À Hong Kong, le Bluetooth comme antidote à la surveillance chinoise

Publié le par Thibault Prévost,

(© Miguel Candela/SOPA Images/LightRocket via Getty Images)

Pour communiquer sous les radars de la censure, les manifestants utilisent Bridgefy, une appli pour communiquer via Bluetooth.

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Vous êtes un manifestant hongkongais, en peine manifestation contre votre gouvernement et l’influence grandissante de Pékin. Depuis plusieurs semaines, la répression policière et la surveillance s’intensifient, et vos leaders, comme Joshua Wong, commencent à disparaître dans les geôles du régime.

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Pour communiquer avec vos camarades ou vous tenir informés de l’agenda des manifestations et des derniers rebondissements dans l’avancée du mouvement, vous devez absolument trouver un réseau sécurisé, que les autorités hongkongaises ne pourront pas surveiller et que Pékin ne pourra pas censurer (oubliez WhatsApp et Telegram, trop exposées à l’œil du gouvernement chinois). Comment faites-vous ? Vous laissez complètement tomber Internet (et les réseaux mobiles classiques, mais cela va sans dire) et vous passez par le Bluetooth.

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Le nœud du problème

Dans le gigantesque champ de bataille cyberpunk qu’est devenu le mouvement social hongkongais, Forbes s’intéresse plus particulièrement à une technologie alternative appelée “mesh network”, ou “réseau maillé” dans la langue de Jacques Toubon. Cette topologie particulière utilise les connexions Bluetooth des téléphones pour les connecter entre eux à tout moment en pair à pair, ce qui forme une sorte de maillage électronique, local et décentralisé, par lequel les informations transitent entre les interlocuteurs. Chaque machine devient un routeur. Impossible à surveiller, impossible à déconnecter.

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Si suffisamment de personnes transforment leurs smartphones en “nœuds” Bluetooth sur un petit périmètre, les voilà totalement indépendantes des réseaux contrôlés par les autorités et les opérateurs télécoms. En manif, la solution est idéale. (La solution fonctionne également très bien en festival, dans un stade, ou dans toute situation de saturation des réseaux mobiles.) Et les militants l’ont bien compris : le 3 septembre, Forbes raconte que la start-up californienne Bridgefy, qui fournit une application de messagerie mesh, a vu ses téléchargements exploser : + 4 000% sur les 60 derniers jours. Selon le PDG de l’appli, 60 000 Hongkongais ont téléchargé son programme la semaine dernière.

De la Zad à l’Iran

Si cette technologie reste marginale à l’échelle mondiale, elle est cependant loin d’être inédite. Apparue en 2003 à Berlin, elle fait pour la première fois parler d’elle en 2014 lorsque des manifestants de Hong Kong utilisent massivement FireChat, une application créée par un Français, Micha Benoliel, installé en Californie. On retrouvera aussi FireChat du côté de la Zad de Notre-Dame-des-Landes, en Iran, à Taïwan… Partout où les réseaux traditionnels ne suffisent plus à assurer la confidentialité des communications, explique alors Le Monde.

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Pourtant, le réseau mesh n’est pas inviolable, loin de là. Il s’agit plutôt d’une rustine, une solution temporaire pour contourner des réseaux trop surveillés et censurés. Sur le forum d’ingénieurs Hacker News, des utilisateurs rappellent que tout ce qui n’est pas open source (comme FireChat et Bridgefy, dont les conditions d’utilisation sont critiquées) peut potentiellement vous trahir, et recommandent aux manifestants de privilégier des services comme Serval.

Open source ou pas, le réseau mesh souffre encore d’un point faible rédhibitoire pour certains activistes : il ne permet pas de chiffrer les communications, qui peuvent donc être facilement interceptées. Entre l’anonymat et la liberté de communiquer, les manifestants hongkongais doivent malheureusement choisir.