Un étude réalisée auprès de 150 participants montre que 30 % des sondés commettraient un viol s’ils ne risquaient aucune répercussion judiciaire.
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Encore des chiffres qui donnent le haut-le-cœur : 30 % des hommes ne verraient pas de problème à commettre un viol s’ils étaient persuadés de ne pas être poursuivis en justice. Cette enquête date de 2016 mais les résultats semblent sortir tout droit du passé. C’est un chercheur en psychologie et en criminologie, Massil Benbouriche, qui a mené l’étude pour illustrer sa thèse sur l’influence de l’alcool et de l’excitation sexuelle sur le consentement, rapporte le quotidien montréalais La Presse.
Un questionnaire a été soumis à 150 participants âgés entre 21 et 39 ans, issus de milieux sociaux différents. Dans le rapport, il est mentionné qu’aucun d’entre eux ne souffre de pathologie mentale et chacun affirme n’avoir jamais commis de violences sexuelles dans le passé.
Tous ont dû boire un verre d’alcool. Un premier groupe a regardé un documentaire du National Geographic, et un autre a dû visionner des extraits de films pornographiques. Massil Benbouriche dit s’être basé sur des tests proposés dans les années 1980 dans le cadre de recherches sociologiques sur le consentement.
Les sujets ont pu écouter une simulation d’une situation très commune : Marie et Martin sont deux personnes fictives qui rentrent chez Marie après une soirée passée dans un bar. La question suivante a été posée :
“Si vous étiez absolument certain que Marie ne porte jamais plainte et que vous ne soyez jamais poursuivi, quelles seraient les chances d’avoir une relation sexuelle avec Marie alors qu’elle n’est pas d’accord ?”
C’est par simple curiosité que Massil Benbouriche a intégré cette interrogation à sa recherche. Il était loin d’imaginer avoir affaire à des réponses aussi scandaleuses et glaçantes : 30 % des hommes questionnés ont affirmé que oui, ils pouvaient envisager une relation sexuelle non consentie avec une femme, dans ce genre de situation.
Le viol encore et toujours banalisé
Le doctorant, qui a soumis sa thèse au centre de recherche en psychologie, cognition et communication de l’Université de Rennes 2 et à l’école de criminologie de l’Université de Montréal, a tenu à donner des précisions nécessaires :
“On n’est pas en train de dire que 30 % des hommes commettraient une agression sexuelle […] Il y a un écart entre ce que vont dire les gens dans un laboratoire et ce qui va se passer dans la ‘vraie’ vie.”
Le sondage soulève le problème de la banalisation du viol. Dans la tête de certains (et parfois certaines), le viol est un crime qui peut être (à tort) relativisé selon la situation. Une enquête réalisée en France par Ipsos, publiée en mars 2016, révélait que l’opinion publique était particulièrement sévère avec les victimes d’agression sexuelle : pour 40 % des gens, elles sont en partie responsables si leur comportement ou leur mise vestimentaire est provocant en public.
Aujourd’hui encore, on a tendance à apprendre aux filles et aux femmes à se méfier des hommes et d’adapter leur façon de vivre selon les dangers qui les entourent, que ce soit en soirée ou dans la rue. Une campagne de publicité hongroise avait été largement critiquée sur les réseaux sociaux parce qu’elle culpabilisait les victimes de viol.
Heureusement, quelques pays font preuve de bon sens dans la lutte contre la criminalité sexuelle. En 2012 au Canada, par exemple, les autorités ont placardé des affiches dans les lieux publics, qui visaient directement les agresseurs et les violeurs, sans blâmer les victimes.
Selon l’étude de Massil Benbouriche, l’alcool ingéré par un violeur n’est pas une circonstance atténuante de son crime. Son sondage a démontré que ceux qui partagent l’idée selon laquelle les femmes méritent le viol, ou qu’elles peuvent y résister, seront plus à même de commettre des crimes sexuels sous emprise de l’alcool que les autres.
Ainsi, si le viol est autant banalisé c’est parce qu’il existe des lacunes en termes d’éducation auprès des garçons. Il est primordial de les sensibiliser sur le principe du consentement pour mettre fin aux violences sexuelles faites aux femmes.