Affaire Fillon : “En Norvège, les personnalités politiques démissionnent pour bien moins que ça !”

Affaire Fillon : “En Norvège, les personnalités politiques démissionnent pour bien moins que ça !”

Correspondante à Paris du quotidien norvégien de référence, Aftenposten, Vibeke Knoop Rachline revient sur la polémique suscitée à l’étranger, et notamment en Europe du Nord, sur par l’affaire Fillon ainsi que sur les liens étroits entre la presse politique française et le monde politique.

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Speech | Quelle est la vision globale de l’affaire Fillon en Norvège ?

Vibeke Knoop Rachlin | L’incrédulité. D’abord par les faits qui sont reprochés à François Fillon, fraîchement désigné comme le principal candidat de droite, et ensuite parce qu’il ne se retire pas. Il n’est pas encore mis en examen et encore moins jugé, mais les accusations sont graves alors qu’il se présente à la plus haute fonction du pays.

Pour tout avouer, les Norvégiens trouvent cette affaire bien “française”. Une autre manière de vous dire que la France n’a pas vraiment bonne réputation en la matière…

Mauvaise réputation ? C’est-à-dire ?

La France est vue comme un pays pas très sérieux, où le mensonge et/ou la triche sont fréquents. Et avec cela… plutôt corrompu !

Donc un scénario similaire est inimaginable en Norvège ?

Difficile à savoir puisque c’est un royaume, mais pour lePremier ministre, chef du gouvernement, oui, c’est impensable. Chez nous, des ministres ont démissionné pour moins que cela. Un exemple : en 2008, Manuela Ramin-Osmundsen, d’origine française, deviens ministre de l’Enfance et de la Parité. En engageant l’une des ses amies comme médiatrice, elle déclenche un scandale. Elle est alors obligée de démissionner, mais pour une autre raison : elle a menti sur la nature de ses liens avec ladite médiatrice à son patron, le Premier ministre.

Quel regard journalistique portez-vous sur la dernière conférence de presse de François Fillon ?

L’incrédulité, encore. François Fillon commence cette séquence médiatique en regardant les Français dans les yeux et en disant que tout était légal, puis il déclare qu’il ne répondra à aucune question sur l’affaire – il se moque des journalistes ! Je trouve aussi que les confrères ont été bien timorés. Chez nous, ce serait impensable.

Comment expliquez-vous cette complaisance de la presse politique française ?

Probablement, parce que les journalistes se disent qu’il a malgré tout une (petite) chance d’être élu et que cela pourrait compromettre leurs relations avec le futur pouvoir…

Justement, quels sont les liens entre le monde politique et la presse en Europe du Nord ? 

Nous y mettons le plus de distance possible. L’amitié est déconseillée. Une autre différence notable : le respect mutuel. Les politiques sont habitués et entraînés à répondre à des questions directes et précises. Lors des élections, si un journaliste adhère à un parti politique, il est mis à l’écart, provisoirement.

Comprenez-vous que François Fillon poursuive sa campagne ?

Ce que je comprends, c’est qu’il n’est pas près de lâcher. Et ce, sans aucun doute pour deux raisons : il “détient” les 500 signatures nécessaires et il a les moyens financiers de poursuivre cette campagne. Pour l’instant, aucun plan B ne semble possible.