Le Kenyan Julius Yego a 27 ans, est champion du monde, est favori pour le titre olympique et a tout appris de sa discipline en regardant des tutos sur YouTube.
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Le 26 août 2015, alors que les championnats du monde d’athlétisme à Pékin viennent de démarrer depuis quelques jours, le monde entier découvre Julius Yego. Après avoir mordu sur sa première tentative, le Kenyan envoie son javelot à 92,72 mètres et fait exploser tous les compteurs (meilleur lancé en 14 ans, record d’Afrique et troisième meilleur score de l’Histoire de l’épreuve), lui donnant assez logiquement la médaille d’or. Autant dire que le jeune de 27 ans est attendu au tournant pour le début des épreuves olympiques prévu ce jeudi 18 août prochain.
Tous les yeux sont d’autant plus braqués vers le bonhomme qu’il semble être une anomalie dans la matrice du sport à haut-niveau. Lorsqu’il remporte la première place des Jeux Africains de 2011, alors que personne ne le connaît ou presque, tous les médias se ruent vers Julius pour l’interviewer, avec une question précise en tête : qui est ton coach et quel sont vos méthodes. Julius répond alors tout simplement : “YouTube“.
De la campagne kenyane aux JO de Rio
Le Kenya est une terre de coureurs, qui délivre parmi les meilleurs athlètes en course de fond. Donc quand le jeune Julius Yego, né dans un village à 300km au Nord-Ouest de Nairobi, se lance dans le sport, il s’essaye d’abord aux 100 mètres puis au cross — sans succès. Celui qui passait son temps à balancer des objets, des bâtons ou des cailloux, décide alors à l’âge de 14 ans de se mettre au lancer de javelot. Il faudra peu de temps pour que le jeune adolescent batte des records régionaux, puis nationaux, devenant le meilleur de son pays dans sa discipline alors qu’il n’est toujours pas majeur. Son record se place alors à 72,18 mètres, soit 20 de moins que de celui réalisé l’été dernier.
Frustré par le manque de moyen et d’infrastructure, il trouve un travail au sein de la police nationale qui lui permet de pratiquer autant que possible. Seulement, il n’a pas les moyens d’avoir un coach. À partir de 2009, une fois qu’il a 18 ans, le sportif décide d’apprendre des meilleurs comme il peut en se rendant régulièrement dans un cybercafé dans le coin. Il passe alors des heures à observer scrupuleusement des vidéos sur YouTube d’autres champions, comme le Tchèque Jan Železný ou le Norvégien Andreas Thorkildsen. Il y découvre des méthodes d’entraînement, des points techniques à améliorer. Bref, il se construit son propre schéma d’étude pour continuer à toujours lancer son javelot plus loin.
Une méthode qui portera ses fruits puisqu’il participera — in extremis — aux Jeux de Londres, en 2012. Son score n’est pas exceptionnel, mais déjà bien au-delà de ce que les autres lanceurs kenyans peuvent accomplir, à savoir 81,81 mètres (lors des phases de qualifications tout du moins). Une performance qui lui donne le droit à un stage en Finlande, où il dénichera son premier coach. Depuis, les résultats s’améliorent continuellement, dépassant d’années en années ses records un à un, jusqu’à ce fameux mois d’août 2015 où il décroche l’or à Pékin.
Et si tout laisse penser que Julius Yego devrait remporter logiquement son premier titre olympique d’ici quelques jours, l’athlète fait face à plusieurs problèmes. D’abord, le comité kenyan n’a pas pu payer le séjour complet pour son coach finlandais, qui ne sera là qu’un ou deux jours avant la finale. Mais surtout, les sportifs de sa délégation sont dans le collimateur des organisateurs de Jeux Olympiques, puisqu’il y a de sérieux soupçons de dopage du côté des sportifs kenyans. Malgré l’ascension impressionnante qu’il a connu, le lanceur doit donc encore faire ses preuves.