Selon Mediapart, un ancien candidat FN aurait supervisé les négociations entre Lafarge et Daech

Selon Mediapart, un ancien candidat FN aurait supervisé les négociations entre Lafarge et Daech

D’après Mediapart, un ancien candidat du Front national, responsable de la sécurité pour le cimentier Lafarge, aurait supervisé les accords financiers négociés entre l’entreprise et l’État islamique en 2013 et 2014.

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Au micro d’Europe 1 en décembre 2015, Marine Le Pen accusait le Parlement européen de refuser d’enquêter sur le financement de l’État islamique, par peur de tomber sur des arrangements louches en provenance de la Turquie. Pourtant, ce reproche sonne de façon légèrement ironique après l’article du site d’informations Mediapart publié mercredi 3 mai. Ce dernier fait état de l’importance d’un ancien candidat FN aux municipales de 2014 dans le processus de négociation établi en 2013 et 2014 entre l’entreprise Lafarge et Daech en Syrie.

L’entreprise avait en effet fait le choix de négocier avec l’État islamique pour pouvoir poursuivre ses activités dans le pays en guerre. On apprend donc aujourd’hui que Jean-Claude Veillard, soutien de Marine Le Pen et qualifié par Mediapart de “militant d’extrême droite engagé”, a tenu un rôle dans ces accords financiers. Une information qui pourrait mettre à mal la candidate Front national, qui a fait de la lutte contre le terrorisme islamiste l’étendard de sa campagne électorale.

La collaboration financière de Lafarge avec l’État islamique

En juin 2016, le journal Le Monde révélait un scandale mettant en cause l’entreprise française de ciment Lafarge, révélant avoir eu accès à des documents permettant d’attester d’arrangements entre cette dernière et l’État islamique présent en Syrie. En 2013 et 2014, le cimentier se serait approvisionné auprès de Daech et lui aurait également payé des taxes afin de pouvoir continuer à exister et travailler dans le pays, malgré la situation de ruine dans laquelle la Syrie se trouvait. Le Monde raconte :

“À partir du printemps 2013, l’EI (à l’époque surnommé l’État islamique en Irak et au Levant) prend progressivement le contrôle des villes et des routes environnant l’usine de Lafarge. Des courriels envoyés par la direction de Lafarge en Syrie, publiés en partie par le site syrien proche de l’opposition Zaman Al-Wasl et que Le Monde a pu consulter, révèlent les arrangements de Lafarge avec le groupe djihadiste pour pouvoir poursuivre la production.”

Selon les informations de Mediapart, cette collaboration est prouvée par un laissez-passer dont une copie figure dans l’article, qui permet de témoigner d’“achat de pétrole, dont la production était contrôlée par l’EI, fourniture de camions de ciment et paiement d’une taxe pour assurer le passage et la sécurité des employés de l’entreprise en Syrie”.

Des accords financiers qui auront permis à l’État islamique de renflouer ses caisses et à Lafarge de poursuivre ses affaires sur un territoire lucratif en raison du prix de la tonne de ciment pratiqué là-bas, jusqu’au 19 septembre 2014, date à laquelle Daech a mis la main sur l’usine, forçant Lafarge à fermer son site en Syrie et à stopper ses activités.

Mediapart révèle le rôle d’un ancien candidat Front national dans cet accord

Les documents que se sont procurés les journalistes de Mediapart et qu’ils ont publiés mercredi 3 mai permettraient de prouver qu’un ancien candidat du Front national aux élections municipales de 2014 était au courant de ces négociations embarrassantes pour l’entreprise française. En effet, Jean-Claude Veillard fut cinquième sur la liste du rassemblement Bleu Marine de Wallerand de Saint-Just, l’actuel trésorier de campagne de Marine Le Pen et cadre du parti, en 2014. Au même moment, Jean-Claude Veillard était également responsable de la sûreté de Lafarge-Holcim – et l’est toujours.

Jean-Claude Veillard aurait été au courant de chacune des étapes de négociation. Mediapart rappelle qu’en sa qualité de directeur de la sécurité chez Lafarge, il ne pouvait nécessairement pas ignorer ces accords financiers passés avec l’organisation terroriste puisqu’ils étaient justement des gages pour l’entreprise de la protection de ses salariés, comme une assurance vie. Mediapart évoque une “parfaite connaissance des tractations” qui ont eu lieu.

Les journalistes se sont procuré des correspondances et publient le mail ci-dessous, datant d’août 2014, montrant les accords financiers qui ont été mis en place pour que les membres de Daech laissent passer les employés de Lafarge aux différents check points et qui témoignent du fait que Jean-Claude Veillard était au courant :

Si, puisque Jean-Claude Veillard n’est pas employé par le FN et n’en est pas cadre, il ne s’agit pas pour Mediapart de dire que le parti aurait financé Daesh, il n’en reste pas moins que les discours enflammés de la candidate Front national sur la lutte contre le terrorisme islamiste auront un petit peu plus de mal à être entendus.

Contacté par la rédaction de Mediapart, Jean-Claude Veillard a déclaré n’avoir “rien à dire”, ajoutant au sujet de son lien avec le Front national : “Il s’agit d’une affaire personnelle et privée. Si j’avais été l’adjoint de Mélenchon ou d’un socialiste, cela ne vous aurait pas intéressés, j’en suis sûr.”

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