La génération Y gagne beaucoup moins bien sa vie que les précédentes

La génération Y gagne beaucoup moins bien sa vie que les précédentes

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Par Thibault Prévost

Publié le

Une étude d’ampleur publiée par le Guardian révèle que si les jeunes des années 1980 vivaient mieux que la moyenne, la génération Y, elle, se situe 20 % en dessous.

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On a déjà beaucoup écrit sur cette génération Y, entité démographique polymorphe et insaisissable composée de jeunes nés du début des années 1980 au milieu des années 1990 : on a scruté son comportement, croqué son portrait-robot, disséqué son impact économique et autopsié ses habitudes de consommation pour essayer de comprendre comment elle allait soi-disant foutre en l’air les structures séculaires de l’économie de marché.

Avec la publication, lundi 7 mars, d’une étude du Guardian, on peut au moins être certain d’une chose : la génération Y gagne moins bien sa vie que les précédentes. Jeune, plains-toi, les données te donnent raison !

Grande première dans l’ère industrielle

Menée sur sept pays occidentaux  à partir de la plus grande base de données sur les revenus au monde (le Luxembourg Income Study, ou LIS), l’étude du quotidien britannique livre un analyse déprimante : quand les jeunes des années 1980 gagnaient mieux leur vie que la moyenne des gens dans leur pays, les 18-35 ans d’aujourd’hui gagnent en moyenne 20 % de moins que leurs contemporains.

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En France,entre 1978 et 2010, les 65-69 ans ont vu leurs revenus augmenter de 49 % et leurs aînés (70-74 ans) de 30 % par rapport à la moyenne nationale. Durant cette même période, les revenus des 25-29 ans ont reculé de 8 % par rapport à cette moyenne. En d’autres termes, si les revenus absolus des jeunes ont évidemment augmenté avec les années, ils n’ont pas suivi le rythme du reste de la population, ce qui a prodigieusement creusé les inégalités de richesses.

Dans le même temps, les retraités ont vu leurs revenus exploser. En France, précise le Guardian, les néo-retraités génèrent plus de revenus disponibles que les familles composées de personnes de moins de 50 ans, un fait économique absolument inédit ; aux États-Unis, les moins de 30 ans sont même en moyenne plus pauvres que les retraités ; au Royaume-Uni, enfin, le revenu des retraités a augmenté trois fois plus vite que celui des jeunes professionnels. À la lumière de ces nouvelles données, le journal assène cette conclusion terrible:

“C’est probablement la première fois dans l’ère industrielle, à l’exception des périodes de guerre ou de désastres naturels, que le revenu des jeunes adultes est tombé aussi bas en comparaison de celui du reste de la société.”

Une combinaison de facteurs parfaitement désastreuse

Plus qu’une simple opposition manichéenne entre vieux pleins aux as et trentenaires fauchés comme les blés, l’étude exhaustive du Guardian confirme ce que l’on soupçonnait déjà : d’un côté, la génération Y doit composer avec les crises de la dette, de l’emploi, de l’immobilier et du pouvoir d’achat et assumer la corrosion du système d’économie de marché mondialisée ; de l’autre, sa situation est sans cesse comparée à celle des baby boomers – les adultes âgés aujourd’hui d’au moins une soixantaine d’années, partis avec l’avantage incomparable d’un climat socio-économique favorable. Le contraste n’en est que plus criant.

Il semble pourtant vain de mettre face à face ces deux générations, tant leurs problématiques et leurs langages diffèrent. Les baby boomers ont grandi dans une combinaison de facteurs parfaite, qui leur a conféré un avantage inégalé dans l’histoire moderne. La génération Y, elle, se coltine l’inverse : une combinaison de facteurs parfaitement pourrie, qui provoque déjà de larges mutations sociétales.

En Italie et en Espagne, écrit le Guardian, le manque de travail a poussé une génération entière de jeunes précaires à rester chez ses parents, ce qui devrait avoir “de graves implications sur les taux de natalité et les structures familiales”, alors que les pyramides des âges européennes ressemblent de plus en plus à des pagodes.

Pour le moment, le déséquilibre est en partie compensé par la génération centrale, celle des 40-65 ans, au zénith de sa croissance, qui joue le rôle de contrepoids économique.  Bientôt, pourtant, cette génération accostera à son tour sur les berges de la retraite. Et notre génération, alors tout juste extirpée de la précarité, ne pourra probablement pas la payer.