Charlottesville : pourquoi faut-il bien parler de “néonazis” et pas d'”alt-right”

Charlottesville : pourquoi faut-il bien parler de “néonazis” et pas d'”alt-right”

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Edward Norton dans “American History X”

Après le drame de Charlottesville, pour parler des idéologies extrêmes, le choix des mots fait débat sur Internet.

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Le samedi 12 août, à Charlottesville, en Virginie, un rassemblement de suprémacistes américains blancs a causé des dizaines de blessés et une mort, quand une voiture a volontairement fauché la foule protestant contre l’évènement. Heather Heyer, 32 ans, a perdu la vie. Le conducteur, James Field, a pour sa part été incarcéré.

Au-delà de la violence et de la symbolique de l’évènement, c’est aussi une guerre sémantique qui s’est amorcée dans les médias et sur les réseaux sociaux. La masse qui a défilé à Charlottesville était composée d’une multitude de groupuscules d’idéologies diverses : suprémacistes, membres du KKK, et tout le spectre de la “droite alternative”, ou “alt-right” – une mouvance qui se rattache à l’ère Trump, certains sites Internet, les réseaux sociaux et des “médias alternatifs” (comprenez d’extrême droite).

Quelques heures après les évènements, le président Trump (pourtant prompt à tweeter rapidement), a appelé à l’unité.

Traduction : “Nous devons TOUS être unis et condamner tout ce que la haine représente. Il n’y a pas de place pour ce genre de violence en Amérique. Unissons-nous.”

Choix des mots

Cependant, l’administration Trump condamne la violence de “plusieurs côtés”. En gros, le président ne veut pointer personne du doigt. Une réaction, ou plutôt une absence de réaction, qui émeut et réjouit certains cercles suprémacistes.

Traduction : – “J’ai demandé à la Maison-Blanche ce que le président avait voulu dire par ‘de tous les côtés’. Voici la réponse d’un officiel de la Maison-Blanche.”
– “Le président tenait à condamner la haine, l’intolérance et la violence venant de toutes parts. Il y a eu de la violence de la part des manifestants et des contre-manifestants.”

Ce choix minutieux des termes va jusqu’à séparer la Maison-Blanche en deux groupes : ceux qui n’ont pas peur des mots et ceux qui se retiennent d’utiliser toute étiquette. Ainsi, Ivanka Trump, la très influente fille de Donald, n’a pas hésité à employer le terme de “néonazi”, de même que Mike Pence, le vice-président (qui est pourtant très à droite). Certains sénateurs républicains commencent aussi à critiquer le manque de positionnement de Donald Trump.

Traduction : “Il ne devrait pas y avoir de place dans notre société pour le racisme, le suprémacisme blanc et les néonazis.”

Comment faut-il appeler ces groupuscules, dont certains membres affichent clairement des slogans racistes et font des saluts nazis ? Faut-il appeler un chat (néonazi) un chat (néonazi) ? Aussi bien en France qu’aux États-Unis, des internautes dénoncent les euphémismes employés par les médias.

Mike Godwin est le créateur du fameux “point Godwin”. Célèbre morceau de rhétorique sur Internet et dans la vie de tous les jours, le point Godwin est le moment où, ne sachant plus trop quoi avancer comme argument dans une discussion (ou une dispute), on finit par sortir un atout sur lequel il est difficile de rebondir : comparer son adversaire à Hitler ou aux nazis. Et quand bien même le concept de “point Godwin” a depuis sa création été critiqué et dévoyé, il se trouve que son papa invite tout un chacun à qualifier ces groupuscules de “néonazis”.

Traduction : “Je vous en prie, comparez ces crétins à des nazis. Encore et encore. Je suis avec vous.”

Déjà en novembre dernier, un internaute répondant au pseudo de “elseloop” avait pris le taureau par les cornes, en mâchant le travail de tous ceux qui estiment que les médias ne font pas leur travail jusqu’au bout. Il a ainsi créé une extension pour le navigateur Google Chrome : “Denormalize”. Si vous l’installez, toutes les occurrences de “alt-right” seront automatiquement remplacées par “néonazis”. “Parce que leur façon de remarketer leur haine ne devrait pas détourner de qui ils sont vraiment. Maintenant, plus que jamais, les mots ont un sens”, écrit elseloop en description.