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Boris : portrait d’un gentleman-graffeur

Boris : portrait d’un gentleman-graffeur

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Par Tomas Statius

Publié le

“Le crime est un sport national en Bulgarie”

L’histoire de Boris commence en Bulgarie. À 14 ans, c’est au contact d’un environnement “déviant” que celui-ci se met à peindre et à faire des photos. “Quand tu fais du graff, tu aimes prendre des photos, un peu comme un souvenir, c’est naturel”. À l’argentique d’abord, puis avec un appareil photo numérique, Boris se met à documenter son quotidien immédiat : 

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Je prends des photos de ce que je vois. Ce que je documente c’est ma vie de tous les jours. C’est mon journal intime imagé et je l’illustre depuis que j’ai 14 ans. J’ai été pas mal influencé par Vice dans ma manière de prendre des photos. Cette vie trash, je l’ai trouvée en Bulgarie et dans toute l’Europe de l’Est d’ailleurs. En Bulgarie, le crime c’est vraiment un sport national. Tout le monde fait quelque chose d’illégal.
Ce qui m’intéresse ? Raconter des histoires avec mes photos. C’est aussi pour cette raison que je me suis mis à la vidéo. Là tu parviens à saisir l’ambiance des situations, le mouvement des personnages. Mais malheureusement jamais le goût [rires].

Paris : ville de lumière et de galère

Niveau photo, alors qu’il se fait la main sur tout ce que l’ex-république soviétique a de plus équivoque et de surréaliste – “là-bas t’as souvent l’impression d’être dans un film de Kusturica” explique t-il – Boris se prend à rêver plus grand. Ses photos rejetées des rédactions de Vice et d’autres magazines spécialisés, il rassemble de l’argent, ses affaires et saute dans l’avion direction Paris  : 

Adolescent, je voulais me tirer de Bulgarie et m’installer en Europe de l’Ouest. Je trouvais que Paris était un centre culturel important et je me suis dit que je pourrais développer mes idées plus aisément ici que là-bas. Je suis arrivé avec un sac à dos et je suis resté.
Ce qui m’intéresse, plus que le graffiti, c’est la vie de ceux qui le pratiquent. Pour moi, une pièce finie n’a pas un grand intérêt. C’est ce que j’essaie de montrer avec The Grifters. 

“La prison te change”

En mai dernier, la nouvelle tombe. Interpellé par la cellule anti-graffiti, Boris est incarcéré pendant quatre mois dans l’attente de son jugement. Comme pièce à conviction : une vidéo où l’intéressé fait le zouave façon “Harlem Shake” devant un métro peint. L’affaire fait le buzz. La police tient son gros poisson.

Quand on l’interroge sur son arrestation, Boris ne s’en étonne en aucun cas, lui qui montrait son visage à chaque vidéo qu’il publiait :

Bien sûr que je m’attendais à être arrêté ; ça a pris un bout de temps. Afficher mon visage c’était surtout une manière de désacraliser les choses. Comme une manière de dire aux graffeurs : “arrêtez de vous prendre au sérieux, le graffiti ce n’est rien“.

Son séjour au trou, Boris ne l’évoque que par touches. Le jeune homme parle de longues vacances où il a eu le temps “de réfléchir, de lire et faire du sport”. La prison l’a changé, conclut-il, rendu plus fort à accomplir ce qui compte vraiment. Cette première exposition est une manière de remettre la machine en branle. Tourner une parenthèse et entamer un nouveau chapitre de son épopée.
Pour retrouver Boris, retrouvez-le sur sa page Instagram, sur Facebook et sur The Grifters