Niels Schneider, le mystérieux espoir du cinéma français révélé par Dolan

Publié le par Lucille Bion,

( Niels Schneider dans Le Coeur Régulier ( © Version Originale / Condor ))

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À 16 ans, Niels Schneider était comme la plupart des jeunes : il ne savait pas trop quoi faire de sa vie. Il a grandi dans une famille d’artistes, franco-canadienne. L’ado aux traits angéliques, qui se baladait en skate, est devenu une grande perche au franc parlé, assumant chacune de ses phrases, chacun de ses actes, comme s’il était allergique à l’hypocrisie et à la grande révolution snob de notre époque. Il n’a même pas trente ans et a déjà tourné avec les plus respectables : Xavier Dolan, Mathieu Amalric, Fabrice Luchini

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C’est un jeune homme humble, plutôt calme et apaisant qui nous accueille, après avoir avalé un café et pris sa dose de nicotine.

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Du théâtre au cinéma

S’il a quitté les skateparks, sa première passion, pour les plateaux de tournage, c’est pour se rapprocher de son frère, Vadim, décédé en 2003 dans un accident. Il était comédien, star d’une série pour ados, 15/A. Curieux de voir ce qui faisait vibrer son aîné, Niels Schneider décide, comme pour entretenir un lien avec son frère, de suivre des cours de théâtre. C’est le déclic.

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“La première fois que j’ai joué au théâtre, j’ai été envahi par un sentiment de liberté. C’est comme si j’avais pu exprimer ce que je m’interdisais dans la vie. J’aime beaucoup le rapport avec le public. Au théâtre on voit moins tes traits, on est moins proche, du coup tu peux composer quelque chose de plus loin de toi.”

Il se fait rapidement repérer par des directeurs de casting à la recherche de la perle rare, encore innocente, et décroche deux premiers rôles similaires pour lesquels il se glisse dans la peau de l’ami d’un ado qui s’est suicidé, dans Le Goût du néant, un court-métrage et Tout est parfait, un film qui dresse le portrait d’une jeunesse fragile et pleine de fougue. Le grand écart du théâtre au cinéma est réussi. Il vient de prendre sa revanche sur la vie, avec toujours, encore maintenant et évidemment jusqu’à la fin, Vadim toujours présent.

“Le décès de mon frère, ce n’est pas une blessure isolée. C’est la pierre angulaire sur laquelle je me suis construite. J’avais 17 ans, je n’étais pas solide sur mes deux pattes. Ça m’habite évidemment tous les jours, c’est quelque chose que je porte avec moi, quand je joue.”

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Mais pour se réinventer, créer et transmettre justement des émotions, sans se laisser déborder, il a besoin d’être cadré, d’avoir un metteur en scène qui, après l’avoir séduit avec son scénario, est prêt à défendre ses idées, son univers :

“Je n’aime pas les réalisateurs qui écrivent des personnages pas très intéressants et qui se disent que parce qu’on est acteur, on va se débrouiller pour faire quelque chose de bien. Parfois il y a des scénarios très minces, très vagues. Fellini, par exemple, travaillait avec des scénarios qui faisait parfois seulement 10 pages.”

Du fantasme à la révélation

À l’occasion de l’avant-première de Tout est parfait, en 2008, il rencontre Xavier Dolan. Le réalisateur que tout le monde s’arrache désormais est sur le point de réaliser son premier film, J’ai tué ma mère. Les deux hommes deviennent amis et se retrouvent un an après, sur le tournage des Amours imaginaires. Cette fois, Xavier Dolan imagine un triangle amoureux et filme avec fascination son nouveau complice. Ce rôle marquant va faire décoller la carrière de Niels Schneider et pendant très longtemps, lui coller à la peau : l’acteur qui a alors 22 ans devient un objet de fantasme, de contemplation. 

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Et c’est à partir de là que s’enclenche tout le paradoxe Niels Schneider : l’inspiration de Xavier Dolan enchaîne les seconds rôles. Dans L’Âge atomique, il joue les emmerdeurs nocturnes, l’amant insolent de Sophie Marceau dans Une Rencontre et fait une brève apparition dans Le Cœur régulier de Vanja D’Alcantara. 

Niels Schneider sent qu’il est capable d’offrir autre chose. Il se fait approcher par Arthur Harari, après l’avoir vu dans Métamorphoses, qui lui propose le rôle-titre dans Diamant noir, un film sombre dans lequel il ne compte plus pour son physique mais bien pour son jeu. Métamorphosé, il dévoile une part animale à laquelle personne n’avait eu encore accès :

“C’était dingue pour moi, ça m’a donné une pêche pour continuer à travailler. J’ai senti que je pouvais plus m’exprimer. C’est comme si c’était la première fois que je jouais. Je pouvais donner un peu d’intimité, et je n’étais pas seulement regardé.

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En lice pour les César

Avec cette prestation surprenante, la révélation d’Arthur Harari est en route pour remporter le César du “meilleur espoir”, qu’avait décroché l’an passé Rod Paradot. Une reconnaissance qui symboliserait, à ses yeux, un encouragement… bien mérité, selon nous.

Après avoir appris à danser pour Polina, danser sa vie sorti fin 2016, le revenant cinéphile continuerait bien de repousser encore plus ses limites dans des tragi-comédies à la Woody Allen ou pourquoi pas, dans un film d’horreur.

Il est aujourd’hui à l’affiche du conte d’Ado Arrietta, Belle dormant, dans la peau du prince, forcément. Niels Schneider est venu réclamer sa couronne.