Je suis accro aux concours d’artisanat (Great British Bake Off, Making It…)

Publié le par Delphine Rivet,

© BBC/Love Productions

"C’est comme lire Modes et Travaux, mais en vachement mieux !" Cet été, Konbini explore les plaisirs coupables de sa rédaction.

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Cet été, la rédaction de Konbini révèle au grand jour ses guilty pleasures. Knacks froides, chaîne YouTube obscure ou drôle d’obsession pour des pages Wikipédia sans grand intérêt, préparez-vous à la grande exploration de nos plaisirs inavouables.

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Je ne sais pas si c’est la mémé qui sommeille en moi, ou la frustration de n’avoir aucun talent artistique combinée à mon intérêt pour le bricolage, mais l’artisanat me fascine. Et il se trouve que, depuis quelques années, la télé (surtout américaine et britannique), ou plus certainement les plateformes de streaming, fait ses choux gras d’émissions où s’affrontent les meilleur·e·s dans divers domaines. Certains programmes sont déjà des institutions, d’autres sont beaucoup plus confidentiels.

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Comme mon équilibre mental repose sur la compartimentation des choses, je dois d’abord vous expliquer ce que j’inclus dans cette catégorie que j’appelle “concours d’artisanat”. Je considère ici comme artisanat tout ce qui relève des techniques et du savoir au service d’un objet artistique. Ce n’est pas la définition du Larousse, et, oui, j’estime qu’un gâteau de Battenberg avec un damier parfaitement réalisé et un glaçage sans bavure est une œuvre d’art. Mes goûts se portent donc sur toutes sortes de pratiques, de la céramique au DIY, en passant par les sculptures florales, le verre soufflé ou, of course, la pâtisserie.

Les programmes dont je vais vous parler ont tous pour point commun d’être ultra bienveillants : l’ambiance entre les candidat·e·s est toujours très amicale et l’entraide est de mise, les présentateur·rice·s souvent drôles (la télé anglo-saxonne a bien compris qu’il fallait toujours accoler un ou une humoriste à un ou une pro), et les juges préfèrent encourager plutôt qu’humilier.

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Par conséquent, vous ne me prendrez jamais à regarder des compétitions bien plus sérieuses comme Top Chef, c’est beaucoup trop stressant ! Pour la plupart de ces émissions, le ou la gagnant·e ne remporte pas de somme d’argent exorbitante, mais un beau trophée, ou un stage avec les meilleur·e·s artisan·e·s dans leur domaine, du matériel et, tout simplement, la fierté de s’être dépassé·e, et d’avoir lié des amitiés indéfectibles.

© BBC/Love Productions

“On your marks. Get set. BAKE !”

Non, moi je veux de la beauté, de la douceur, des gens inspirés et qui préfèrent rire aux éclats quand ils se plantent. Petit aparté, il y a d’ailleurs le show de pâtisserie made in Netflix, Nailed it !, dans sa version originale présentée par la truculente Nicole Byer, qui n’est basé que là-dessus : des personnes archi-nulles en gâteaux qui doivent tenter de reproduire des compositions professionnelles.

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C’est hyperdrôle, et ça décomplexe à mort de ne jamais avoir réussi à monter une fucking chantilly. Je ne fais qu’une parenthèse sur ce show puisque, comme spécifié plus haut, il n’entre pas vraiment dans les critères que j’ai posés et, au risque de radoter : il faut com-par-ti-men-ter ! Sinon c’est le bazar.

Bref, restons dans les choux à la crème. J’ai d’abord adoré la reine des émissions en la matière, celle qui a ouvert la voie à toutes les autres et qui nous a fait croire en un monde où la compétition pouvait être saine, apaisée, et joyeuse. Je veux bien sûr parler de The Great British Bake Off. Je ne tolère aucune imitation ou adaptation, que voulez-vous, je suis une puriste de la tarte, c’est l’originale ou rien. Je suis, et j’assume, la seule personne de mon entourage à faire des vannes sur les “soggy bottoms”. Une blague pâtissière qui ne parle probablement qu’aux Britanniques, et qui est devenu un gimmick de l’émission.

Lorsqu’elle a été lancée sur la BBC en 2010, The Great British Bake Off avait pour juges le spécialiste du pain Paul Hollywood – dont le regard bleu acier terrorise les candidat·e·s et qui peut seulement être neutralisé par sa légendaire poignée de main, signe de validation ultime de la part du bonhomme – et la très “posh” Mary Berry. Ce dernier est toujours là, et la deuxième nous a quittés. Enfin, elle n’est pas morte hein, elle a juste laissé sa place à Prue Leith.

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Mary Berry, sa bête noire, c’était les “soggy bottoms”, que l’on pourrait traduire par “fonds détrempés”. Interdit de lui servir une tarte qui baigne dans son jus, ça non ! Il fallait voir sa petite grimace de bourgeoise dégoûtée quand ça arrivait. Du coup, je vous l’apprends sans doute, mais l’expression “no soggy bottom !” est entrée dans le langage courant outre-Manche. Mais comme j’habite pas du bon côté, je fais des flops.

© BBC

Peu importe, tant la satisfaction est grande de voir ces “bakers” de tous horizons (le casting a toujours été hyper inclusif) se donner à fond, et toujours dans la bonne humeur, pour réaliser des gâteaux qui sont sans doute délicieux, mais surtout, qui sont magnifiques à regarder. J’ai tellement vu d’épisodes que je me permets des commentaires du style “non mais elle a posé son craquelin bien trop tôt”, ou encore “han la boulette, elle a fait une génoise au lieu d’une dacquoise”, alors que mon record personnel c’est une tarte ganache chocolat noir, poires pochées et chantilly (ou plutôt une flaque, puisqu’elle n’a jamais monté) à la noix de coco. Ça a l’air chaud comme ça, mais c’est vraiment pour les débutants.

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Défier les éléments et la nature

Je suis ensuite tombée par hasard sur En verre et contre tous, sur Netflix. Une compétition de souffleurs et souffleuses de verre. Et là, on monte d’un cran niveau stress. Le concept est dans le nom, plusieurs candidat·e·s s’affrontent, dans un hangar où il doit bien faire 50 degrés à cause des énormes fours, pour réaliser des créations entièrement en verre. On se contente ici d’admirer puisque c’est nettement plus compliqué de reproduire les recettes à la maison. Mais c’est joli.

On pousse des “oh” et des “ah” d’admiration devant cette maîtrise des matériaux et des éléments qui confine à l’alchimie. On angoisse et on sue aussi alors que le moindre geste de travers peut faire voler en éclats des heures de travail. Les techniques n’ont plus aucun secret pour moi (en théorie) : filez-moi des cannes de verre de couleur et je vous fais un reticello au cordeau (dans ma tête).

Toujours sur Netflix, l’une de mes émissions préférées, qui n’a malheureusement qu’une saison au compteur (arrêtez de faire roupiller vos milliards, Ted Sarandos et Reed Hastings, et donnez-lui une saison 2 !), c’est La Grande Bataille des Fleurs. En plus, à l’animation, on retrouve une actrice que j’aime d’une passion immodérée : Natasia Demetriou, qui joue la vampire tzigane Nadja dans What We Do in the Shadows (sur Canal+, allez voir c’est hilarant). C’est simple, elle est parfaite : ses tenues sont trop belles, ses cheveux sont magnifiques, et elle mène le show avec ces petites vannes dont elle seule a le secret (et qui parfois font mention de ses poils, aux jambes ou ailleurs, on adore et c’est de très bon goût).

Mais le plus important c’est évidemment… bah les fleurs. Et là, étant la fille d’une ancienne fleuriste, je vous raconte pas les émotions. Parce qu’on ne fait pas des bouquets ici, non non, on fait des compositions de plusieurs mètres de haut : un tyrannosaure qui sort de terre, un feu d’artifice en suspension, une robe entièrement végétale, un fauteuil démesuré pour un festin de géants… Les fleurs sont partout, on se croirait dans l’affiche de Midsommar, mais en plus détendu. C’est un festival de couleurs, de textures et, si notre cerveau parvient à totalement s’immerger dans ce doux spectacle, de parfums.

Fais-le toi-même

© NBC

Et, puisque je vous parlais de l’animation qui est véritablement la glu permettant à tous les ingrédients d’une bonne émission d’artisanat de se colmater, c’est d’abord son duo de présentation qui m’a conduite à dévorer le programme suivant. Et là, bon courage pour trouver les trois saisons de cette compétition de DIY (Do It Yourself, pour les non initié·e·s, mais on appelle ça aussi du “crafting” quand on veut se la péter). Jamais diffusée en France, Making It est présentée, excusez du peu, par Nick Offerman et Amy Poehler. Lui est un ébéniste émérite, elle une néophyte enjouée, mais surtout, ce sont les interprètes légendaires de Ron Swanson et Leslie Knope de Parks and Recreation (soit la meilleure comédie du monde, taisez-vous, il n’y a pas débat).

Le visionnage de Making It et le spectacle qu’offrent ses candidat·e·s affairés à leurs établis m’ont donné de l’inspiration comme jamais et je suis désormais l’heureuse propriétaire d’un pistolet à colle électrique, d’une perceuse-visseuse que je chéris, de tasseaux de bois en veux-tu en voilà, de mètres de cordelette en fibre naturelle, de papiers de soie de toutes les couleurs, et de toutes les tailles de clous et de vis imaginables. Parce que oui, c’est l’effet secondaire de ce show : ça donne envie de customiser et de bricoler tout ce qui vous tombe sous la main.

Ma dernière trouvaille du genre s’est faite par hasard et, comme je l’ai démarrée en retard, ô joie, j’avais 6 saisons à rattraper. Pour vous donner une idée, c’est comme si un addict, en retournant les coussins du canapé, découvrait un paquet de coke de 2 kg planqué là. C’est british, encore, et ça s’appelle The Great Pottery Throw Down (là aussi, introuvable sur les canaux légaux, mais diffusée sur HBO Max hors de nos frontières).

Pas la peine de traduire, vous aurez compris qu’il est ici question de poterie. C’est un monde qui m’était totalement inconnu jusqu’ici et, comme pour En Verre et contre tous, une grande part de l’attrait que suscite chez moi cette émission tient au fait qu’elle allie l’art et l’alchimie. Par exemple, saviez-vous qu’avec la technique japonaise du raku, une cuisson très rapide qui provoque un choc thermique, on peut coller des peaux de bananes sur sa céramique et provoquer des réactions chimiques inattendues avec le potassium qu’elle contient ? Moi non plus. Ça ne me sert à rien de savoir ça, mais ça n’en reste pas moins fascinant.

Je n’ai pas encore cédé aux sirènes de la poterie mais ça me démange fort. Il y a des cours et un atelier tout équipé qui vient d’ouvrir près de chez moi, mais à plus de 150 € les deux heures, merci bien, mais je vais me contenter de faire des sculptures en pâte à sel. Je n’ai pas trouvé de remplaçante à ces émissions, ni ma prochaine obsession artisanale, mais je reste à l’affût. Pas la peine de m’envoyer des vieux numéros de Modes et Travaux, mais je prends tous les conseils pour satisfaire mon addiction !