On a vu le Snyder Cut de Justice League et il est à la hauteur de ses ambitions

Publié le par Arthur Cios,

Zack Snyder ne s'est pas foutu de notre gueule.

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Non sans vouloir user de grands mots pour rien, il semble que la sortie de cette nouvelle monture de Justice League le 18 mars soit quelque chose d’unique, pour l’instant, dans la grande histoire du septième art.
Comprenez-nous bien : fournir un montage différent de celui qui a déjà été montré en salle est une pratique courante. Apocalypse Now, Le Parrain, Blade Runner, Zombie, Léon ou même une bonne partie de la filmographie de Michael Mann ou de Peter Jackson : tous ces longs-métrages ont différentes versions qui circulent, en fonction de leurs sorties en salle ou en physique.
Mais cette version 2.0 de Justice League est unique dans le sens où, au départ, elle n’était pas prévue et c’est une grande première pour un film de ce genre de franchise super-héroïque. Réclamée depuis 2019 par des fans de Snyder, cette nouvelle version du Avengers version DC Comics est aussi inattendue que longue, puisqu’elle dure quatre heures, soit le double de la version sortie au cinéma en 2017.
Zack Snyder, déjà aux commandes de Man of Steel et Batman v Superman, avait tourné Justice League avant de se retirer du projet pour s’occuper de sa famille, suite au suicide de sa fille. La Warner, qui au cours du processus n’était pas ravie de la proposition trop sombre de Snyder, avait déjà demandé l’aide de plusieurs scénaristes pour alléger le film avant et pendant la production. Et un certain Joss Whedon (le créateur de Buffy et réalisateur des deux premiers Avengers) avait été recruté pour remplacer Snyder à son départ du projet. Il en vint à remodeler intégralement le film.
Les reshoots, qui ne sont habituellement là que pour compenser quelques lacunes, ont duré deux mois, coûté 25 millions de dollars supplémentaires et changé l’esprit et le fond du long-métrage. À sa sortie, la version de Joss Whedon a été conspuée par les critiques ciné comme par le public. Trois ans et demi plus tard, nous voilà enfin en capacité de voir la version de Justice League vue et (re)corrigée par Zack Snyder.

La sortie directement sur HBO Max et en VOD dans le reste du monde lui a permis de se lâcher et d’aller plus loin qu’il n’aurait jamais pu le faire, avec quatre heures d’images au compteur, un travail de plusieurs mois et un coût de 70 millions de dollars supplémentaires.
Se pose alors une question essentielle : est-ce que tout ce bazar, tout cet argent dépensé, toutes ces pétitions virtuelles, tout ce marketing valaient finalement le coup ? Allez : magnéto, Bruce.

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Un film plus sombre

Impossible de ne pas faire un comparatif entre les deux versions. Que ce soit sur la longueur, la forme, la couleur ou même le fond de l’histoire, les films différent vraiment. Et pour le mieux.
Quand on dit que Snyder a rajouté deux heures de film, c’est un faux postulat. Il en ajouté beaucoup plus, puisqu’il a fait sauter une bonne partie des séquences tournées par Whedon, comme le début (la scène de Superman filmée à l’iPhone, puis quand Batman attaque un cambrioleur pour attirer un paradémon sur un toit de Gotham) ou la longue séquence finale de combat contre Steppenwolf, qui est à 75 % différente.

Ce qui est intéressant, c’est que Snyder nous donne une véritable leçon sur l’art du montage. Sur comment, avec le même matériel, on peut transformer un film en tout autre chose. Ne vous méprenez pas, il ne transforme pas son blockbuster hollywoodien en un film de François Ozon. L’intrigue reste – à quelques gros détails près – la même. Mais on s’amuse à voir des scènes placées plus tôt, d’autres bien plus tard. Un exemple précis et tout bête (qui ne sera donc pas un spoiler) : la scène où Lois se réveille, seule dans son lit, confrontée à la mort de son amant, arrive à la sixième minute chez Whedon, au cours d’un montage où la haine règne sur le monde, et à 2 h 30 chez Snyder. Une manière, pour le cinéaste, de se réapproprier ses rushes comme son film.
Mais plus encore que les modifications de structure, qui se ressentent surtout sur la première moitié du film (Snyder passe 1 h 30 à raconter ce que Whedon faisait en 30 minutes), le réalisateur donne logiquement plus d’ampleur à son histoire. Toutes les scènes sont rallongées, plus consistantes. La plupart du temps, cela permet d’avoir un rythme plus posé et beaucoup moins de “cuts” désagréables, comme en fournissait la première version, ou d’être un peu moins dans la facilité, la lourdeur ou le cliché. Parfois, cela semble dispensable. Mais cela ne rend pas le tout indigeste, ni trop long pour autant. Et surtout, cela permet de prouver que l’on peut raconter peu ou prou la même histoire d’une autre manière — meilleure ici, en l’occurrence.
Et puis, difficile d’en vouloir à Snyder. Quand on voit ce qu’essaie d’entreprendre le réalisateur américain et sa vision, on comprend l’ampleur de la trahison entreprise par Whedon et toutes les têtes pensantes de la Warner. Dans la forme, c’est déjà le format qui change, terminée la version classique 16:9, place à un format carré, proche du 4:3. Plus télé, peut-être, il change un peu la donne.
Aussi, ce nouveau Justice League se veut sombre et l’étalonnage a été modifié en conséquence : les couleurs pop de la première version ont disparu au profit d’un ton grisâtre, certes contrasté, mais plus proche de la version longue de Batman v Superman. Enfin, la musique se veut plus ambitieuse, moins pop (exit le clip d’Aquaman alcoolisé sur fond des White Stripes), affirmée par des séquences plus sanglantes, dans lesquelles le cinéaste n’a pas peur de montrer de l’hémoglobine qui sort des corps exterminés par les démons, dieux et autres super-héros.
Une manière pour DC de se différencier à nouveau de Marvel.

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La fin d’une ère

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