’a été confirmée pour le moment, mais s’il s’avère que des réfugiés font partie de ce groupe, cela ne règle en rien le problème. La crise des réfugiés ne doit pas être une excuse pour détourner le sujet.

Une mode perturbante

Malheureusement, Henriette Reker n’est pas la première personnalité politique qui aborde le problème des agressions sexuelles en blâmant les victimes. En 2014, une politicienne indienne avait créé la polémique quand elle avait affirmé que les femmes étaient responsables de leur viol. En 2011, un policier de Toronto est devenu tristement célèbre après avoir dit que “les femmes devraient éviter de s’habiller comme des putes”, ce qui avait donné naissance au mouvement protestataire, SlutWalk – la marche des salopes.

Mayor of cologne victim blames hundreds of women and it needs to end
(Image: Tumblr)

Et ce genre de mentalité est bien répandu. Une étude commandée par le gouvernement australien en 2015 a révélé que ces agressions étaient considérées comme un “rite de passage” pour les hommes. Une autre étude menée à Londres en 2010 a montré que 54% des femmes interrogées pensaient que les victimes étaient en partie responsables de leur viol.

Cette tendance à blâmer les victimes semble se cantonner aux crimes sexuels. Certains trouvent cette approche logique. Pourtant, ce genre d’argument n’est jamais utilisé dans des cas de crime raciste ou homophobe. Si un homme, ou une femme, qui porte un dashiki, un hijab, ou une kippa se fait attaquer sans raison, à cause de sa couleur de peau ou de son identité, personne n’ose l’accuser d’avoir provoqué ce crime. Dans ce cas là, l’attaque sera qualifiée de crime haineux et l’assaillant de raciste. Pourquoi serait-ce différent dans un cas d’agression sexuelle ?

Traduit de l’anglais par Hélaine Lefrançois

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