Pourquoi la Cinémathèque française s’enfonce dans le conflit social

Publié le par Ariane Nicolas,

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Grèves, lettres ouvertes, intervention des CRS… Rien ne va plus dans le temple de la cinéphilie.
Fin janvier, une étudiante en cinéma travaillant comme agent d’accueil à la Cinémathèque française diffusait une lettre ouverte pour dénoncer les conditions de travail d’une partie du personnel de l’institution, notamment les agents employés par des sous-traitants. Plusieurs grèves avaient déjà eu lieu mais la situation n’évoluait pas.

Quatre mois plus tard, non seulement ces problèmes ne semblent pas résolus mais le climat de tension s’est un peu plus dégradé. Il a atteint un nouveau seuil dans la nuit de vendredi à samedi 7 mai, avec l’évacuation manu militari de la Cinémathèque par les CRS.
Après la projection de Prête à tout, de Gus Van Sant, une cinquantaine de personnes refusent de quitter les lieux. Elles sont rejointes par quelques personnes venues de l’extérieur. Les manifestants reprennent le mode opératoire de Nuit debout, quelques jours après l’occupation de théâtres parisiens par des intermittents du spectacle.
Ils lisent notamment un texte de soutien aux employés du Centre Pompidou-Metz, qui craignent des suppressions de poste chez un prestataire.

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“La sous-traitance pour des postes fixes, de surcroît dans la culture, ça ne marche pas. Ça rend les gens fous. Ça crée trop de mépris, de méprises. […]
Aujourd’hui nous dénonçons la précarité, nous nous joignons à vous tous, nous dénonçons la sous-traitance.”

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Un dialogue s’instaure entre le directeur adjoint de la Cinémathèque, Michel Romand-Monnier, et des manifestants, selon Libération. Le dirigeant justifie cette sous-traitance “par l’impératif catégorique du budget, insuffisant à créer des emplois stables, trop lourds en termes de charges sociales et de droit du travail”, écrit le quotidien. Un discours que les occupants refusent d’accepter.
Vers 3 heures du matin, les cadres de la Cinémathèque présents demandent l’intervention des CRS, déjà postés aux alentours. Nuit debout n’a pas droit de cité dans le temple du cinéma parisien, pourtant au cœur de la contestation populaire en Mai 1968. Autre temps, autre hiérarchie, autre mœurs.

Une institution riche en symboles

Dimanche 8 mai, c’est au tour des Inrocks de se mêler au débat. L’actuel patron de la Cinémathèque française, Frédéric Bonnaud, a dirigé l’hebdomadaire pendant trois ans, jusqu’à fin 2015. Dans une lettre ouverte, le journaliste Jean-Baptiste Morain le prie “d’adopter une attitude claire” sur le sujet.

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“Les déclarations récentes de ton sous-directeur (la cinémathèque française ‘n’est pas de gauche’) et la décision de faire appel aux CRS pour évacuer au plus vite ses locaux, que des citoyens et cinéphiles qui veulent seulement penser et parler de l’avenir de notre société occupaient, nous chagrinent beaucoup, nous, générations qui ont aimé le cinéma grâce à la cinémathèque et ce qu’elle incarnait. […]
Il nous est insupportable d’admettre que cette institution, avec son histoire et son passé glorieux, chaotiques, mouvementés, voire parfois folkloriques, puisse aujourd’hui adopter en les assumant des méthodes policières et de gestion du personnel proprement de droite.”

En attendant une (hypothétique) réponse de la part de la direction, les employés mécontents pourront continuer de poster leurs témoignages sur le Tumblr “Lettres ouvertes à la Cinémathèque française”. Le blog en compte déjà une trentaine.