Interview : Édouard Sepulchre, ce photographe qui réinvente Paris

Interview : Édouard Sepulchre, ce photographe qui réinvente Paris

Si par “photo de Paris” vous entendez “contre-plongée de la tour Eiffel” ou “panoramique de Montmartre”, ce qui suit va vous surprendre.

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Édouard Sepulchre est un artiste parisien qui a quitté le monde de la publicité pour s’adonner à la photographie en 2010. Les photos de sa série Color Cube, prises à Paris et ses alentours, mettent en valeur structures, formes et couleurs, à tel point que l’identité de la capitale est relayée au second plan. Intrigués par son travail, nous lui avons posé quelques questions.

Konbini | Qu’avez-vous voulu transmettre à travers votre série Color Cube ?

Édouard Sepulchre | D’abord le plaisir des formes, des matières et de la lumière. Le principal est déjà de prendre plaisir à regarder ce que l’on voit, d’apprécier comment les choses sont agencées, organisées, éclairées. Tout ça raconte déjà une histoire. Ensuite, ce qui m’intéresse, c’est la possibilité de voyager avec des décors qui relèvent du banal. Certaines images me font penser aux États-Unis, à l’Europe de l’Est, à l’Afrique du Nord ou au Japon… D’autres sont difficiles à situer, voire non-identifiables. Mais pour le Parisien que je suis, toutes ces images me font voyager.

Cette volonté d’estomper une identité, c’est purement esthétique ou il y a un message ?

C’est à la fois esthétique et à la fois le plaisir d’être ailleurs. Il n’y a pas de message, juste le plaisir de transporter l’imaginaire dans un décor autre que celui qu’on connaît habituellement.

Vous avez beaucoup voyagé. Qu’aimez-vous retrouver en photographie dans un pays ?

On prend des photos sans toujours savoir pourquoi. Disons que je cherche souvent des références visuelles américaines. C’est le sujet d’une série en cours (Looking for America), mais cette tendance est assez transversale au reste. Parfois, je cherche des images énigmatiques, c’est le sujet d’une autre série (E.P.O). Parfois je veux juste créer un déplacement de regard, comme dans Lost in Construction. Mais, dans tous les cas, j’ai besoin qu’une image me “transporte” quelque-part. Être là et ailleurs en même temps.

Il y a peu de monde sur vos photos, juste quelques passants de temps en temps…

Si il y avait des Parisiens reconnaissables, le voyage n’aurait pas fonctionné. Donc, soit il ne faut personne pour offrir un espace de projection neutre, soit uniquement des gens qui servent le propos. En l’occurrence, dans certaines photos les passants renforcent le sentiment d’être dans une ville d’Afrique du Nord.

Alors qu’une photo montre souvent la réalité, vous avancez que les vôtres la reconstruisent différemment.

Qui a dit que la photo devait montrer la réalité ? On peut considérer qu’il y a toujours de la subjectivité dans le fait de prendre une photo. En revanche, cette subjectivité devient construction à partir du moment où elle devient consciente et qu’on essaye de la travailler un peu. Cela devient un petit espace intime, à la frontière du réel et de l’imaginaire.

Vous pensez qu’il faut sortir un peu du centre de Paris pour attraper ce genre de scènes ?

Pas obligatoirement, mais il se trouve que j’avais besoin de commencer par là. Ceci dit, on est quand même obligé de sortir un peu des quartiers haussmanniens si on veut se laisser surprendre.

Alors à quoi aurait ressemblé une photo typiquement parisienne ?

Il suffit de taper dans Google Images. On retrouve soit la dimension grandiose et classique de Paris, soit son coté romantique. Pour moi, les hauteurs du parking du boulevard Ney, sa lumière, sa vue panoramique et sa tranquillité, c’est tout aussi romantique.

Pour découvrir le travail d’Édouard Sepulchre plus en détails, c’est par ici.