Le 24 novembre se tenait la finale du Red Bull Dernier Mot, une compétition d’impro rassemblant les 16 meilleurs MC français pour des battles d’exception.
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Red Bull Dernier Mot au Trianon de Paris. (© Red Bull Dernier Mot)
Troquant les décors colorés du Bataclan et son héritage hip-hop pour les balcons et les moulures raffinées du Trianon, la compétition Red Bull Dernier Mot a offert, ce samedi 24 novembre, un beau spectacle pour sa seconde édition. Ce jeune événement réunit les maîtres de l’impro hexagonale pour plusieurs défis évalués par un jury d’experts.
Cette année, le jury était composé du rappeur Némir, du créateur du programme Eloquentia Stéphane de Freitas, de l’expert de l’impro Artik, du cofondateur du site Booska-P Fif, et enfin du membre de la Scred Connexion Mokless. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il faisait chaud dans la petite salle parisienne.
“Une performance artistique et humaine”
“C’est le Red Bull Dernier Mot ! C’est le Red Bull Dernier Mot !” Porté par l’énergie communicative de Mass, le présentateur de la soirée, le public chauffé à blanc reprend en chœur ces quelques mots et est prêt à accueillir les premiers battles. Après la présentation des juges alignés sur le côté gauche de la scène, c’est au tour des participants de faire leur entrée, un par un. Il y a au total 16 MC, venus des quatre coins de la France pour se défier et tester leur niveau. Certains sont déjà rompus à l’exercice, à l’image de RES, gagnant de l’édition précédente.
Une fois les compétiteurs présentés, nous avons droit à plus de 2 heures 30 de performances mêlant technique et spectacle, durant lesquelles les participants ont dû mettre en pratique leur savoir-faire mais aussi leurs talents de showmen.
“Pour faire, une bonne impro, il faut une créativité de dingue. Les candidats sont des artistes exceptionnels. J’ai envie d’utiliser la notion d’artiste, car c’est un exercice particulier : il faut être en rythme, faire des rimes. Cela nécessite une pratique, un entraînement assez poussé.
Je ne pense pas que ce soit à la portée de tout le monde. Il faut se livrer, accepter de se mettre à nu, de se faire clasher. Ça veut dire supporter les critiques devant 1 000 personnes, c’est une performance artistique et humaine”, nous explique Stéphane de Freitas.
Au programme, plusieurs épreuves répondant toutes aux mêmes règles. Aucune préparation, quelques minutes de battle et des sujets imposés : une image, quelques mots, des mesures en guise de guide, le tout sur des prods que les participants n’ont pas choisies. Des défis compliqués qui entraînent leur lot d’échecs – certains plus difficiles à avaler que d’autres, comme l’élimination face à un pote.
Car si la compétition est féroce, elle n’exclut pas les amitiés qui peuvent se nouer entre ces MC, qui se côtoient pour certains depuis des années. C’est le cas de RES, battu par Maras en huitièmes de finale :
“Fleyo et Maras sont deux grands amis. Donc tomber contre eux, c’est exactement ce que je ne voulais pas. Et malheureusement, je suis tombé contre Maras dès le premier tour. Ça fait chier. Après, je pense qu’on a fait un bon battle, je suis très content que lui soit champion, ça me fait super plaisir et, surtout, il a donné du super spectacle.
La finale entre Doc Brrown et lui, c’était mortel, franchement. Je ne vais pas dire que je n’ai pas de regrets, car je suis frustré de ne pas être allé plus loin. Mais ça m’a fait plaisir et j’en tire au moins cela.”
Res Turner contre Maras. (© Red Bull Dernier Mot)
Une finale au sommet
Cette finale opposant Doc Brrown à Maras, RES n’a pas été le seul à la trouver exceptionnelle. Au moment d’annoncer le vainqueur, le jury s’est d’ailleurs trouvé en difficulté, si bien qu’il a fallu trois replica (ou rappels) pour réussir à les départager.
“C’était hyper serré. Dans le jury, on se regardait et on ne savait pas quoi faire. On a fait trois fois le replica et ça s’est vraiment joué sur rien. Les deux dernières phrases, c’est un peu dur, comme les penalties au foot”, raconte Stéphane de Freitas, alors qu’on le retrouve dans les coulisses à la fin du spectacle. Au final, même si le jury ne peut couronner qu’un seul vainqueur, c’est toute la discipline ressort gagnante de cette aventure.
“C’est une compétition qui donne de la visibilité pour mettre en avant les combats que je mène. Mais il y a aussi le kif du battle. C’est à la fois utile et kiffant”, nous explique RES, aussi militant au sein de l’association L214. Même son de cloche chez Maras, qui après sa victoire annonce reverser le total des gains remportés à des associations caritatives.
“C’est une belle victoire. Mon but, c’était de venir et d’essayer de marquer un peu l’événement avec deux ou trois punchlines, et je pense que c’est ce qui s’est passé. Et puis j’aime beaucoup Maras, donc je suis content. Cette compétition permet d’avoir de la visibilité, et pas n’importe comment puisqu’il faut s’investir, essayer de créer du spectacle et de faire passer un bon moment aux gens. Je vois la victoire comme un bonus”, nous confie quant à lui Doc Brrown, médaille d’argent de cette édition 2018.
Si l’événement ne remplit pas encore les salles de dizaines de milliers de places comme c’est le cas en Amérique Latine – où l’impro s’est presque élevée au rang de sport national dans certains pays –, cette édition du Red Bull Dernier Mot prouve une nouvelle fois que la discipline suscite un intérêt grandissant. Une idée confirmée par RES :
“La cote du Red Bull Dernier Mot a grimpé. On vient de se produire dans une salle comble, on a eu des sélections qui étaient pleines à chaque fois, mais aussi des ateliers remplis par des jeunes et moins jeunes super intéressés. Je pense qu’on tient quelque chose qui est encore en développement, mais qui a son intérêt.“
Doc Brrown et Maras. (© Red Bull Dernier Mot)