Dans un parc en Thaïlande, une tortue de mer âgée de 25 ans s’est retrouvée l’estomac complètement obstrué par cinq kilos de pièces de monnaie, que des visiteurs avaient lancées dans sa mare afin d’obtenir de la chance.
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La prochaine fois que vous faites un vœu en lançant une pièce dans un point d’eau, vérifiez qu’aucun animal n’y vive, pour éviter qu’il ne l’ingurgite. C’est ce qui est arrivé à Omsin (“Tirelire” en français), la tortue mascotte d’un parc de la ville de Sri Racha, située au Sud-Est de Bangkok. Depuis des années, les touristes et passants jettent des pièces dans sa mare, une tradition censée apporter chance et longévité. L’histoire ne dit pas si les vœux des badauds se sont réalisés, mais ce qui est sûr c’est que l’animal a avalé au fil du temps 915 pièces, soit l’équivalent de cinq kilos de métal.
Les pièces coincées dans l’estomac de cette tortue femelle étaient si encombrantes que sa carapace ventrale commençait à se percer, la menaçant d’une grave infection. Heureusement, une équipe de vétérinaires est intervenue à temps pour l’opérer et la débarrasser de chacune de ces pièces, afin d’abréger ses souffrances et la sauver d’une mort prématurée. En effet, la masse des pièces représentait 10 % du poids de l’animal, l’empêchant ainsi de flotter et de nager correctement.
Tirelire a dû être transportée au centre de recherche aquatique de l’hôpital Chulalongkorn de Bangkok. C’est là que l’équipe vétérinaire a réalisé un scanner révélant les raisons de son agonie. Nantarika Chansue, la vétérinaire qui l’a opérée, exprime sa colère dans le Guardian : “J’étais furieuse que des humains, peut importe la raison qui les a poussés à agir ainsi, aient ainsi pu blesser cette tortue.” L’animal été anesthésié et opéré pendant quatre heures, le monceau de pièces étant si important que l’incision de 10 centimètres faite dans sa carapace ne permettait pas de tout extraire d’un coup. Une partie des pièces étaient dans son organisme depuis si longtemps qu’elles étaient partiellement dissoutes ou corrodées.
Non, jouer avec des animaux n’apporte pas du “bon karma”
S’opposant à la tradition “porte-bonheur”, Rungroj Thanawongnuvej, doyen de la Faculté des sciences vétérinaires de Chulalongkorn, souligne que le simple geste de jeter des pièces dans la mare de la tortue est synonyme de mauvais karma, puisqu’il nuit à un animal. En Asie, de nombreuses traditions censées apporter de la chance et impliquant des animaux sont en réalité très néfastes. C’est par exemple le cas de la libération d’oiseaux emprisonnés dans des cages : ces volatiles –appartenant souvent à des espèces menacées – sont capturés, avant d’être relâchés moyennant leur rachat par une pièce. Stressés et agglutinés les uns contre les autres, il n’est pas rare que cette pratique les fragilise ou les tue.
Cet usage semble être une interprétation erronée du rituel bouddhiste de la libération d’animaux. À l’origine, celui-ci consistait à racheter des animaux destinés à servir de nourriture pour les relâcher dans la nature et donc sauver des vies (potentiellement celles d’ancêtres réincarnés). Mais aujourd’hui la superstition entretient surtout des commerces douteux ou “attrape-touristes”. La tradition se retourne ainsi contre elle-même, puisqu’au lieu d’être sauvés les animaux sont en fait dérangés et blessés.
Soucieux de rattraper cette mauvaise action, des Thaïlandais ont créé une cagnotte d’environ 400 euros pour financer l’opération de Tirelire, qui devrait s’en sortir saine et sauve. Pour rappel, une tortue verte de mer vit en moyenne 80 ans. L’espèce figure également sur la liste des animaux en danger dressée par l’Union pour le conservation de la nature.