Ce mercredi sort en salles Suspiria, le remake du film culte de Dario Argento. Pour mieux l’appréhender, voici 5 choses qu’il vous faudra savoir.
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1. Par le réalisateur de… Call Me by Your Name
Luca Guadagnino. Si vous ne connaissez pas son nom, dites-vous juste que c’est le réalisateur de l’un des films qui a le plus marqué 2017, soit Call Me by Your Name. Après Amore (2009) et A Bigger Splash (2015), le cinéaste italien avait mis en scène cette histoire d’amour entre Timothée Chalamet et Armie Hammer, avec l’aide du réalisateur, ici scénariste, James Ivory, avec le succès qu’on lui connaît.
Dès la sortie de A Bigger Splash, qui était déjà un remake de La Piscine de Jacques Deray, Luca Guadagnino avait fait savoir qu’il voulait proposer sa version de Suspiria, long-métrage horrifique culte sorti en 1977 et réalisé par son concitoyen, le grand Dario Argento. L’idée ? Reprendre l’entièreté du casting de A Bigger Splash. Seules Tilda Swinton et Dakota Johnson ont finalement été de la partie, mais qu’importe : la production d’un film pas comme les autres est en marche.
Loin des insouciances et des amours d’été de Call Me by Your Name, place à une école née sous le signe de sorcières. Le point de départ du remake est simple : l’histoire se déroule en 1977, soit l’année d’exploitation du film original.
2. Suspiria est un remake, mais n’en est pas un
Dans une interview, Tilda Swinton a résumé le paradigme des remakes :
“Comme on le sait, dans la musique, les reprises s’éloignent souvent beaucoup de l’originale. La motivation pour faire ce film est née d’une profonde affection pour le classique inégalé d’Argento. On connaît tous des élans d’inspiration particuliers qui nous portent.”
Comme des reprises de morceaux, ils sont autant une relecture qu’une réinterprétation personnelle d’une œuvre. 40 ans après le long-métrage de Dario Argento, un remake viendrait forcément avec une couleur différenciée, à l’instar du Evil Dead nouvelle génération ou du Carrie au bal du diable de Brian de Palma, revu et “gorifié” par Kimberly Peirce en 2013.
Pour Luca Guadagnino, la volonté de donner sa vision de Suspiria a toujours été présente, alors que sa rencontre avec le film de Dario Argento a été pour lui une manière “de forger l’une des principales facettes de [son] identité, à la fois en tant qu’homme et cinéaste” :
“Je tenais des carnets dans lesquels j’écrivais des choses comme ‘Suspiria de Luca Guadagnino’. Influencé par le film de Dario, je réfléchissais déjà à la façon de faire un Suspiria qui me ressemble.”
Le résultat est une complète relecture du film original. Si le Suspiria de 2018 prend, dans une première partie, le même chemin scénaristique que celui de 1977, on pressent rapidement des apports significatifs de la part du jeune réalisateur italien. Esthétiquement, les visuels impressionnants et marquants de Dario Argento ont été gommés par des tons verdâtres et mélancoliques.
Mais c’est surtout le parcours de Suzy Bannion qui est remis en cause : son personnage est non seulement modernisé par le travail fulgurant de Dakota Johnson, mais il est avant d’une tout autre teneur, aussi terrifiante que puissante, donnant à ce Suspiria une couleur inattendue, salvatrice et jouissive.
3. La musique de Thom Yorke
Une douce mélancolie s’élève lorsqu’on écoute “Suspirium”. Des notes inquiétantes font écho dans “A Storm that Took Everything” alors que des gémissements se font entendre. Des sonorités désaccordées prennent toute la pièce lors de “Olga’s Destruction (Volk Tape)”. Qu’on se le dise, Thom Yorke, le leader de Radiohead, est bien à la baguette de la bande originale de Suspiria.
Pour son troisième album solo, le premier dédié à la bande originale d’un film, le compositeur britannique navigue dans une noirceur prégnante à travers des compositions aériennes. Place à l’ambiance d’un film d’horreur terne : une invitation à se plonger entre les murs ensanglantés de l’académie de danse à Fribourg, alors que Suzy Bannion (Dakota Johnson) y entre par la petite porte.
Si la grande majorité des morceaux laisse place à des instrumentations inquiétantes, Thom Yorke vampirise notre cerveau avec trois titres chantés : “Suspirium” (qui a deux versions, dont une pour la fin) donne le ton et l’esprit du projet de Luca Guadagnino, exprimant avec justesse le mélange des temporalités, entre nostalgie et oubli des corps, tandis que “Has ended” et ses voix disparates, et “Unmade” et son piano et sa voix fragiles, continuent de peindre le tableau d’une maison habitée par des sorcières, mais d’une manière presque tendre – une sorte de douceur horrifique. Thom Yorke ? L’un des meilleurs de choix de casting pour ce projet, entre horreur et langueur.
4. Une thérapeute pour Dakota Johnson, trois rôles pour Tilda Swinton
Le tournage n’a pas été de tout repos pour les deux actrices principales de Suspiria. Dans un premier temps, il faut savoir que Tilda Swinton n’interprète pas seulement le personnage de Madame Blanc. Façon Cate Blanchett dans Manifesto ou Tom Hanks dans Cloud Atlas, l’actrice britannique a aussi incarné le docteur Josef Klemperer ainsi que l’épouvantable Helena Markos. Trois rôles aux trois implications bien différentes qui donnent une idée du talent (élevé) de Tilda Swinton.
Pour ce qui est de Dakota Johsnon, l’actrice principale du film, Suspiria a été l’occasion… d’avoir recours à une thérapeute après la fin de la production du film, comme le notifie Entertainment Weekly. Si le tournage a été “aussi marrant, exaltant et joyeux que possible”, il aura quand même laissé quelques traces d’ordre émotif.
En cause selon elle, sa forte sensibilité :
“Tout d’abord, je n’ai jamais fait de psychanalyse et j’espère que je n’en n’aurai jamais besoin. Il se trouve que lorsque je travaille sur certains projets, et je n’ai aucune honte à le dire, je suis une personne très poreuse et j’absorbe les sentiments des gens autour de moi.
Et quand, quelques fois, vous travaillez sur des sujets particulièrement sombres, cela peut rester en vous et donc en parler avec quelqu’un de réellement gentil après peut vous aider à dépasser le projet et vous en éloigner quand il est terminé. Ma thérapeute est une femme vraiment charmante.”
Et de préciser :
“Ce n’est pas comme si le film m’avait conduite à l’asile, c’est juste que j’ai un sacré ressenti, beaucoup d’émotions.”
Voilà qui donne une bonne idée, là aussi, de l’énergie et de l’émotion que l’on peut ressentir lors du visionnage du film.
5. Un film qui a fait pleurer Tarantino
Luca Guadagnino peut en être fier : lorsque le cinéaste italien a fait voir à Quentin Tarantino son nouveau film, le réalisateur de Pulp Fiction et de Jacky Brown… a pleuré, comme il l’indique à IndieWire :
“On est amis depuis qu’on a été jurés au festival de Venise. J’étais nerveux mais très pressé d’entendre ses conseils. On l’a vu chez lui et sa réaction m’a réchauffé le cœur. Il était très enthousiaste, à la fin il pleurait et m’a pris dans ses bras.
Comme c’est un film d’horreur mais aussi un mélodrame, mon but était que vous ne puissiez pas détourner le regard face à l’horreur parce que les personnages vous captivent. Les gens d’Amazon [le studio qui produit le film, ndlr] sont très contents.”