Le président élu a annoncé qu’un poste de haut conseiller reviendrait à Jared Kushner, le mari de sa fille Ivanka. Une initiative qui oscille entre népotisme et conflits d’intérêts.
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Il n’avait aucune expérience politique avant la campagne présidentielle de 2016, mais Jared Kushner, jeune magnat de l’immobilier de 36 ans et mari d’Ivanka Trump a été récemment nommé au poste de haut conseiller à la Maison-Blanche. Il devient ainsi l’une des rares personnes à avoir la confiance aveugle de Trump pour le conseiller en cette période complexe de transition et, plus tard, dans l’exercice du pouvoir. Donald Trump est dithyrambique lorsqu’il évoque son gendre : “Il a été un atout formidable et un conseiller de confiance pendant toute la campagne et la période de transition et je suis fier de l’avoir dans un rôle clé de mon administration.”
Les opposants à la nouvelle équipe gouvernementale hurlent déjà au népotisme : profiter de son influence pour placer les membres de sa famille à des postes hauts placés de son administration est une pratique interdite par la législation américaine … pour les agences fédérales (FBI, NSA, etc.). Et comme la Maison-Blanche n’est pas une agence, Donald Trump peut légalement engager le mari de sa fille. Et tant pis pour l’éthique.
Cette nomination pose aussi des problèmes de conflits d’intérêts évidents. Jared Kushner est à la tête d’un empire immobilier aux nombreuses ramifications, autant d’activités lucratives qui pourraient, une fois à la Maison-Blanche, le pousser à infléchir la politique américaine selon son intérêt privé. Pour contrer ces soupçons, Jared Kushner a annoncé qu’il quitterait ses fonctions des Kushner Companies et entamerait des désinvestissements massifs. Une initiative louable dont on ne peut cependant vérifier la portée effective. De fait, la présence de Jared Kushner confirme la prise en main de la politique américaine par une classe d’ultra-riches, bien loin des considérations populaires, alors même que Donald Trump avait fait campagne au nom des laissés pour compte de la mondialisation.
Une équipe de showmen
Les soupçons de conflits d’intérêts ne sont pas une chose neuve dans la nouvelle administration Trump, et si celui-ci a plusieurs fois annoncé avoir fait le ménage, il est lui-même directement mis en cause : son empire financier est si vaste qu’il est virtuellement impossible de savoir exactement ce qu’il possède, et ce qu’il pourrait être tenté de favoriser en tant que président des États-Unis.
Si Trump tient tant à Jared Kushner, c’est que ce dernier a toujours été l’un de ses plus fidèles partisans. À l’été 2015, au tout début de sa campagne, le jeune loup avait ainsi volé au secours de son beau-père alors accusé d’antisémitisme pour un tweet fumeux qui circulait sur ses réseaux. Juif orthodoxe, Jared Kushner avait annoncé à grand bruit que Donald Trump n’était “ni antisémite ni raciste”, rapporte Le Monde. Un soutien bienvenu qui avait à l’époque séduit le candidat républicain, par la suite convaincu par ses capacités de leadership, au point de l’engager comme l’un de ses plus proches conseillers pour la campagne.
Mais ce n’est pas tout. Donald Trump met un point d’orgue à s’entourer de personnes télégéniques. En bon ex-patron de show de téléréalité, il prête une attention particulière au style des membres de son administration : “La présentation est très importante parce que vous représentez l’Amérique“, avait fait savoir il y a quelque temps l’un de ses conseillers. En décembre, on apprenait ainsi qu’il avait refusé la candidature d’un haut fonctionnaire en raison… de sa moustache, faute de goût inexcusable.
À l’inverse, Jared Kushner est le stéréotype du golden boy américain : riche, beau, blanc. Une histoire idyllique relatée à l’envi sur le compte Instagram d’Ivanka Trump, véritable ode au modèle familial américain”classique”.
Tout président a “une ou deux personnes auxquelles il fait intuitivement et structurellement confiance. Jared pourrait bien être cette personne”, explique l’ex-secrétaire d’État Henry Kissinger au magazine Forbes. La première personne de confiance a avoir été nommée haut conseiller de Trump est le très sulfureux Steve Bannon, grande figure de l’alt-right (droite identitaire) américaine et ancien rédacteur en chef du site ultra-droitier Breitbart News, qui fut l’un des bras armés des pro-Trump au cours de la campagne. Tout un programme.