Quora : rencontre avec un vulgarisateur scientifique aux 8000 contributions

Publié le par Konbini,

Philippe Guglielmetti qui se définit comme un "blogueur optimiste" est docteur en sciences et top contributeur sur l'application.

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Aux côtés des journalistes et des vidéastes de YouTube, il existe une troisième catégorie notable d’individus qui propose de la vulgarisation scientifique sur Internet : les “quorans”.

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Philippe Guglielmetti est ingénieur en informatique à Lausanne, en Suisse. À 57 ans, il fait partie des utilisateurs les plus actifs sur le Quora francophone, la plateforme de questions-réponses née aux États-Unis en 2009 et qui met en relation, dans la plupart des cas, esprits en questionnement et vulgarisateurs décomplexés.

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Au fur et à mesure de son évolution professionnelle et au fil de ses recherches et publications, ce docteur en sciences un peu touche-à-tout a collaboré avec l’association du Café des sciences qui regroupait déjà, il y a dix ans, les premiers vulgarisateurs scientifiques du web. 

Il a ensuite officié sur son blog (drgoulu.com) et il rode désormais sur Quora, s’évertuant à rendre accessible sa multitude de centres d’intérêts, à savoir l’astrophysique, les mathématiques, l’informatique ou encore, plus récemment, la biologie.

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Pour des raisons de clarté, l’interview a été éditée.

Konbini Techno | Avec votre travail, votre vie de famille et vos activités personnelles, comment trouvez-vous le temps de répondre à toutes ces questions ?
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Philippe Guglielmetti | Déjà je ne dors pas beaucoup… et ça c’est une chance. Je bois aussi beaucoup de café et j’habite tout près de mon travail, donc je ne perds pas trop de temps. Pour le reste, c’est une question de choix mais aussi un peu d’addiction, comme pour le café. Et je ne fais pas de sport, ça aide aussi.

Je m’applique à donner des réponses d’autant plus détaillées que je trouve les questions sincères, même si je publie souvent des réponses courtes, il ne faut pas se leurrer !

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Avez-vous déjà réponse à tout ou bien vous documentez-vous, comme le commun des mortels ?

Le plus intéressant sur Quora reste évidemment d’apprendre. Je ne fais pas qu’étaler mon maigre savoir, je m’attelle aussi à documenter mes réponses, à faire des recherches et à consulter les contributions d’autres utilisateurs. Les interactions entre les contributeurs sont souvent très enrichissantes : certains font des articles kilométriques extrêmement documentés. Moi, je tente d’être le plus concis possible, pour le reste j’ai mon blog.

Page contributeur de Philippe Guglielmetti sur l’application

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Ne devriez-vous pas communiquer d’une manière plus “classique” pour vulgariser la science ?

Absolument pas, c’est même tout le sens de la vulgarisation. On a la chance de l’avoir cette liberté de ton. Parfois je dérive un peu sur les questions complotistes, créationnistes… Certains sujets me font réagir et je dois faire un effort pour rester poli, mais on joue un peu sur la ligne de la provocation.  Mon enfance a baigné dans les missions Apollo et quand je vois des théories du complot je saute un peu au plafond.

Deux des nombreux exemples de réponses “décalées” qu’on peut trouver sur l’application (notez que cela reste informatif !)

Ceci dit, ces questions sont à mon sens toujours intéressantes puisqu’elles posent des réflexions sur la place du rationnel et du scientifique dans notre société. On communique par des moyens technologiques assez extraordinaires mais cela n’empêche pas certains de penser qu’on peut lancer des malédictions en plantant des aiguilles dans des poupées. Il faut montrer que la science n’est pas une croyance de plus, qu’il y a une cohérence et une méthode derrière.
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Est-ce que vous répondez à des questions qui ne font pas partie de vos domaines de prédilection ?

De plus en plus ! Je m’intéresse à la science en général et finalement, dans ce domaine, tous les sujets sont un peu connectés. En tant qu’informaticien je réagis principalement à des questions plutôt terre à terre sur l’informatique, mais aussi autour de thèmes liés à la physique et l’astrophysique, qui sont plus du ressort de mes intérêts personnels. Ces derniers temps, je me suis pris au jeu de répondre à des questions sur la biologie, l’évolution ou sur comment la vie est apparue sur Terre. C’est très intéressant.

Vous n’avez jamais envisagé de vous diriger vers l’enseignement ?

J’ai postulé plusieurs fois et on ne m’a pas retenu… tout bêtement ! En réalité, ça m’est déjà arrivé de donner quelques cours. Seulement, je ne suis pas vraiment sûr d’être un bon pédagogue devant une salle. Si les gens veulent me lire, qu’ils le fassent : je me sentirais mal d’imposer ce que j’ai à dire.

Vous préférez les réponses simples aux développements complexes ?

J’essaie au possible de rester à un niveau intelligible pour le grand public. C’est peut-être un de ses problèmes aussi : l’application est très étendue “verticalement” en termes de complexité. Le plus difficile reste d’évaluer le niveau de la personne qui pose la question.

Je tente surtout de répondre à une personne en particulier… et si on peut mettre quelques phrases marrantes pour attirer un public plus large pourquoi pas. J’essaie aussi – au possible – de rediriger certains points de mes réponses vers des pages Wikipédia pour apporter un petit plus.

Exemple de réponses récentes de Philippe Guglielmetti

Avez-vous déjà rencontré d’autres contributeurs dans la vie réelle ?

Il y a ici à Lausanne un quoran qui organise des rencontres dans un bar à bière. Certains sont très actifs mais dans des domaines très différents, comme la biologie ou le développement personnel. Et même si d’autres ne sont plus vraiment présents sur l’application, vu qu’ils sont dans le coin, c’est l’occasion de se voir. C’est toujours très sympa.

Vous comptez continuer à publier à ce rythme ?

J’y suis, j’y reste. Je n’ai aucune raison de changer mon niveau de contribution. Cela étant dit, je me rends compte que je réponds parfois plusieurs fois aux mêmes questions. Il y a un petit sentiment de lassitude. On observe aussi beaucoup d’importations de questions du Quora anglophone vers le nôtre, et c’est vrai que c’est l’un des aspects très discutables du fonctionnement de l’application.

On aimerait que cela se fasse dans l’autre sens, bien que cela démontre assez clairement du fossé culturel qui existe entre nos pays. C’est encore une fois assez intéressant. Quoi qu’il en soit, je prends toujours beaucoup de plaisir à utiliser l’application et je ne crois pas que je m’arrêterai de sitôt !


Et vous, que pensez-vous de Quora ? Écrivez-nous à hellokonbinitechno@konbini.com !